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Sorties de la Semaine - Page 59

  • Grand écran: Dans "La Mif", plongée au coeur d'un foyer d'urgence, on parle avec ses tripes!

    Au cœur d'un foyer d’urgence,  des adolescentes issues de familles brisées tentent de recoller les morceaux pour en retrouver une. Dans cette structure habituée aux tensions, la relation entre une fille de 16 ans  sexuellement majeure et un jeune garçon de 14 ans, donc mineur, met le feu aux poudres. Véritable déflagration, elle révèle un système rétrograde et sclérosé.   

    Nous plongeant d’entrée dans le bain avec une scène intense qui va se répéter tout au long du film, mais vue sous différents angles, Fred Baillif propose une impressionnante fiction du réel.  Jamais dans le pathos ou le jugement, proche tout en gardant la bonne distance,  il offre un  brillant témoignage sur  les structures d’accueil, une réflexion sur le métier d’éducateur,  un questionnement sur le droit des ados à la sexualité,  sur la limite entre la nécessité de les protéger et de les aider à avoir confiance en eux.   

    Le long métrage se construit en chapitres, avec des portraits forts, pudiques, émouvants  des  pensionnaires  et du personnel d’encadrement. Les filles, toutes actrices non professionnelles, parlent avec leurs tripes. Elles livrent de formidables interprétations. A commencer par celle, bouleversante d’humanité, de Lora  (Claudia Grob) la directrice du foyer. La vocation chevillée au corps, elle se retrouve pourtant dans le collimateur de l’administration, accusée de manquements graves à sa fonction.

    «La Mif»  a obtenu le prix du meilleur film de la catégorie Generation 14plus à la Berlinale de 2021, s’est baladé avec succès dans d’autres festivals dont celui de Zurich, est nominé six fois aux Quartz du cinéma suisse. Une reconnaissance amplement méritée. Educateur dans un foyer lorsqu’il était étudiant et plus tard en milieu carcéral, Baillif sait de quoi il parle.

    Le réalisateur a trouvé son style

    "J’ai fait énormément de recherches.  Les affaires  sexuelles taboues dans la société le sont encore davantage en institution. Ce que je raconte n’est pas la réalité mais pourrait l’être.  Je pose également la question du ghetto qui me passionne. Les raisons pour lesquelles des jeunes se retrouvent en foyer ne se résument pas à la délinquance. On les place dans des lieux  qui vont être stigmatisants".

    Fred Baillif est par ailleurs très fier des filles qui ont participé au développement de leur rôle respectif qui, tient-il à préciser, n'est pas leur vie bien qu'elles soient elles-mêmes issues de foyers. "J’ai mené pendant deux ans des interviews très approfondis pour mieux les connaître, créé des ateliers d’improvisation, procédé à des jeux de rôles. Je leur ai appris à ne pas jouer la comédie." 

    "Il y a une maturité dans ma démarche consistant à marier le réél et la fiction. Je me suis remis en cause. Ce prix berlinois qui me rend heureux, m'a donné confiance dans le style que j'ai choisi et que je pense avoir véritablement trouvé".

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 2 mars

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  • Grand écran: Depardieu et son double se mettent à nu dans "Robuste"

    Le grand Depardieu ne cesse d’inspirer Constance Meyer qui lui a déjà consacré trois courts métrages décalés, notamment Rhapsody où il joue un  rôle de.. nounou. Dans Robuste, premier long de la cinéaste française de 38 ans née à Sion, il se glisse dans le costume de Georges, star sur le retour dont l’agent de sécurité, son bras droit, son protecteur et seul ami est obligé de s’absenter pendant quelques semaines. Athlète de haut niveau de 25 ans, sa collègue Aïssa (Deborah Lukumena, révélée dans Divines en 2016 , César de la meilleure actrice dans un second rôle), le remplace. Un lien unique va se créer entre ces deux êtres d’âges et de milieux très différents, mais qui se ressemblent. 

    Gérard Depardieu n’incarne pas, il est Georges et vice-versa. Son double se met ainsi à nu en icône incontrôlable, blasée, fatiguée, amère, désenchantée. Misanthrope, hypocondriaque, sollicité de partout, il veut qu’on le laisse tranquille. «Parfois, j’aimerais être mort pour qu’on me foute la paix», dit-il, n’hésitant pas à lâcher qu’il aime faire chier les gens. En souffrance, bourré de contradictions, il fuit le monde, cherche le calme  mais ne supporte pas de rester seul. Au fil des jours, il va se rapprocher d’Aïssa, à la fois garde du corps, baby-sitter de luxe et répétitrice.   
     
    Dans ce récit d’amitié attachant, émouvant, Constance Meyer met en scène deux créatures corpulentes, physiquement impressionnantes, mais en mal de tendresse. Ours mal léché, vieux gamin capricieux à la carrure protubérante, Gérard-Georges ne se sent pas moins abandonné. Il montre sa vulnérabilité, ses failles Sans oublier cette autodérision, cette drôlerie irrésistible qu’on aime tant chez lui. Talentueuse, puissante mais cachant ses propres fêlures, lutteuse au propre et au figuré, incroyable de naturel, Aïssa- Deborah, qui séduit avec son aplomb, son côté à la fois enfantin viril et féminin, lui tient la dragée haute.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 2 mars.        

     

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  • Grand écran: "La vraie famille", mélodrame bouleversant avec une remarquable Mélanie Thierry

    Anna, 34 ans, vit avec son mari, ses deux petits garçons et Simon,  placé chez eux par l’Assistance Sociale depuis l’âge de 18 mois. Il est aujourd’hui âgé de six ans. C’est alors que son père biologique veut récupérer sa garde. Un arrachement pour Anna, qui ne peut se résoudre à laisser partir celui qui l’a toujours appelée «Maman».

    La vraie famille, qui en réalité n’existe pas dans la mesure où elle ne cesse de changer, est le second long métrage de Fabien Gorgeat. S’inspirant de sa propre histoire, évitant le manichéisme et les pièges du pathos, il livre un mélodrame bouleversant. Soulevant avec intelligence, finesse et sensibilité des questions sur la complexité de la situation, l’auteur évoque parallèlement l’inégalité sociale entre des parents de substitution aisés qui peuvent offrir beaucoup plus à Simon que son vrai papa, jeune veuf seul gagnant péniblement sa vie. 

    Fabien Gorgeat capte parfaitement les tourments que provoque le retour de ce dernier vers la famille d’accueil, le déchirement qu’éprouve Anna, louve dévorante qui voit dans cette restitution obligée une forme d’injustice. Elle invente des prétextes pour ne pas rendre Simon, d’où le côté thriller qui traverse le film.

    Réaliste, tendu, avec une authenticité que confortent des enquêtes auprès des familles, des gens spécialisés, plus particulièrement une longue rencontre avec une éducatrice, l’opus est porté par Mélanie Thierry. La comédienne trouve là l’un de ses plus beaux rôles. Elle est remarquable d’intensité et de justesse face au petit Gabriel Pavie, impressionnant de naturel. Une révélation. A leur côté Félix Moati se montre très convaincant en père biologique qui a entrepris un gros travail de reconstruction.   

    «Je suis parti de mon enfance»

    «Cela fait 25 ans que j’avais envie de faire ce film », raconte Fabien Gorgeat de passage à Genève. «Je suis parti de mon enfance. Comme dans l’intrigue j’ai vécu avec un bébé de 18 mois placé chez nous alors que j’en avais trois et demi de plus. Mais j’ai également été influencé par Kramer contre Kramer, de Robert Benton, Le Kid de Charlie Chaplin. Sans oublier  E.T. de Steven Spielberg, parce que dans le fond, accueillir cet être fragile, c’était comme accueillir un extra-terrestre».

    Pourquoi votre famille a-t-elle décidé de s’occuper d’un gosse de plus?

    Ma mère s’est simplement dit, pourquoi pas ? Une voisine le faisait.  Mais on ne prend pas la mesure de ce que cela va impliquer émotionnellement. Au début on vous conseille de l'aimer mais pas trop. Evidemment ça ne marche pas de cette manière. On s’attache, on crée un lien et quand l’enfant doit partir, c’est dur.  

    On peut parler d’hymne à l’amour maternel.

    Je dirais plutôt surmaternel. On va très loin dans ce sentiment. Ma mère n’était pas comme Anna, qui perd peu à peu la raison par débordement d’amour.

    Au départ, on voit le père comme un trouble-fête. On éprouve presque de l’hostilité à son égard.

    Absolument. Simon est dans un conflit de loyauté. Mais les choses évoluent au fil du récit. Il est important qu’il n’y ait que des parties aimantes. Le père a toute sa légitimité dans sa revendication. Anna doit désapprendre à être mère et lui doit au contraire apprendre à se réapproprier son rôle. 

    Mélanie Thierry est extraordinaire. Avez-vous écrit le rôle pour elle?

    Pas du tout Je ne la connaissais pas. Je l’avais notamment découverte dans La douleur. Mais je n’avais pas vu de lâcher prise chez elle. En fait elle est entre ma mère, issue d’un milieu populaire qui a inspiré le personnage d’Anna, et Meryl Streep qui veut récupérer la garde de son fils qu’elle avait laissée à son ex-mari. Mélanie est entre le quotidien et la sophistication.

    Fabien Gorgeat va nous donner d’autres émotions avec son prochain film, une comédie évoquant une relation très forte entre deux potes de 16-17 ans et une fille. «Il y aura de la trahison, du théâtre, de la sexualité.»

    La vraie famille, à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 23 février. 

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