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Sorties de la Semaine - Page 63

  • Grand écran: "A Good Man" explore le désir d'enfant chez un trans. Noémie Merlant époustouflante

    Marie-Castille Mention-Schaar ne craint pas de s’attaquer à des sujets casse-gueule. En 2016, avec Le ciel attendra, elle plongeait au cœur de l’embrigadement islamiste de deux jeunes filles ordinaires. Dans A Good Man,  elle s’inspire d’une histoire vraie pour raconter  celle d’un transsexuel, Benjamin (Noémie Merlant) et Aude (Soko)  Ils s’aiment depuis six ans et ont quitté la Provence pour l’ile bretonne de Groix, une bulle protectrice où ils recommencent leur vie, loin des moqueries et d’une relation maternelle compliquée.

    -Un parcours aussi difficile qu'inconnu

    Ils rêvent de fonder une famille, mais Aude est stérile. Benjamin, qui n’a pas terminé sa transition, décide de porter l’enfant. Aude s’inquiète, lui rappelant à quel point il (alors Sarah) détestait son corps lors de leur rencontre en boîte de nuit. «Imagine en ce qu’une grossesse lui fera...», lui dit-elle. 

    La doctoresse lui rappelle aussi que porter un enfant est considéré comme le symbole de la féminité et que cela peut signifier la négation de sa transition. Ce que réfute Benjamin. Le processus n’est aucunement remis en question et il n’est pas moins l’homme qu’il a voulu devenir parce qu’il a encore son utérus. Pour lui il ne s’agit pas d’un sacrifice mais d’un acte d’amour.  
    Tous deux se lancent dans un parcours difficile, inconnu,  une quête extraordinaire que la réalisatrice évoque avec pudeur, sensibilité et empathie. Sortant des clichés, elle montre un  couple somme toute banal, qui va bien, qui travaille, chacun aimant son métier. Elle ne filme pas la transition, mais le désir  profond d’enfant, la volonté d’accès à la paternité pour les transsexuels, la mise en lumière du problème dans une société peu tolérante à laquelle ils doivent se confronter. Les remarquables Soko et Noémie Merlant, par ailleurs méconnaissable et saisissante de justesse en garçon (casting qui a provoqué la polémique, voir ci-dessous),  contribuent très largement à la réussite de ce film prenant, attachant, envoyant valser tabous et préjugés.

    .Recherches importantes

    Mais encore la démarche exigeait-elle de se documenter sérieusement, comme nous le raconte  la cinéaste, rencontrée à Genève. «J’ai eu envie de réaliser ce film après avoir aidé à la production d’un documentaire,  Coby, de Christian Sonderegger (co-scénariste de A Good Man) sur son demi-frère trans Jacob Hunt. A quelques mois de son hystérectomie, il s’était posé beaucoup de questions,  sa compagne redoutant terriblement la grossesse. Finalement il a abandonné l’idée de porter l’enfant. Mais les nombreuses discussions que nous avons eues m’ont énormément interpelée.  J’ai voulu en savoir  davantage.  Et j’ai découvert que des milliers d’hommes ont porté leur enfant, comme Thomas Beatie, premier homme enceint (trois fois) et du coup ultramédiatisé. Je suis ensuite allée à la rencontre  d’autres trans  qui ont entrepris la même démarche».  

    -Le choix de votre interprète était crucial. Dans la communauté trans, on vous reproche  d’avoir confié le rôle à une actrice cisgenre.

    Dans le souci de donner la parole aux intéressés-ées, j’ai cherché un comédien idoine, mais j’avais peu de contacts. Et un directeur de casting impliqué dans des projets LGBTIQ+ m’a mis des bâtons dans les roues parce que je ne suis pas une réalisatrice trans. Je me suis débrouillée seule. On m’a présenté quelques acteurs, j’ai procédé à quelques auditions. Par exemple avec Jonas  Ben-Ahmed, dont l’âge correspondait. Mais il s’agit d’une partition énorme qui va bien au-delà du vécu. Il exige du talent, de la technique, de l’expérience. Personne ne correspondait au Benjamin que j’avais en tête, y compris Jonas qui m’a avoué lui-même ne pas se sentir de taille à enfiler un tel costume. Il attendait simplement un rôle et je lui ai écrit un autre personnage.  A cet égard, je tiens à préciser que grâce à A Good Man, on dispose maintenant d’une banque de données où les acteurs-trices trans sont répertorié-ées.

    -Et vous avez finalement choisi Noémie Merlant qui est époustouflante. Au point qu’on se demande où elle est dans le premier quart d’heure...

    -J’avais déjà collaboré trois fois avec elle. Je n’avais aucun doute sur sa possibilité d’être Benjamin. Je connais sa manière de travailler, de se mettre dans ses personnages, de chercher au plus profond. On avait parlé de ce sujet depuis longtemps et je savais que ça l’intéressait  On a fait des essais physiques pour voir si cela fonctionnait. Il fallait que le public y croie. Elle avait des doutes par rapport à sa voix. Mais je lui ai présenté beaucoup d’hommes trans qui l’ont soutenue, épaulée, légitimée.

    -Vous souhaitez atteindre le plus large public possible, emmener les spectateurs vers des horizons qui ne sont pas forcément les leurs.

    -C’est vrai. Je participe à ma manière au combat, à la visibilité des trans, Mais ce qui m’intéresse  surtout c’est de raconter des histoires qui vont contribuer à rapprocher les personnes, les forcer à s’interroger sur elles-mêmes, leurs a priori, à découvrir tout d’un coup des choses qui les chamboulent. C’est pour cela que je fais du cinéma.

    Un autre sujet délicat à venir?

    -Beaucoup moins quand même! Je viens de terminer Divertimeno,  l’histoire d’une jeune fille inspirée de celle de Zahia Ziouni. Elle veut devenir chef d’orchestre avec l’ambition  de rendre la musique classique accessible à tous, dans tous les territoires, en créant un orchestre unique en ce qui concerne sa diversité et sa composition.-

    A Good Man à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 10 novembre.

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  • Grand écran: "Compartiment No 6", rencontre mouvementée dans un train pour Mourmansk

    Pour son deuxième long métrage, Compartiment No 6, récompensé par le Grand prix au dernier festival de Cannes, Le Finlandais Juho Kuosmanen ne se prend pas la tête pour nous raconter une histoire simple se déroulant au début de l’ère post soviétique. Dans ce film atypique, minimaliste, à la fois existentiel, romantique et plein d’humour, il met face à face deux personnages qui, au départ, éprouvent une forte hostilité réciproque.  

    Laura, étudiante finlandaise à Moscou, mélancolique, pas très gâtée par la nature, se passionne pour les pétroglyphes du néolithique de Mourmansk. Elle veut se rendre sur ce site archéologique en mer arctique avec Irina, son amoureuse. Mais au dernier moment, celle-ci a d’autres projets et Laura est obligée de faire seule ce très long périple. 

    Dans le train qui l’emmène aux confins de la Russie, elle doit partager son compartiment avec Ljoha, un jeune ouvrier russe qui part travailler dans les mines. Complètement saoul, ce macho se montre tellement insupportable et grossier que Laura est très tentée de descendre du wagon au premier arrêt, en dépit de son énorme envie de rallier Mourmansk. 

    Finalement elle décide de rester à bord. Une bonne idée car la cohabitation forcée, propice à une série de péripéties souvent cocasses, va peu à peu rapprocher ces deux êtres que tout sépare.  Au fil d'un voyage mouvementé, Ils vont surmonter leur aversion, apprendre à se connaître, à s’accepter et à s’apprécier, Partant ainsi autant à la découverte de l’autre que d’eux-mêmes.

    Mais au fait. quid des fameux pétroglyphes du néolithique si chers à Laura? Eh bien, il faut aller voir l’opus pour savoir le fin mot de cette histoire, presque exclusivement filmée au plus près des deux héros, dans l’espace confiné du compartiment No 6. 

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 3 novembre. 

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  • Grand écran: avec "Les Olympiades", Jacques Audiard signe une fine chronique générationnelle

    Le film étonne, sinon détonne pour le meilleur, dans l’œuvre de Jacques Audiard où dominent le plus souvent le noir et la violence. Après Dheepan et Les frères Sisters, l’auteur opère une véritable mutation dans Les Olympiades, son premier film en noir et blanc, co-écrit avec Céline Sciamma et Lea Mysius. 

    Il est librement inspiré de trois nouvelles graphiques de l’Américain Adrian Tomine, mettant en scène des personnages de jeunes losers newyorkais. L’histoire en forme d’effervescente comédie romantique aux allures de marivaudage, se transpose dans Les Olympiades, quartier du 13e arrondissement de Paris.

    Radiographie  des coeurs et des corps

    On y rencontre Emilie, jeune femme, douée mais peu intéressée par un plan de carrière. Collectionnant les petits boulots, elle aime Camille, son colocataire, jeune prof tenté par une reconversion dans l’immobilier. Mais lui est attiré par Nora, persécutée par des étudiants qui la confondent avec Amber, une cam-girl. S’exhibant sur Internet pour boucler ses fins de mois, Amber séduit Nora…

    Suivant ces trois filles et ce garçon en pleins désordres amoureux, dont les parcours se croisent et les désirs s’entrecroisent, Jacques Audiard  brosse un portrait de la jeunesse d’aujourd’hui. Evoquant les thématiques actuelles, la mixité, les questions sur le travail, la réussite, le polyamour,  le réalisateur se livre à une étude de mœurs, en radiographiant finement les âmes, les cœurs, les corps.  Cette intéressante chronique générationnelle se déroule sur fond de nouvelles technologies qui favorisent des rencontres, du harcèlement ou des ébats pornos en ligne. 

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 3 novembre. 

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