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Sorties de la Semaine - Page 60

  • Grand écran: "Lingui", le courageux combat d'une mère et de sa fille confrontées à l'avortement

    Mère célibataire rejetée, Amina vit chichement dans les faubourgs de N’djaména, au Tchad, en vendant des paniers de fer. Elle élève seule Maria, sa fille unique de quinze ans, qui lui oppose de plus en plus un mutisme qu’elle peine à comprendre. Un matin, la suivant sur le chemin du lycée, Amina constate qu’elle ne s’y rend pas. Son monde déjà fragile achève de s’effondrer, quand Maria lui annonce qu’elle est enceinte et qu’elle refuse de garder l’enfant. 

    La courageuse Amina qui a vécu la même situation quinze ans plus tôt avant d’être bannie par sa famille, veut absolument aider Maria, qui compte sur elle pour trouver le moyen, notamment financier, d’avorter. Mais comment faire dans un pays où l’interruption de grossesse est condamnée par la loi et la religion omniprésente? La bataille semble perdue d’avance. 

    C’est toutefois sans compter sur la solidarité, l’entraide, l’intensité des liens sacrés (Lingui) unissant la mère la fille et que tisse le réalisateur Mahamat-Saleh Haroun au fil d’un récit simple, direct, sans fioritures, évitant l’écueil du pathos ou de la sensiblerie.   

    Il y a dix ans, le cinéaste tchadien proposait Un homme qui crie évoquant la violence faite à un sexagénaire dépouillé de tout et poussé à bout. Là, il donne la parole à deux femmes. Incarnées par de convaincantes actrices non professionnelles, elles crient leur révolte, se dressant pour braver les règles d’une communauté patriarcale. 

    Bien que souffrant d’un scénario basique aux rebondissements  trop téléphonés, Lingui, les liens sacrés se révèle ainsi fort politiquement et socialement. Il fait écho à L’événement de la Française Audrey  Diwan, Lion d’or à Venise. Coïncidence un  rien fâcheuse, les deux films traitant du même sujet sortent le même jour.  

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 8 décembre.

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  • Grand écran:" L'événement", film majeur sur le droit à l'avortement. Avec la remarquable Anamaria Vartolomei

    2021, année des réalisatrices. Après l’Oscar attribué à la Chinoise Chloé Zhao pour Nomadland, la Palme d’or décernée à la Française Julia Ducournau à Cannes pour le clivant Titane, la Mostra de Venise a récompensé d’un Lion d’or Audrey Diwan, autre Tricolore, pour L’événement. Film politique majeur sur l’avortement, il se déroule dans la France de 1963, 12 ans avant la légalisation de l’IVG sous l’impulsion de Simone Veil. Adapté du récit autobiographique d’Annie Ernaux, il met en scène  Anne (l’excellente Anamaria Vartolomei), une lycéenne issue d’une famille prolétaire.

    Brillante, Anne a des rêves de liberté plein la tête. Elle veut devenir écrivaine. Mais elle tombe enceinte lors d’une première relation sexuelle. Une catastrophe qui peut sonner le glas de ses ambitions. Alors la courageuse jeune fille, prête à tout pour rester maîtresse de son corps et de son avenir, décide d’avorter. L’acte est passible de prison, mais elle tient absolument à poursuivre son cursus, "se soustraire à cette maladie qui ne frappe que les femmes et les transforme en femmes au foyer". Plus particulièrement dans un milieu modeste où les hautes études ne courent déjà pas de source.

    Anne a peu de temps devant elle. Les examens approchent et son ventre s’arrondit. Rythmé par l’égrenage des semaines qui passent, le film évolue à la façon d’un redoutable compte à rebours. Lancée seule dans une course contre la montre, l’adolescente doit non seulement dissimuler son début de grossesse, mais se battre contre les obstacles qui s’accumulent sur son  sinueux chemin de croix: trahison scandaleuse d’un médecin, veulerie du père biologique, lâchage de ses copines oscillant entre peur et jalousie.

    Audrey Diwan nous secoue et nous bouleverse

    L’auteure nous glisse dans la peau de cette adolescente qui tente par tous les moyens, dont certains font froid dans le dos, de se débarrasser du fœtus. On souffre, on partage sa révolte, on part avec elle en guerre contre le conservatisme, la rigidité d’un code législatif rétrograde et patriarcal. Et on tombe sous le charme de l’exceptionnelle Annamaria Vartolomei, habitée par son personnage. Alliant détermination, énergie, audace  et sensibilité, elle se révèle saisissante d’authenticité. A noter à ses côtés le Vaudois Kacey Mottet Klein et Sandrine Bonnaire dans le rôle de la mère.  

    Avec L’événement, l’un des grands films de l’année, Audrey Diwan nous bouleverse, nous secoue. Racontant une société qui condamne le désir des femmes et le sexe en général, l’œuvre sous tension croissante nous emporte par sa justesse, sa puissance. Tripale, passionnante, ingénieuse dans sa reconstitution historique, elle démontre la tragique réalité d’une maternité non désirée chez les jeunes filles, leur vécu et les drames que vivent encore des millions de femmes dans les pays où l’interruption de grossesse demeure criminelle. 

    Ce faisant, la cinéaste rend aussi hommage à celles qui ont lutté de toutes leurs forces pour la libre disposition de leur corps. La partie n’est pas gagnée. Il suffit par exemple de penser aux tentations de la Cour suprême des Etats-Unis à modifier le cadre légal garantissant le droit des Américaines à l’avortement, soit en le restreignant soit en l’annulant. 

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 8 décembre.  

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  • Grand écran: "Vitalina Varela", un sommet pour les inconditionnels de Pedro Costa

    Ce drame, signé du Portugais Pedro Costa, montre une quinquagénaire capverdienne débarquant dans un bidonville lisboète trois jours après les obsèques de son mari, qui y avait fait sa vie sans elle.  

    Celui-ci avait quitté son archipel dans sa jeunesse pour chercher du travail en Europe et Vitalina a attendu son billet d’avion pendant 25 ans avant de pouvoir le rejoindre. Amère, elle se  retrouve dans la maison en ruine construite par le défunt et qu’elle va s’atteler à rebâtir en souvenir d’une solide maison au Cap-Vert. 

    Formellement et esthétiquement parfait, nous laissant ressentir la souffrance de Vitalina,, magnifiant son visage, son corps et son regard, ce requiem d’une splendeur d’ébène, comme sa protagoniste, est sublimé par de fulgurantes traces de lumière trouant son obscurité.

    En dépit de ses qualités, le film éprouvant par sa lenteur, son austérité, pourrait demeurer confidentiel, comme d’autres œuvres de Pedro Costa. Il constitue en revanche un sommet pour les admirateurs inconditionnels de l’auteur, cinéphiles purs et durs appréciant un cinéma cérébral, introspectif. A l’instar d’une Vitalina hiératique, s’interrogeant sur son conjoint qui l’avait quittée sans explication un quart de siècle auparavant.

    Rappelons que Vitalina Varela avait décroché le Léopard d’or au Festival de Locarno en 2019. Le titre du film est aussi celui de sa comédienne principale, récompensée lors de cette édition du prix d’interprétation féminine. 

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 1er décembre.

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