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Sorties de la Semaine - Page 56

  • Grand écran: "The Reason I Jump" montre la perception du monde par les autistes. Fort et sensible

    En écrivant en 2007 The Reason I Jump (Sais-tu pourquoi je saute?), où il expose son univers intérieur, sa façon de percevoir le monde, sa relation aux autres, Naoki Higashida, un adolescent autiste muet, alors âgé de 13 ans, ne se doute pas qu’il va provoquer une véritable révolution pour la compréhension de cette maladie. Il devient ainsi le porte-parole de tous ceux qui en sont victimes.

    Alors qu’on a longtemps pesé que les autistes étaient incapables de communiquer avec l’extérieur, on découvre pour la première fois que l’esprit enfermé dans un tel corps est aussi curieux, subtil et complexe que celui de n’importe qui.

    Jerry Rothwell, notamment auteur du documentaire Comment changer le monde, propose une adaptation libre de ce récit en en évoquant les expériences de cinq jeunes autistes non verbaux aux compétences diverses, dans quatre continents.

    On rencontre ainsi Joss en Angleterre, dont le processus de pensée est comparé par son père à un "diaporama incontrôlable" Lors d’une scène anecdotique, on le voit par exemple paniquer inexplicablement en criant qu’il n’y a plus de pizza. De leur côté, en Virginie, les deux amis Ben et Emma communiquent grâce à un tableau alphabétique. En Inde, Amrit  s’est lancée dans la peinture et expose ses toiles. Sans oublier Jestina au Sierra Leone, où les enfants autistes sont stigmatisés, leur trouble étant  souvent qualifié de démoniaque.

    Tout en se concentrant beaucoup sur les sons et l’image, Jerry Rothwell  livre des portraits émouvants des enfants et de leurs parents. Evidemment on ne prétendra pas qu’un film suffit à nous rendre complètement perceptible l’univers mental d’un autiste. Mais il nous donne une idée de la neurodiversité dans un documentaire à la fois fascinant, fort et sensible, qui fait réfléchir sur une vision et une appréhension si différentes du monde. 

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 6 avril.

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  • Grand écran: "Le chant du cygne" avec le magnifique et bouleversant Udo Kier

    Quelque 20 ans après les deux premiers volets Edge Of Seventeen et Gypsy 83  centrés sur de jeunes membres LGBTQI+, Todd Stephens est revenu dans sa ville de Sandusky pour boucler sa trilogie Ohio Avec Le chant du cygne (Swan Song) Il rend un vibrant hommage à Pat Pitsenbarger (remarquable Udo Kier), un extraordinaire coiffeur local.

    Plus connu sous le nom de Mister Pat au temps de sa splendeur, le figaro excentrique était un must dans la petite cité. Aujourd’hui, il plie les serviettes dans une lugubre maison de retraite. Mais, apprenant qu’une ancienne cliente (Linda Evans) souhaitait qu’il la coiffe pour ses funérailles, il s’échappe de son EMS pour accéder à sa dernière volonté.  

    Une lettre d'amour

    Cigarette au bec, habillé d’un vieux survêt, Pat quadrille la ville en quête de produits de beauté essentiels à sa mission. Présenté comme l’un des derniers gays survivants de sa génération, il croise les fantômes de son passé. Sur le chemin des pompes funèbres,  il entre dans une boutique de vêtements pour dames. Le reconnaissant, la propriétaire lui offre un joli costume safari vert tendre. Sapé à neuf, bagouse scintillante à chaque doigt, Pat retrouve d’un coup son éclat d’antan.  

    Très inspiré, Todd Stephens propose une comédie douce-amère visuellement splendide,  «une lettre d’amour à la culture gay en voie de disparition», dit-il. En même temps, il dépeint finement la façon dont elle a ouvert la voie aux homosexuels d’aujourd’hui. Il lui suffit de quelques images pour montrer l’évolution des mœurs. Par exemple celles de Pat regardant un couple de papas jouer avec leurs enfants.

    Mais si on est particulièrement touché par cet opus dédié en outre aux homosexuels morts du sida, c’est surtout grâce au héros, le légendaire Udo Kier (76 ans). Désireux de changer radicalement de personnage, l’acteur de Fassbinder ou d’Argento trouve sans doute là son meilleur rôle. Génial, fascinant avec son regard bleu acier, Il n’incarne pas, il est Mister Pat, dont il épouse magistralement l’attitude, le charme, l’humour, la flamboyance, la nostalgie, l’extravagance, les excès, la tristesse, le sens de la fête. Cerise sur ce gâteau de roi, la qualité de tous les comédiens qui l’entourent.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 9 avril.

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  • Grand écran: "Vous ne désirez que moi" raconte les ravages d'un amour toxique. Swann Arlaud génial

    Signé Claire Simon, le film livre une série d’entretiens entre Yann Andréa, l’amant homosexuel de Marguerite Duras, et la journaliste Michèle Manceaux en 1982. En ouverture, on découvre un  jeune homme, couché sur un divan. Il écoute Capri c’est fini, le tube d’Hervé Villard. Il se lève et se penche à la fenêtre. Il attend une femme à qui il veut se confier. 

    Ce jeune homme, c’est Yann Andréa, l’amant de Marguerite Duras depuis deux ans, Il éprouve le besoin de parler Sa relation passionnelle avec l’écrivaine, de 38 ans son aînée,  ne lui laisse plus aucune liberté, Il doit mettre des mots sur ce qui l’envoûte et le torture. Il demande à une amie journaliste de l’interviewer pour y voir plus clair et décrit  avec lucidité et sincérité la complexité de leur amour et les injonctions auxquelles il est soumis.  

    En 2016, l’échange est devenu un livre  (Je voudrais vous parler de Duras) que Claire Simon a décidé de mettre en images avec la complicité de Swann Arlaud (Andréa) et Emmanuelle Devos (Manceaux). Tout se déroule au domicile de la romancière à Neauphle-le-Château. Pendant une heure trente-cinq, une personne s’épanche, l’autre écoute et enregistre, relançant de temps en temps la conversation en la recadrant. A la base il s’agit d’une simple interview filmée, mais grâce à la mise scène singulière de Claire Simon, on est immédiatement happé par l’histoire que déroule, entre bonheur et douleur, Yann Andréa sous les traits de Swann Arlaud.   

    Amour total, toxique, dévorant, destructeur

    C’est à Caen que le jeune étudiant en philosophie, rencontre Marguerite Duras à l’occasion d’une projection d’ « India Song ». Depuis qu’il est adolescent, elle a investi sa vie. Il est amoureux de son style après avoir lu « Les petits chevaux de Tarquinia ». Il lui écrit une lettre à laquelle elle ne répond pas. Cinq ans passent jusqu'au jour où ils se retrouvent à Trouville. Ils ne se quitteront plus.

    Vous ne désirez que moi parle de l'amour total, toxique, des ravages d’une passion dévorante, destructrice. Il fallait un sacré bon comédien pour se glisser dans la peau de Yann Andréa, fan absolu, amant sous emprise, renonçant à tout. Swann Arlaud y parvient avec un incroyable naturel et une rare intensité. Il n'incarne pas, il est cet être démoli, bouleversant, aussi désarmant que désarmé face à cette femme qui l'absorbe tout entier. 

    Pris dans son enfer, il raconte son rapport de fascination, d'admiration,de fascination obsessionnelle à Duras qui réprime ses désirs homosexuels, ne supportant même pas qu'il puisse en avoir, et qui veut le décrèer pour le créér. En même temps il dit: "Je suis sûr que jamais personne ne m'aimera comme ça. D'une attention jusqu'à vouloir que je n'existe plus, tellement cet amour est grand".

    L'ombre de la grande Marguerite plane sur ce face-à-face passionnant. On comprend qu'elle n'est pas loin. On la voit une seconde de dos, on l'entend déambuler, se manifester par de brèves sonneries de téléphone. Par ailleurs elle apparaît dans des images d'archives, des extraits de films, ajoutant de la puissance dramatique à l'oeuvre d'une Claire Simon particulièrement inspirée.

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 30 mars.  

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