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Sorties de la Semaine

  • Grand écran: "Friedas Fall", fascinant récit d'un infanticide, où la coupable apparaît aussi comme une victime

    Saint-Gall 1904, une affaire secoue la Suisse. Violée par son patron, Frieda Keller, une couturière de 25 ans, tue son fils Ernstli, l’enfant de son agresseur âgé de cinq ans, et l’enterre dans la forêt proche de la ville. Peu après, le corps est retrouvé et la mère, désespérée, avoue le crime. A l’issue d’un procès public dans la salle du Grand Conseil de Saint-Gall devant de nombreux curieux, la jeune femme, défendue sans illusion par le jeune avocat Arnold Janggen (Max Simonischek), est d’abord condamnée à la peine capitale. Puis elle est graciée, la sanction étant commuée en réclusion à perpétuité en isolement total. Un châtiment d’une rare cruauté, presque pire que la mort. 

    Avec En première ligne de Petra Volpe sur le quotidien infernal du personnel soignant, Friedas Fall est l’un des deux meilleurs films helvétiques vus récemment. C’est l’adaptation, par la réalisatrice suisse Maria Brendle, du roman de sa compatriote Michèle Minelli, publié l’an dernier. Un récit historique fascinant sur une époque où la femme n’avait aucun droit. 

    A fortiori une pauvre couturière célibataire avec enfant illégitime, comme le prouve notamment le fait que son violeur, Carl Zimmerli, marié, n’a jamais été appelé à rendre des comptes. Il était protégé par la loi, le système et la société patriarcale profondément misogynes de l’époque. Ce cas important a (lentement) influencé les débats sur les droits des femmes et une société plus juste, ainsi que l’évolution du système de justice pénale en Suisse.

    Certes coupable d’un crime affreux, Frieda apparaît en effet également comme une victime, qui peut susciter de l’empathie, de la commisération, étant donné sa situation pitoyable. C’est ce défi, parfaitement réussi, que s’est lancé Maria Brendle. Avec la complicité de l’excellente Julia Buchmann, dans le rôle de Frieda, elle nous emporte dans une bouleversante intrigue qui tend à nous faire mieux comprendre les circonstances qui ont poussé son héroïne à l’infanticide.

    Réalisatrice et actrice passionnées par ce drame  dont elles ignoraient tout 

    Rencontrées à à l’occasion du Festival de Locarno, la réalisatrice et l'actrice qui ont fait leurs débuts ensemble avec ce film, nous en disent plus. Maria Brendle s’est toujours intéressée à la condition féminine, comme en témoigne son court métrage Ala Kachuu-Take and Run,  évoquant le sort d’une jeune Kirghize kidnappée et mariée de force. Elle s’est vu offrir le projet de Friedas Fall, alors qu’elle ne connaissait rien de cette histoire. Mais la scénariste en savait beaucoup, ce qui a limité et simplifié les recherches.

    Le cinéaste a été immédiatement passionnée par cette époque dont elle brosse le portrait, par ce crime, et surtout par cette femme. «Elle a tué son enfant, mais ce n’était pas qu’un monstre. C’était aussi une victime. Elle l’a fait pour protéger son fils, pour qu’il ne vive pas comme elle, dans la misère et la honte, méprisé de tous pour le restant de son horrible existence».

    Pour son premier rôle important au cinéma, Julia Buchmann, qui travaille au théâtre et aussi  à la télévision allemande, est de cet avis. «J’ignorais pareillement tout de de cette affaire. Mais j’ai été totalement prise par ce personnage et son ambivalence. Je ne suis pas Frieda, mais je peux comprendre sa lutte. Pour moi c’est d’abord un être humain qui se débat dans une situation des plus pénible. Imaginez la difficulté d’être une femme comme elle, à cette époque, entourée d’hommes violents. Dans d’autres circonstances, elle aurait peut-être pu avoir une belle vie. Mais là, elle n’avait aucun choix, aucun avenir, aucune voix au chapitre. 120 ans plus tard, j’ai voulu lui en donner une.  

    Maria Brendle espère que Friedas Fall ait un petit impact, qu’il provoque la discussion. «C’est pour cela que je fais du cinéma, Je vais continuer à réaliser des films autour d’histoires de femmes. J’ai deux nouveaux projets». Avec Julia Buchmann bien sûr. Depuis leur rencontre, toutes les deux aspirent à collaborer le plus souvent possible. Sinon toujours. 

    «Friedas Fall», à l’affiche depuis mercredi 27 août dans les salles de Suisse romande. 

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  • Grand écran: "Y a-t-il un flic pour sauver le monde?" Non merci, on va s'en passer!

    Trente ans après Y a-t-il un flic pour sauver Hollywood?,  l’Américain Akiva Schaffer signe une quatrième resucée de la franchise inspirée de la série télévisée Police Squad, créée par les ZAZ. Liam Neeson y interprète le rôle de Frank Drebin Jr., fils de l’illustre chef de la prestigieuse Brigade Spéciale incarné par Leslie Nielsen à la TV et dans les trois précédents métrages. Un véritable cauchemar pour les criminels !

    Alors qu'un violent braquage de banque est en cours avec dramatique prise d’otages, une fillette à couettes entre en gambadant dans l’établissement. Attention danger, Car c'est en réalité Frank Drebin Jr. qui enlève le masque sous lequel il se cachait et commence à éliminer un à un ses adversaires avec sa sucette géante transformée en arme. Et c’est parti pour grosse fatigue dans le genre! 

    Pas trop longtemps, heureusement. La durée relativement brève est d’ailleurs la principale qualité de ce reboot qui se veut absurde, loufoque  et improbable, mais qui se révèle catastrophique et d’une rare inutilité, avec des situations et des gags plus débiles les unes que les autres. Et ça ne s’arrange pas côté personnages. En Frank Drebin Jr. Liam Neeson apparaît le plus souvent, l'image ci-dessus fait foi,  pathétique et ridicule du haut de ses 73 ans. Tout comme le couple qu’il forme avec Pamela Anderson en femme fatale sur le retour, prétendument décalée.  

    Pour résumer la chose, je ne vois que le titre paru dans 24 Heures et la Tribune de Genève. «Y a-t-il un flic pour interdire la série  des "Y a-t-il un flic…?" Tout est dit.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 30 juillet.

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  • Grand écran: entre fantasmes et découverte de l'homosexualité. "Sex" remet en cause l'identité masculine

    A travers trois films, Sex (rebaptisé Désir en français), Dreams et Love, le réalisateur norvégien Dag Johan Haugerud explore la capitale de son pays et les moeurs de ses habitants. Fonctionnant indépendamment les uns des autres tout en se complétant mais pas forcément, ils prennent la forme d’une comédie humaine très réussie. Le cinéaste nous plonge dans la vie sentimentale et sexuelle de ses différents protagonistes, évoquant de nouvelles manières d'imaginer ou d’assouvir ses désirs.
     
    Tout en parcourant la ville  qu’on observe des toits pour prendre de la hauteur, des fenêtres d’appartements, à vélo ou à pied, l’auteur bâtit sa trilogie Oslo Stories autour de questions de genre, de remises en cause qui taraudent ses protagonistes. Dans Sex deux ramoneurs vivent des expériences troublantes, perturbant des schémasbien  établis. Dans Dreams (Ours d’or au dernier Festival de Berlin), une adolescente de 17 ans, tombe follement amoureuse de sa professeure de français trentenaire. Enfin dans Love, une médecin urologue hétéro et son collègue infirmier gay, célibataires endurcis, imaginent la possibilité du couple en papotant sur un ferry..
     
    De petites vies à portée universelle
     
    Des histoires a priori banales. Mais L’idée est justement d’analyser la banalité et de livrer une œuvre à portée universelle à partir de petites vies, paradoxalement si singulières. Ainsi que les façons d’un ramoneur, d’une ado ou d’un soignant, de trouver leur place dans le monde et la société. Et le réalisateur de nous assurer que cette recherche mérite qu’on en témoigne, à travers des formes différentes.  Qu’il s’agisse de monologue, de voix off ou de longues conversations. Parfois trop longues, il est vrai. Une réserve mineure au demeurant, les bavardages se révélant le plus souvent fascinants, et d’une rare ouverture d’esprit,.

    Premier volet à sortir en Suisse romande, Sex. Deux ramoneurs amis se confient entre fantasmes, adultère, découverte de l’homosexualité et remise en question de l’identité masculine. Père de famille hétéro, marié depuis longtemps, l’un d’eux avoue avoir eu la veille une aventure totalement inattendue avec un client, après avoir nettoyé sa cheminée. Il l’a trouvée plutôt sympathique et enrichissante. 

    Mais si l’acte le hante, il assure ne pas vouloir recommencer. Il ne le considère pas comme le signe d’une homosexualité latente, ni comme une infidélité. Pour lui, tromper c’est cacher son écart. Il raconte donc la chose à sa femme qui, en revanche, la prend très mal (elle est même dévastée), puis à son ami. Egalement marié, il vient lui aussi de faire une révélation étonnante, sinon extravagante. Toutes les nuits, il rêve qu’il est une femme, draguée par David Bowie...On peut évidemment faire une lecture métaphorique de ce film où, sur fond de désir inconscient, Dan Johan Hangerud s’amuse à déconstruire les codes de la virilité. L’auteur se livre à un traitement subtil, délicat et sensible des rapports humains modernes. Il ne craint pas les discussions crues sur la sexualité, l’amour et ses conventions, mais évite tout voyeurisme ou démonstration vulgaire. Une touche norvégienne teintée d’humour, réaliste, émouvante, originale.
     
    "Sex" à l’affiche dans les salles de Suisse romande, dès mercredi 30 juillet. 
     

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