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Sorties de la Semaine

  • Grand écran: "Black Dog", amitié insolite entre un motard mutique et un lévrier famélique

    Chine 2008, quelques semaines avant l’ouverture des Jeux olympiques, dans une région déshéritée, sinon fantôme, aux portes du désert de Gobi. Sous prétexte de progrès sociaux, un  projet de rénovation urbaine condamnant à la démolition des immeubles lépreux a obligé des milliers d’habitants à quitter les lieux. En allant s’installer ailleurs, ils ont abandonné les rues à des hordes de chiens qu’il faut éliminer.

    Déboulant de partout, ils effrayent les gens restés là, les mordant parfois et font du tort au régime, craignant le chaos lors de la cérémonie d’ouverture. Ils provoquent même un accident de bus qui se renverse sur la route. Parmi les passagers, se trouve Lang (Eddy Peng) une ex-vedette locale de rock impliquée dans un meurtre et libérée après dix ans de prison.

    Une atmosphère singulière

    Mutique, le crâne rasé, Lang doit rejoindre une patrouille formée à la capture des toutous perturbateurs et finit par adopter un lévrier noir famélique. Il rechigne en effet à le mettre dans un chenil bien qu’on le dise atteint de la rage. Il s’en s’occupe avec amour, le soigne, le lave, lui donne à manger, allant jusqu’à fabriquer un side-car pour l’emmener faire des tours à moto. Avec cette rencontre entre deux créatures aussi solitaires et cabossées l’une que l’autre, mais qui vont reprendre goût à la vie grâce à cette amitié insolite, le réalisateur chinois Guan Hu propose un film simple, minimaliste, lauréat du Prix Un Certain Regard l’an passé à Cannes. 

    Emouvant, non dépourvu d’humour, il nous plonge dans une atmosphère singulière, envoûtante, entre chronique politique critique, étude sociale caustique, dénonciation de cruelles pratiques envers les animaux. Le tout sur fond de road movie dans un paysage lunaire, postapocalyptique, prétexte à de magnifiques images.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 2 avril.

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  • Grand écran: "Game Over: la chute de Credit Suisse", chronique choc d'une faillite annoncée

    Le 19 mars 2023, après une crise bancaire historique, Credit Suisse s’écroule. On parle de fait impensable, la banque étant considérée comme un symbole de stabilité et de sécurité. Mais à en juger par Game Over, la chute de Credit Suisse, signé du réalisateur Simon Helbling, l’inimaginable ressemble plutôt à chronique d’une catastrophe annoncée. D’autant plus que l’établissement, gagné par l’obésité, avait déjà frôlé l’effondrement en 2002. 

    Le film retrace les événements du point de vue des cadres impliqués en se basant sur les recherches d'Arthur Rutishauser, journaliste d'investigation et rédacteur en chef de la SonntagsZeitung. Remontant au scandale de Chiasso en 1977, où des spéculations avec de l’argent sale en provenance d’Italie avaient entraîné une perte de plusieurs milliards de francs, le documentaire raconte que les dirigeants ont pratiqué pendant des décennies une culture d'entreprise axée sur l’enrichissement personnel. 

    Occupés à se gaver

    Ils ont ainsi ignoré tous les signaux d’alerte jusqu’à l’inévitable, soit l’éclatement de la bulle et la reprise de l'établissement par UBS, lors d'une opération de sauvetage orchestrée au cours de la nuit par les autorités suisses. Un rachat présenté comme une solution d’urgence mais apparemment planifié depuis longtemps. 

    A coups d’enquêtes, de témoignages et d’analyses, dénonçant des infractions, des scandales et des jeux de pouvoir, Game Over démontre non seulement la façon dont cet empire financier a chuté, mais également le mal causé par la cupidité de sa direction. En toute impunité. L’exemple le plus marquant et le plus choquant est celui du Mozambique ruiné par un poignée de banquiers uniquement préoccupés à se gaver. Sans rien assumer par la suite.  

    Se déroulant à un rythme d’enfer, édifiant sur le fond en nous apprenant plein de choses, ce documentaire choc, accablant pêche toutefois sur la forme, dans la mesure où il nous saoule d’infos et surtout de chiffres auxquels le béotien de la finance ne comprend pas grand-chose. 

    Même si les deux événements sont très différents, Game Over fait penser à Grounding, le film de Michael Steiner évoquant les derniers jours de Swissair. Un autre traumatisme pour la Suisse, dont la compagnie nationale disparaissait le 31 mars 2002. Mais traité en fiction, l'opus était plus accessible, donc plus captivant.   

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi  26 mars.

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  • Grand écran: Dans "La Cache" Lionel Baier perce des secrets et brasse des passions

    Après La dérive des continents (au sud), Lionel  Baier nous ramène en Mai 68 avec La Cache, adapté très librement du  roman autobiographique de Christophe Boltanski, Prix Fémina 2015.  Alors que ses parents manifestent dans les rues d’un Paris en ébullition, Christophe, 9 ans, vit les événements de ce singulier printemps dans l’appartement labyrinthique de ses grands-parents (Michel Blanc et Dominique Reymond)  rue de Grenelle, entouré de ses oncles et de son arrière-grand-mère originaire d’Odessa (Liliane Rovère). l'existence de cette famille intergénérationnelle, excentrique, loufoque et bohème, tourne autour d’une mystérieuse cache. Elle va peu à peu révéler ses secrets, au sein de ce foyer fusionnel, confronté aux blessures et aux souvenirs enfouis du passé.  
     
    Avec cet ovni reliant deux mondes, fidèle à l’esprit et au ton du roman mais très différent dans sa narration, Lionel Baier mise sur la fantaisie en proposant une comédie douce-amère inventive, pleine de trouvailles visuelles. Pop, colorée, parsemée des slogans libertaires de ce Mai 68 si singulier, elle renvoie aussi à la BD. A la fois léger et profond, déconcertant et amusant, ce film atypique est porté par des comédiens qui séduisent par leur justesse. Aux côtés d’un excellent Michel Blanc en médecin angoissé, bouleversant jusque dans un dernier plan chaplinesque, on découvre une formidable Dominique Reymond, inflexible matriarche victime de la polio, ou encore l'impayable Liliane Rovère ,pour le moins  pittoresque en aïeule émigrée russe
     
    Joint par téléphone, Lionel Baier nous en dit plus sur ce film  qui avait été sélectionné en compétition au festival de Berlin. Une première pour un cinéaste malheureux de ne pas avoir pu partager cet honneur avec Michel Blanc, mais heureux de l’accueil qui lui a été réservé. «Non seulement une comédie en concours dans un grand festival, ce n’est pas fréquent, mais entendre rire Allemands et Français réunis dans la même salle face à ce sujet particulier, c’est émouvant.».
     
    -Comment avez-vous été amené à adapter ce roman de Christophe Boltanski?
     
    -On me l’a proposé quand il est sorti en 2015. En le lisant, j’ai été touché par la pudeur et la retenue de l’auteur face à ce qui lui est arrivé. En même temps, l’oeuvre m’apparaissait inadaptable dans la mesure où il s’agit d’une suite d’histoires qui se déroulent sur un siècle. La chose est donc restée en attente, jusqu’à ce que je trouve un angle. Ce furent les événements de Mai 68, qui ne représentent pourtant qu’une phrase dans le livre. Mais si l’adaptation est libre, je reste fidèle à la drôlerie et à la tendresse qui en émanent.
     
    Et Pourquoi ce contexte de Mai 68 ?
     
    -Parce que pour moi, cette période a fait resurgir les passions françaises. Vingt-trois ans après la guerre, l’inconscient remonte, les interrogations réapparaissent. Cela me permettait d’évoquer certaines thématiques. le rapport aux origines,  l’antisémitisme, le non-dit,  la construction de son identité. La génération de l’époque veut un inventaire, se pose la question du changement. Les homosexuels, ce que je suis, peuvent désormais dire qu’ils le sont. Mais ce n’est pas gagné. Il faudra repartir au combat.  Mai 68 résonne avec ce qui se déroule aujourd’hui, tout en faisant écho au passé.
     
    --En l’occurrence à la Shoah. Avec ce point de vue, vous pouvez l’évoquer en évitant le film historique.
     
     -C’était aussi plus simple pour moi de faire de l’humour en Mai 68 qu’en 1942. Je ne suis pas Lubitsch. Plus sérieusement Je ne me voyais pas du tout dans la reconstitution. Je suis très phobique de l’iconographie nazie. En même temps il ne s’agit pas d’un événement historique figé, mais d’un processus qui a commencé en 1933.  Rien n’est fini. On est marqué. Cela détermine notre comportement, infuse notre quotidien. Il suffit de considérer  le retour de la guerre, le terrorisme,  l'antisémitisme, le racisme, le règne validé de l’extrême-droite.
     
    -Parlez-nous de Michel Blanc, dont c’est le dernier film. Avez-vous immédiatement pensé à lui?
     
    -Assez vite, notamment en raison de l’inquiétude, de la peur congénitale qu’il dégage dans ses films,  C’est un homme aux abois, Il court après quelque chose. Il y avait donc une correspondance avec son rôle dans La Cache Mais c’est aussi quelqu’un de tendre, de sensible, d’élégant. Je me suis beaucoup inspiré de ce qu’ était Michel Blanc, pour filmer la relation entre l’acteur et son personnage, ainsi que la façon dont il va vers les autres. .
     
    - Et lui, a-t-il accepté tout de suite?
     
    - Oui. Je l’ai rencontré pendant deux heures en 2023. Il s’est mis au service du film. Il ne m’a  jamais demandé de changer des choses, ce qui ne l'empêchait pas de faire des suggestions. Le tournage a été très agréable. Il râlait tout le temps, mais ce n’était pas grave. En fait avec lui rien n’allait, mais dans le fond tout allait  bien .
     
    La Cache à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 26 mars.
     

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