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Sorties de la Semaine - Page 52

  • Grand écran: "Kung-Fu Zohra" dénonce les violences faites aux femmes

    Mabrouk el Mecri passionné de cinéma d’action, à qui l’on doit notamment JCVD, Sans issue ou Virgil, aborde les violences conjugales dans Kung-Fu Zohra,  premier long métrage français à évoquer cette discipline, qui va permettre à une femme d’échapper à l’emprise de son mari brutal. 

    Tout avait pourtant commencé par un vrai coup de foudre entre Zohra (Sabrina Ouazani) et le charismatique Omar (Ramzy Bedia), lors d'une rencontre au bled pendant les vacances. Tous les deux sont férus de films d'’arts martiaux. Ils se marient et rentrent  en France. Là hélas, Omar ne tarde pas à montrer son vrai visage. Et lorsqu’il perd son job, il boit et commence à prendre Zohra pour un punching ball. Elle songe à partir, mais elle est enceinte. 

    Six ans plus tard, persuadée qu’un divorce briserait le cœur de sa fille qui adore son père, Zohra craint de quitter Omar. Il en profite lâchement pour se défouler sur elle à grand renfort de torgnoles, les soirs de cuite de plus en plus nombreux. C’est alors que Zohra fait la connaissance d’un vieux gardien de nuit chinois, par ailleurs maître de kung-fu. Il lui apprendra à se défendre et surtout à rendre les coups au centuple. 

    Improbable affrontement salvateur

    Au départ, on se dit que réalisateur a trouvé un moyen original de dénoncer les intolérables violences faites aux  femmes. Sauf qu’il ne traite pas vraiment son sujet dans cette fable paresseuse côté scénario. On a du mal à y croire et, par conséquent à se passionner, entre deux râclées, pour les longues et sempiternelles séances d’entrainement de Zohra, qui constituent plus ou moins l’essentiel du métrage. Préfigurant l’interminable, salvateur mais improbable affrontement final façon Guerre des Roses ou Karaté Kid, censé rendre hommage aux classiques du genre. 

    Restent les comédiens. Connue pour ses rôles dans les comédies de Franck Gastambide, la déterminée Sabrina Ouazani (photo) a suivi une formation intense et relève le défi physique, tout en montrant de l’émotion. De son côté, dans un rôle à contre-emploi, Ramzy Bedia, enfile avec conviction le costume  du très vilain tyran domestique. 

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 9 mars.

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  • Grand écran: " Goliath", thriller environnemental prenant et engagé, avec le trio Lellouch-Bercot-Niney

    Frédéric Tellier, captivant auteur de  L’affaire SK1 (2014), racontant la traque du tueur en série Guy Georges dans les années 90, revient avec Goliath, un thriller sur le danger des pesticides.  

    France, professeur de sport le jour, manutentionnaire la nuit, milite contre ce fléau, après le cancer de son mari contaminé par le glyphosate. On découvre par ailleurs Patrick, obscur et solitaire avocat parisien. Méprisé par ses confrères il est spécialiste du droit environnemental. Quant à Mathias, brillant lobbyiste, il défend les intérêts d’un géant de l’agrochimie. Après le suicide d’une jeune femme,  leurs destins s’entremêlent sans que les protagonistes se croisent,  jusqu’à un procès retentissant, opposant santé publique et intérêts économiques.  

    Alors que le thème est loin d’être nouveau (Soleil vert, Erin Brokovich, Dark Waters, et tout récemment Rouge) , Frédéric Tellier propose un film prenant, sincère, engagé, contrebalançant un côté un peucaricatural, virant parfois au pathos. En bon conteur d’histoires, il se montre efficace en évoquant la réalité, précis dans les dialogues, convaincant dans l’exposition des faits, manoeuvres obscènes de l’entreprise, entretiens confidentiels, arcanes du pouvoir, immobilisme des politiques et de la justice. Il sait multiplier les points de vue sans donner de leçons,  

    Goliath doit par ailleurs beaucoup à ses comédiens,  Gilles Lellouche, Pierre Niney et Emmanuelle Bercot qui se livrent à fond dans cette œuvre, lui donnant de la chair et de l'émotion.  Il est intéressant de relever qu’à  l’origine, les rôles étaient inversés. Bercot était l’avocate, Niney l’activiste et Lellouche le lobbyiste.  

    Ce dernier ne voulant pas rejouer, comme dans Ma part du gâteau, l’individu ignoble et âpre au gain, il a préféré enfiler la robe de l’avocat rustre et cabossé par la vie. Niney, courageux pompier de Sauver ou périr, incarne cette fois le lobbyiste arrogant, ordure immorale, prête à tout sous son look de gendre idéal. Quant à Bercot, elle donne toute son énergie au personnage de l’activiste. Pour compléter ce trio, Frédéric Tellier a fait appel à Laurent Stocker, Chloé Stefani, Jacques Perrin, Marie Gillain et Yannick Renier. Joli casting, même si certains ne font que des apparitions..

    Une vaste enquête de plus de cinq ans

    Rencontré récemment à Genève, Frédéric Tellier nous raconte la genèse de Goliath. Alors qu’il écrivait L’affaire SK1, il a lu un article de presse parlant notamment des ravages des pesticides. «Cela m’a choqué. J’en ai parlé à mon producteur qui m’a encouragé à creuser le sujet. Pendant plus de cinq ans, j’ai mené l’enquête, vu des victimes, des avocats, des journalistes, des associations, dans le but de dominer la matière.» 

    Le thriller environnemental contribue-t-il à faire évoluer les mentalités?

    Personnellement, j’adore le genre. Au-delà du film d’utilité publique, le cinéma peut éveiller les consciences. A chaque fois c’est une piqûre de rappel. Cela met à jour des questions de façon artistique. Et je trouve que la fiction nous saisit davantage que le documentaire. J’avais envie de partir de la parole pour aboutir à l’action. Même désespérée. 

    Il y a un aspect manichéen  dans le face à face entre le gentil avocat et le méchant lobbyiste

    Je ne trouve pas. C’est mon ressenti. J’estime ne pas avoir caricaturé mes personnages. Pierre Niney a rajouté du charme  au sien. Au début, quand il parle, on a envie de le croire. Notamment dans ses explications sur le lithium et le diesel. Alors qu’il a évidemment tort.

    Ce rôle de lobbyiste furieusement antipathique est à contre-emploi pour un comédien aussi populaire.

    En effet. Lellouche et lui se sont répartis les rôles dans mon dos. Mais finalement c’était une bonne idée de les échanger. Tous les deux sont d’énormes bosseurs. Par exemple Gilles s’est enfermé pendant deux semaines pour préparer son phrasé.

    Ce film vous a-t-il changé?

    En m’engageant de la sorte, c’était inévitable. Il a totalement modifié mon existence ma perception des choses et des gens. Mais je ne suis pas devenu un spécialiste. Je milite à ma façon quand je peux. Je reste un cinéaste, je poursuis cette idée d’un monde plus juste, plus humain, au centre poétique du terme. Pour remettre l’épanouissement, la tolérance au centre.

    Et Frédéric Tellier aura l’occasion de le faire dans son prochain long métrage où il se penchera sur  la vie de l’abbé Pierre.

    Goliath, à l’affiche dans les salles de Suisse romande dés mercredi 10 mars.  

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  • Grand écran: Dans "La Mif", plongée au coeur d'un foyer d'urgence, on parle avec ses tripes!

    Au cœur d'un foyer d’urgence,  des adolescentes issues de familles brisées tentent de recoller les morceaux pour en retrouver une. Dans cette structure habituée aux tensions, la relation entre une fille de 16 ans  sexuellement majeure et un jeune garçon de 14 ans, donc mineur, met le feu aux poudres. Véritable déflagration, elle révèle un système rétrograde et sclérosé.   

    Nous plongeant d’entrée dans le bain avec une scène intense qui va se répéter tout au long du film, mais vue sous différents angles, Fred Baillif propose une impressionnante fiction du réel.  Jamais dans le pathos ou le jugement, proche tout en gardant la bonne distance,  il offre un  brillant témoignage sur  les structures d’accueil, une réflexion sur le métier d’éducateur,  un questionnement sur le droit des ados à la sexualité,  sur la limite entre la nécessité de les protéger et de les aider à avoir confiance en eux.   

    Le long métrage se construit en chapitres, avec des portraits forts, pudiques, émouvants  des  pensionnaires  et du personnel d’encadrement. Les filles, toutes actrices non professionnelles, parlent avec leurs tripes. Elles livrent de formidables interprétations. A commencer par celle, bouleversante d’humanité, de Lora  (Claudia Grob) la directrice du foyer. La vocation chevillée au corps, elle se retrouve pourtant dans le collimateur de l’administration, accusée de manquements graves à sa fonction.

    «La Mif»  a obtenu le prix du meilleur film de la catégorie Generation 14plus à la Berlinale de 2021, s’est baladé avec succès dans d’autres festivals dont celui de Zurich, est nominé six fois aux Quartz du cinéma suisse. Une reconnaissance amplement méritée. Educateur dans un foyer lorsqu’il était étudiant et plus tard en milieu carcéral, Baillif sait de quoi il parle.

    Le réalisateur a trouvé son style

    "J’ai fait énormément de recherches.  Les affaires  sexuelles taboues dans la société le sont encore davantage en institution. Ce que je raconte n’est pas la réalité mais pourrait l’être.  Je pose également la question du ghetto qui me passionne. Les raisons pour lesquelles des jeunes se retrouvent en foyer ne se résument pas à la délinquance. On les place dans des lieux  qui vont être stigmatisants".

    Fred Baillif est par ailleurs très fier des filles qui ont participé au développement de leur rôle respectif qui, tient-il à préciser, n'est pas leur vie bien qu'elles soient elles-mêmes issues de foyers. "J’ai mené pendant deux ans des interviews très approfondis pour mieux les connaître, créé des ateliers d’improvisation, procédé à des jeux de rôles. Je leur ai appris à ne pas jouer la comédie." 

    "Il y a une maturité dans ma démarche consistant à marier le réél et la fiction. Je me suis remis en cause. Ce prix berlinois qui me rend heureux, m'a donné confiance dans le style que j'ai choisi et que je pense avoir véritablement trouvé".

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 2 mars

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