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le blog d'Edmée - Page 53

  • Le festival Arte Mare de Bastia couronne Io Capitano, de Matteo Garrone. Emouvant écho au drame des migrants

    Pour sa 41e édition, Arte Mare s’est déroulé pendant neuf jours à Bastia sur le thème du road-movie. Traçant donc sa route,  le plus ancien festival de Corse, qui ne cesse de tisser des liens avec les cultures  de ses voisins,  proposait quelque 80 films tous genres et métrages confondus.  

    Au cœur de ce riche programme, la Compétition Méditerranéenne, avec huit œuvres en lice pour le Grand Prix, qui a été décerné  à Io Capitano de l’Italien Matteo Garrone. Soulignant plus particulièrement leur courage et leur héroïsme, le réalisateur raconte l’émouvant voyage de Seydou et Moussa, deux ados partis de Dakar pour l’Italie à l’insu de leurs parents, avec des rêves plein la tête. Le film, qui fait écho au drame des migrants, a obtenu deux autres prix, dont celui du  jury jeune 

    On aurait souhaité voir Chroniques de Téhéran d’Ali Asgari et Aliresa Khatami au palmarès. Evidemment tourné sans autorisation,  l’opus évoque, à travers neuf personnages, la  vie compliquée des habitants. Ils se heurtent à l’administration, l’autorité et l’ordre pour tenter de régler de menus faits du quotidien, tels que déclarer la naissance d’un enfant, retirer son permis de conduire  ou retrouver son chien... 

    Compétition corse relevée

    De nombreuses autres récompenses ont été décernées dans les différentes catégories, notamment au sein de la Compétition corse. On retiendra plus spécialement celle attribuée à l’excellent court métrage, Un animal, de Kevin Lameta. Son auteur suit Jean-Baptiste, qui accompagne régulièrement son père à la chasse mais répugne à tuer les animaux. Pour ses 16 ans, il reçoit un fusil et va devoir faire ses preuves. Une œuvre forte, prenante, brassant plusieurs thèmes. 

    Au chapitre documentaire, c’est Marie-Jeanne Tomasi qui l’emporte avec  E pericoloso esporsi ( Il est dangereux de s'exposer) Au cours de la manifestation  des femmes à Rome le 8 mars 1972,  Mariasilvia Spolato, professeur de mathématiques et militante LGBT, se tient dans la rue avec une pancarte: liberazione omosessuale. Un mois après, Simone de Beauvoir vient donner une interview dans la capitale italienne et la pancarte illustrera l’article. La jeune femme ne pourra désormais plus enseigner. 

    On vote de notre côté une mention spéciale à Lavinie Boffy qui a décroché un prix ex-aequo pour I Was le cri.  La réalisatrice évoque la découverte du collectif I Was Corsica, à travers des manifestations, dénonçant les crimes sexuels sur l’île et l’absence de protection des victimes. Son documentaire édifiant et poignant donne la parole aux fondatrices du mouvement. 

    Entre invités, littérature et gastronomie

    Pas de festival sans invités. A commencer par Tony Gatlif, cinéaste des gens du voyage, à l’honneur avec la projection de trois de ses films, Jean-Pierre Darroussin venu présenter Le théorème de Marguerite, de sa femme Anna Novion,  Jean-Pierre Améris débarqué avec Marie-Line et son juge, ou encore Alexandre Arcady, dont Le petit blond de la Casbah, visait le Grand Prix. 

    Mais Arte Mare ne s’arrête pas au septième art, se plaisant à naviguer entre musique, expositions, rencontres et littérature. En témoigne le Prix Ulysse remis à Miquel de Palol, grand et prolifique écrivain catalan, dont le roman en trois volumes le plus connu à l’étranger est Le jardin des sept crépuscules 

    Et on n’oubliera pas bien sûr, dans ce rendez-vous des plus convivial, la gastronomie, grâce aux savoureux menus accompagnés de vins tout aussi délicieux, et concoctés chaque soir par des chefs de toutes les régions de l’île. 

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  • Festival: pendant dix jours Everybody's Perfect célèbre le cinéma queer à Genève

    Unique en Suisse romande Il a vu le jour en 2010 et fête cette année son dixième anniversaire. Dès aujourd'hui 6 octobre et pendant dix jours , Everybody’s Perfect vibre au rythme de la culture LGBTIQ+  Basé sur l’ouverture et l’inclusion, s’adressant à tous les publics, il a évolué au fil des ans, passant à une cadence annuelle depuis que Sylvie Cachin en a pris les commandes en 2018.

    La directrice artistique a vu augmenter la fréquentation, le financement, la reconnaissance des partenaires, les rapports,  la collaboration avec les distributeurs et les autres festivals en Europe et aux Etats-Unis. Elle note également un changement de ton et de contenu.

    "Au début, beaucoup de films mettaient le doigt sur la souffrance, la lutte, les droits humains. Ou sur la difficulté du coming out, dont ils ne parlent plus aujourd’hui. Je tente  de sélectionner des œuvres avec une énergie positive. J’en vois l’effet sur les gens qui se sentent plus concernés, plus valorisés. Le festival offre également une visibilité plus grande de la  communauté, dont  découle une forme de banalisation du queer en général. Cela donne de la force aux artistes locaux".

    Des films des cinq continents

    Petit bémol. En mai dernier à Cannes, la représentation moindre des thématiques LGBTQI+ dans les diverses sections par rapport à 2022,  a laissé craindre une baisse de la production dans le domaine, faute de soutien suffisant. Pour Sylvie Cachin,  qui a invité le créateur de la Queer Palm Franck Finance-Madureira et le programmateur du Teddy Award berlinois Bartholomew Sammut à en débattre, il n’y a certes pas eu de hausse spectaculaire. « Mais l’offre ne s’est pas réduite. Elle est devenue plus qualitative,  impliquant davantage de personnes désireuses de raconter leur histoire. En tout cas, je n’ai pas eu de peine à trouver des films ».

    C’est ce que veut prouver la programmation éclectique de cette édition 2023  avec 28 longs métrages divisés en quatre parties, mêlant fictions de tous genres et documentaires. Ils proviennent de Chine,. Russie, Australie, Afrique Etats-Unis, Philippines, Brésil, Argentine, France Espagne, Allemagne, Angleterre, Suisse. Sans oublier le nombre impressionnant 36 courts métrages, dont le curieux western de Pedro Almodovar Strange Way Of Life..

    Trois oeuvres au chapitre Trans Joy

    Au sein de ce riche menu., on retiendra plus particulièrement un chapitre intitulé « Trans Joy » composé de trois oeuvres où les cinéastes s’emparent de leur vécu. A commencer par Orlando, ma biographie politique de Paul B. Preciado, projeté en ouverture .du festival.  Pour son premier passage derrière la caméra, l’auteur  s’inspire du roman de Virginia Woolf. Publié en 1928, il évoque les aventures d’un noble anglais. Né garçon, il se réveille un beau matin femme au milieu du récit. Près d’un siècle plus tard, Preciado envoie une lettre à la célèbre écrivaine, pour lui apprendre qu’Orlando est devenu une réalité. Et livre un  témoignage poétique, drôle, inventif, montrant toutes les possibilités d’exister dans un univers contemporain en mutation.

    Kokomo City nous invite, lui, à découvrir le monde et le quotidien de travailleuses du sexe, très vulnérables, les femmes trans noires.  Premier documentaire en noir et blanc de D Smith, elle-même trans afro-américaine, il navigue sans misérabilisme, entre  les témoignages bouleversants et les propos percutants de quatre protagonistes. De New York à Atlanta, elles se confient  sans fausse pudeur et à visage découvert en dépit des dangers encourus.  A l’image de leurs clients, souvent des hommes cisgenres , mariés, qui expliquent avec franchise leur attirance pour les femmes trans.

    De son côté, le réalisateur trans serbo-chilien Vulk-Lungulov-Klotz propose Mutt. Comédie dramatique prometteuse et émouvante, elle suit Fena, ado latino-américain en pleine transition né Fernanda.  En l’espace de 24 heures à New York,  il va croiser son ex-amoureux hétéro , sa demi-sœur de 13 ans, son père chilien, et tenter de faire la paix avec  son passé et son présent. Tout en montrant les difficultés du personnage face aux aléas du quotidien, Mutt explore ses relations avec son entourage au fil d’un scénario bien documenté..

    De Blue Jean à Little Richard

    Parmi les points forts de la sélection, Blue Jean  (photo ci-dessus) de Georgia Oakley. Militant, sous haute tension, le film nous plonge dans la Grande-Bretagne de Margaret Thatcher avec le portrait de Jean, professeure d’éducation physique. Nous sommes en 1988, l’année où le gouvernement de la Dame de fer promulgue une loi interdisant la promotion de l’homosexualité dans le système éducatif, accusé de prôner l’acceptation de la différence. Des manifestations s’étendent dans le pays alors que Jean cache son homosexualité de peur d’être découverte et renvoyée.

    Ambiance électrique garantie par ailleurs en clôture avec Little Richard : I Am Everything,, le documentaire musical de l’Américaine Lisa Cortés. Icône rock qui a inspiré les plus grands de Presley aux Beatles, Little Richard est effectivement tout : noir, gay, chrétien  et outé très tôt.

    On discute et on s’amuse

    A découvrir enfin des œuvres importantes sur l’intersexuation, longtemps considérée comme une anomalie  à soigner par une médecine souhaitant normer les individu-e-s  ou représentée tel un  mythe par les arts et la littérature. La question donnera lieu à une table ronde, ainsi que Le cinéma queer sous les projecteurs. Le public aura  également droit à des rencontres suivant les projections. Elle se dérouleront en présentiel,  ou en visioconférence à l’image de la  masterclass de Manuela Kay, pionnière et figure incontournable  de la scène queer berlinoise depuis  les années 1980.,

    Et bien sûr, pas de festival sans fiesta. En ouverture, à La Gravière,  en clôture à La Paillette. Entre deux, des verrées,  la Fête lesbienne, queer, féministe et l’envahissement des Bains de l’Est,  avec jacuzzi, sauna, tapas, DJ et performances.

    Genève, du 6 au 15 octobre, Maison des arts du Grütli. Pour plus de renseignemants : everybodysperfect.ch.

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  • Grand écran: "Le procès Goldman", fascinant portrait d'un militant d'extrême-gauche, écrivain et gangster

    En novembre 1975, débute le deuxième procès de Pierre Goldman. Militant d’extrême-gauche, écrivain et gangster, le demi-frère ainé de Jean-Jacques Goldman avait été condamné .en première instance à la réclusion criminelle à perpétuité pour quatre braquages à main armée- Dont un ayant  entraîné la mort, en décembre 1969, de deux pharmaciennes.  S’il reconnaît les trois premiers hold-up, il clame, sinon hurle, son innocence dans ce dernier.

    Le jeune Georges Kiejman assure sa défense. Mais très vite, la relation entre ces deux juifs polonais nés en France vire à l’aigre, Goldman, qui se vit comme un martyr, rejette Kiejman en le traitant de « juif de salon », avide de gloire.  Personnage insaisissable, provocateur, redoutable dialecticien, ce fils de héros juifs de la résistance est bruyamment soutenu au tribunal par la gauche intellectuelle, dont il est devenu l’icône. Simone Signoret en tête. Il risque pourtant la peine capitale. Mais son avocat s’obstine. Finalement acquitté de ces meurtres au bénéfice du doute, Goldman sera condamné à douze ans pour les braquages. Libéré au bout de six ans, il sera assassiné en 1979 à Paris. Les auteurs n’’ont jamais été retrouvés.

    Porté par d’excellents acteurs

    Le réalisateur Cédric Kahn fait de cette affaire aussi complexe que controversée un film puissant, prenant, qui vous emporte. Et où, faute de preuves indiscutables, il privilégie un véritable match de langage pour tenter de découvrir la vérité. L’œuvre, qui met le spectateur dans la peau du juré, est portée par d’excellents acteurs. A commencer par Arieh Worthalter qui se glisse magistralement dans la peau de Pierre Goldman, tandis  qu'Arthur Harari incarne le futur célèbre Kiejman, mort le 9 mai dernier. 

    Ils apparaissent particulièrement réalistes, à l'image du déroulement de ce procès à huis-clos (on ne quitte pratiquement jamais la salle d'audience) , remarquablement filmé et mis en scène.  Le réalisateur brasse par ailleurs plusieurs thèmes dans ce long métrage reconstitué avec les articles de journaux de l’époque : judaïté, antisémitisme, racisme, côté antiflic, rôle de l’extrême-gauche, autant de sujets qui font écho à la société d’aujourd’hui. Comme dit Cédric Kahn, la France ne bouge pas....

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 4 octobre. 

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