Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

le blog d'Edmée - Page 54

  • Grand écran: "Je verrai toujours vos visages" nous apprend comment mettre des mots sur les maux. Passionnant

    La justice restaurative, vous connaissez? Pas vraiment. C'est normal, elle est méconnue. Complémentaire au traitement pénal d’une infraction, promue en Suisse par l'Association AJURES et dans la loi en France depuis 2014, elle consiste à mettre face à face des victimes et des auteurs d’une infraction (qu’il s’agisse des parties concernées par la même affaire ou non) et de les faire dialoguer.  Pour les agressés il s’agit de chercher l’apaisement, de trouver les moyens de se réparer, de se reconstruire et pour les agresseurs de prendre pleinement conscience de leurs actes, de leur répercussion et éviter de récidiver. Les discussions sont encadrées par des animateurs et médiateurs professionnels ou bénévoles. 

    Basée sur le volontariat, n'entraînant pas de remise de peine, cette pratique a inspiré Jeanne Herry, auteure des excellents Pupille et Elle l’adore. Elle en a fait le sujet de son dernier film Je verrai toujours vos visages. Réunissant un casting cinq étoiles, la réalisatrice propose deux cas de figure dans une mise en scène au cordeau.  

    Décor austère, reflet exact de la réalité, pour le premier. Il se passe en prison dans un cercle de parole composé de trois hommes condamnés pour vols avec violence (Dali Benssalah, Birane Ba, Fred Testot) et trois personnages interprétées par Gilles Lellouche, Leïla Bekhti et Miou- Miou (la mère de Jeanne Herry), victimes du même style de crimes. Ils ne se connaissent pas et vont échanger en présence de deux personnes (Jean-Pierre Darroussin, Suliane Brahim), formées donc pour les accueillir, comme cité plus haut,. 

    Parallèlement et en-dehors, on découvre Chloé (Adèle Exarchopoulos), violée par son grand frère pendant son  enfance. Apprenant qu’il est sorti de prison  et vit dans la même ville, elle craque et demande l’aide d’une médiatrice  (Elodie Bouchez) avant de le revoir. Ces deux dramaturgies avec des pics différents où les comédiens se donnent à fond dans des confrontations sous haute tension,  révélateurs par ailleurs du fonctionnement de cette justice, donnent une œuvre passionnante et prenante, loin du dossier ou de la thèse.  

    Trois formations pour la réalisatrice

    Jeanne Herry s’impose brillamment avec ses dialogues et son cadre serré. Elle nous en parle plus longuement à l’occasion d’une rencontre, nous éclairant tout d’abord sur le titre Je verrai toujours vos visages. «ll y a deux versants, l’un un peu traumatique dans la mesure où la victime est marquée à vie par celui de l’agresseur et l’autre côté réparateur, suite à ceux découverts lors de rencontres qui peuvent changer la vie». 

    Ce film a exigé une grosse documentation. Voire une formation.

    En effet. Pendant quatre mois je me suis entretenue avec des animateurs et des médiateurs et après deux mois, j’ai rencontré des victimes et des auteurs. J’ai également suivi trois formations. 

    C’est donc la parole comme remède, comme pansement sur les plaies. Un procédé par lequel les mots atténuent les maux en quelque sorte.

    Effectivement. C’est libérateur. Les victimes peuvent dire leur souffrance être entendues par les criminels, tandis que ces derniers prennent plus largement conscience de leur acte, se mettent aussi à évoquer leur parcours. Chaque victime y a droit, mais ce n’est malheureusemeas assez proposé. Alors que ça marche bien. 

    L’idée est avant tout de s’écouter, ce qui  se fait de moins en moins.

    C’est vrai, il, existe un manque flagrant en politique à l’Assemble nationale, sur les réseaux. On privilégie le clash et l’affrontement, l’insulte. 

    Un mot sur les médiateurs et médiatrices et l’importance de leur présence.

    Le principal est de garder une bonne distance, de laisser la place aux protagonistes, anticiper, comprendre, ne pas intervenir, se mettre en retrait. Le gros du travail est de préparer en amont ceux qui prennent la parole. Les gens vont animer leur propre débat. Mais tout cela s’apprend en formation. 

    « Je verrai toujours vos visages », à l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 5 avril.  

     

    Lien permanent Catégories : Sorties de la Semaine 0 commentaire 0 commentaire
  • Grand écran: "Mon chat et moi, la grande aventure de Rroû" raconte l'amitié, la séparation, la liberte. Joli et émouvant

    Vif et curieux, Rroû est un irrésistible chaton aux yeux verts, dont la vie commence sur les toits de Paris, puis dans un appartement, lorsqu’il est adopté par la téméraire Clémence, dix ans. Pour ces deux-là, qui vont grandir ensemble, tout est prétexte à jouer, à découvrir, à apprendre. 

    Plus particulièrement lorsque Clémence emmène Rroû dans sa maison de campagne au cœur des montagnes vosgiennes. Ils se retrouvent à gambader et s'amuser comme des fous dans une nature à la fois fascinante et angoissante, rencontrent Madeleine (Corine Masiero) une femme sévère, solitaire,, un rien inquiétante elle aussi. La fillette l’appelle la sorcière.

    Le chat et sa petite maîtresse (excellente Capucine Sainson-Fabresse) vivent une incroyable aventure, jusqu’au jour où Rroû s’enfuit et redevient sauvage. Mais la liberté a un prix. Le félin va devoir affronter la dureté, les dangers d’un univers inconnu et la difficulté d’y survivre. De son côté, Clémence est ravagée par cette séparation. Elle surmontera son chagrin grâce à Madeleine qui, en dépit de son sale caractère, a évidemment un coeur d'or et connaît les bêtes mieux que personne.  
      
    Jolie et émouvante comédie familiale, Mon chat et moi, la grande aventure de Rroû, signé Guillaume Maidatchevsky est inspiré d’un livre de Maurice Genevoix. Tout en retraçant cette amitié, le cinéaste filme à hauteur de chat et nous montre le monde à travers son regard. Il a paraît-il fallu la patience de six coaches animaliers pour y parvenir.  
     
    Guillaume Maidatchevsky nous en dit plus à l’occasion d’une rencontre. Eternel insatisfait, ce biologiste de formation ne se trouvait pas assez bon. «Je rêvais de partir à l’aventure au bout du monde. J’ai fait des études de journaliste scientifique et réalisé tourné quelques documentaires pour France télévision avant de tourner Ailo : une odyssée en Laponie. En fait,  je suis un littéraire refoulé. Je n’avais jamais écrit une carte postale avant de commencer par de petits textes. Et j’ai alors compris que la main était un muscle qu’il fallait travailler et je me suis mis au scénario». 
     
    J’imagine que vous aimez beaucoup les chats.
     
    Pas vraiment. Je préfère les chiens.... D’ailleurs je prépare l’adaptation d’un conte de Didier Van Cauwelaert sur un labrador, guide d’aveugle qui se retrouve au chômage. Mon chat et moi, c’était une commande du producteur dont c’était le livre de de chevet. 

    Cela vous a demandé beaucoup de travail.

    En tout deux ans et demi. Ce récit n’est pas évident à lire et à transposer aujourd’hui. J’ai parfois dû regarder dans le dictionnaire pour comprendre certains mots. J’ai surtout gardé la nature, la campagne, le côté proche de l’animal. 

    Vous ajoutez votre patte, si j’ose dire, à ce récit d’apprentissage et d’émancipation. 

    En effet. J’ai apporté ma vision de ce que cela signifie de grandir avec un chat. En quelques mois, il devient adulte. Il faut accepter la différence. C’est aussi un message de respect et de liberté. 
     
    Vous avez changé le personnage féminin.
     
    C’est vrai. Il s’agissait à la base d’une servante. Du coup, on a fait un casting de 2000 fillettes pour. Capucine a compris immédiatement l’essence du film. Elle est hypersensible comme moi. C’était la seule avec laquelle je me sentais vraiment bien

    Vous évoquez la séparation d’avec le chat, mais également le divorce des parents. Pourquoi l'avez-vous jugé utile?

    Parce que ça m’est arrivé.

    «Mon chat et moi», la grande aventure de Rroû, à l’affiche depuis mercredi 5 avril dans les salles de Suisse romande.

    Lien permanent Catégories : Sorties de la Semaine 0 commentaire 0 commentaire
  • Grand écran: "Joyland", un appel à vivre librement sa sexualité au Pakistan. Coloré et audacieux

    Dans ce premier long métrage, qui s’est vu décerner en mai dernier à Cannes le prix du jury de la section Un certain regard ainsi que la Queer Palm, le Pakistanais Saim Sadiq nous emmène à Lahore, dans une famille conservatrice, stricte et respectueuse des traditions. Plusieurs générations cohabitent sous le même toit, dont le cadet Haider et sa femme. 

    Sans boulot, fauché, frustré, ne jouissant d’aucune intimité, le jeune homme se sent coincé au milieu de cette smala sous emprise patriarcale toxique, où il se cherche désespérément. Il a constamment son père sur le dos, qui lui reproche de ne pas s’acquitter des tâches masculines, qu’il s’agisse de tuer une chèvre, d’empêcher sa femme de travailler, ou de lui donner un petit-fils. Et le somme de trouver un travail pour contribuer à subvenir aux besoins des siens.

    Mais Haider aimerait tant mener son existence comme il l’entend. Un jour, il déniche un job dans un cabaret érotique et tombe fou amoureux de Biba, une flamboyante performeuse trans aux dents longues et au caractère de cochon qui décide de l’engager dans sa troupe. Voilà qui ne simplifie pas franchement son quotidien sous le joug paternel...

    Bien que les transgenres restent au ban de la société, la mise en vedette de Biba n’est pas seulement une occasion, pour Saim Sadiq, de défendre leurs droits en nous embarquant dans une romance interdite, mais aussi un moyen de discuter de thématiques qui le passionnent.

    Nombreux sujets abordés

    Avec Joyland, qui est aussi le nom d’un parc d’attractions à Lahore, le cinéaste évoque la façon de s’épanouir et appelle à vivre librement sa sexualité dans un milieu fermé à des orientations différentes. Issu de la classe moyenne, Saim Sadiq s’est inspiré de sa propre famille et d’un théâtre près de chez lui, où il a découvert un monde moins tabou qu’il l’imaginait. C’est ce qui l’a poussé à interroger le concept de désir «qu’on passe notre vie à essayer de cacher, dit-il», de masculinité, de féminité, à questionner sa place au sein d'une société à laquelle il appartient, qui l’a en même temps façonné et lésé. 

    Surfant sur une histoire d’amour impossible, le réalisateur aborde ainsi courageusement de nombreux sujets, de la famille à la politique,  en passant par le sexe, le patriarcat, la religion Il propose ainsi une chronique en forme de radioscopie critique d’un paya à la fois ultra conformiste et en voie de mutation.  

    Première pakistanaise en sélection officielle sur la Croisette, Joyland avait alors  fait sensation et emporté l’adhésion d’une majorité de la critique, qualifiant l’opus d’extrêmement fort et bouleversant. Bien qu’on l’estime tenir davantage de l’audace, de la curiosité et de la découverte que de l’incontestable réussite cinématographique, on n’en retiendra pas moins aussi son côté attachant, coloré, joyeux, chorégraphique. Et la qualité de l’interprétation.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 5 mars. 

    Lien permanent Catégories : Sorties de la Semaine 0 commentaire 0 commentaire