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le blog d'Edmée - Page 158

  • Grand écran: Anthony Hopkins et Jonathan Pryce s'affrontent avec passion dans "Les deux papes"

    the-two-popes-photo-anthony-hopkins-jonathan-pryce-1096044-large.jpgEn principe, un pape meurt à la tâche. Il ne démissionne pas. A moins qu’il ne soit déposé, déporté, poussé ou contraint, comme neuf d’entre eux au cours des siècles, le dernier étant Grégoire XII en 1415. C’est pourquoi l’abdication de Benoit XVI, le 12 février 2013, a provoqué la stupeur générale.

    Ouvrant une nouvelle page de l'histoire de l'Eglise catholique, cette renonciation et l’élection un mois plus tard de l’archevêque de Buenos Aires Jorge Bergoglio, servent de base à une nouvelle production Netflix, Les deux papes.

    Inspirée de faits réels, l’œuvre est signée du Brésilien Fernando Meirelles, sur un scénario du dramaturge néo-zélandais Anthony McCarten. Elle réunit Anthony Hopkins dans le rôle de Benoît et Jonathan Pryce dans celui de François, sur fond de scandales pédophiles et de corruption. Rapidement évacués, il faut le dire.

    Le film se concentre surtout sur la relation entre Joseph Ratzinger et Jorge Bergoglio. En 2012, ce dernier atteint par la limite d’âge avait demandé à Benoît XVI, qui le fait patienter, l’autorisation de se retirer. Il se rend ensuite à Rome où les deux hommes entament d'intenses conversations dans la résidence d'été du souverain pontife et la chapelle Sixtine. 

    L’intrigue se fonde sur leur opposition de style. On découvre l’érudition, la méditation et le doute chez le conservateur Allemand, la volonté de réformer et de prendre des risques chez le progressiste Argentin.

    Le film rappelle aussi que Joseph Ratzinger et Jorge Bergoglio ont connu chacun un passé dramatique, un éventuel engagement (démenti) au sein des jeunesses hitlériennes pour le premier et un rôle contesté lors de la dictature militaire argentine pour le second évoqué, lui en revanche, par des flashbacks en noir et blanc.

    L’opus dont on retiendra la finesse des dialogues, mais qui ne brille pas par sa mise en scène et auquel on reprochera sa longueur, vaut surtout par la remarquable prestation des deux protagonistes qui se livrent corps et âme lors de leurs rencontres.

    A côté d’Anthony Hopkins, Benoît cérébral tout en retenue, sinon coincé, mais d'une amabilité inattendue et se laissant aller à ses talents de pianiste, Jonathan Pryce campe un François physiquement plus vrai que nature, charismatique, plein d’humour, simple et modeste. Manifestant de surcroît un goût immodéré pour le tango et le football, passion qui donnera lieu à une scène jubilatoire.

    A l’affiche à Genève au Cinérama Empire dès mercredi 4 décembre à raison de deux séances par jour,  "Les deux papes" sera diffusé sur Netflix à partir du 20 décembre.

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  • Grand écran: Guédiguian se mue en lanceur d'alerte dans "Gloria Mundi". Avec Ariane Ascaride sacrée à Venise. Interview

    1567605677695.jpgAprès La Villa, Robert Guédiguian revient avec Gloria Mundi, émouvante chronique où il se penche sur une société en perdition. Le film ouvre pourtant sur un jour heureux. Une famille recomposée se retrouve à la maternité pour fêter la naissance de Gloria, la fille de Mathilda (Anaïs Demoustier) et de Nicolas (Robinson Stévenin).

    Parallèlement on voit Daniel (Gérard Meylan), le père de Mathilda, sortir d’un long séjour en prison. Son ex-femme Sylvie (Ariane Ascaride), exploitée dans une société de nettoyage industriel et Richard (Jean-Pierre Darroussin), son second mari conducteur de bus, l’invitent à revenir à Marseille et à rencontrer sa petite-fille.

    Mais le bonheur, illusoire, va bientôt céder la place à la noirceur, à la violence, à la colère, au désespoir, à la trahison. Le jeune couple n’arrive pas à nouer les deux bouts. Nicolas qui pense s’en sortir comme chauffeur Uber s‘enfonce dans les dettes, tandis que Mathilda, vendeuse à l’essai se morfond sans oser broncher dans cet emploi précaire. Elle envie sa demi-sœur Aurore (Lola Neymark) et son compagnon Bruno (Grégoire Leprince-Ringuet) qui s’enrichissent sans états d’âme sur le dos des plus pauvres.

    Dans un Marseille gris et glacé à la modernité architecturale mondialisée, le toujours militant mais désabusé Robert Guédiguian brosse le portrait implacable d’une jeunesse aux abois, produit d’un monde impitoyable. Il lui oppose la génération précédente, assistant impuissante à la perte de ses idéaux, solidarité, fraternité, fidélité, dans un univers déshumanisé qui court à sa perte.

    5c21d9759a99b895fbd02ec460621428_L.jpgIl est symbolisé par cette famille modeste au destin tragique. Ce mélodrame en forme de constat social dur, amer et déprimant, où on peut reprocher au réalisateur de grossir le trait et de trop accabler les jeunes, a valu à Ariane Ascaride le prix de la meilleure interprétation féminine à la dernière Mostra de Venise.

    Elle est parfaite dans le rôle de Sylvie qui se tue à la tâche pour subvenir aux besoins des siens. Et on n’oubliera pas, aux côtés des impeccables Demoustier, Darroussin, Stévenin, Leprince-Ringuet, Lola Neymark, le lumineux et poétique Gérard Meylan, réfugié dans une chambre miteuse où il écrit des haïkus, et qui se sacrifiera pour aider cette tribu qui se déchire, victime du marasme ambiant.

    Gloria Mundi est probablement le film le plus noir et le plus pessimiste de Robert Guédiguian. Ariane Ascaride, rencontrée récemment à Genève n’en disconvient pas, tout en nuançant le propos. «C’est vrai. Il est très sombre. Mais en même temps Robert regarde les gens avec beaucoup d’amour et d’humanité. Il veut encore croire qu’on peut faire bouger les choses. C’est un cri d’alarme destiné aux politiques pour leur dire qu’on ne peut pas continuer comme ça. Il faut se préoccuper de ceux qui souffrent d’exclusion. A Paris, à Marseille et dans d’autres grandes villes, les cités, par exemple, forment un monde à part. Le fossé s’est considérablement creusé avec leurs habitants. Il faut aujourd’hui passer par l’école, la santé pour espérer que cela change».

    On est tenté de dire qu'il s'agit presque d'un film "gilet jaune".

    Robert l’écrit un an avant la crise. Quand on commence à tourner, c’est le début des manifestations. Pour moi un artiste anticipe toujours les choses. Je ne sais pas s’il parle des gilets jaunes, mais ce dont je suis sûre c’est qu’il évoque tous ceux qu’on ignore, qui s’épuisent pour des salaires de misère et ne savent pas comment ils vont finir le mois.

    Parlez-nous de votre rôle de femme de ménage.

    C’est la louve de Rome qui veut protéger ses enfants. Une combattante dans la survie. Et cela fait longtemps que ça dure. Il faut absolument s’en sortir. Elle ne veut pas que sa fille se retrouve dans la même situation quelle auparavant.

    On est surpris que vous ne vous mettiez pas en grève comme les autres employés.

    C’est en effet la première fois que je joue un personnage qui refuse de faire grève. Si c’était le cas, Sylvie ne  pourrait pas sauver sa famille. Cela suffit à raconter l’état d’anxiété des gens avec ce tissu social complètement distendu, où il n’y a plus de proposition politique, où la gauche en a pris un sacré coup.

    Vous avez neuf minutes pour faire une chambre. Quand vous frottez, on sent que ce n’est pas du flanc.

    Je viens d’une famille populaire, je sais très bien frotter. Et ce n’est pas nouveau. Vous n’imaginez pas le nombre de films où j’ai dû passer l’aspirateur. Pour résumer, j’ai rarement été une princesse au cinéma. 

    gloria_mundi_photo_12-ex-nihilo-2019-1600x865.jpgVous êtes entourée de Gérard Meylan (à droite), votre ex-mari dans le film et le second Jean-Pierre Darroussin. Il y a un petit parfum de Marie-Jo et ses deux amours.

    J’y ai évidemment aussi pensé. Mais pour être juste, on est très souvent tous les trois, Robert ayant utilisé toutes les situations possibles et imaginables en me faisant jouer avec ces deux hommes.

    Vous avez été sacrée meilleure actrice à Venise. Une surprise ?

    Oui je l’avoue. Pourquoi moi ? C’est un film choral. Sincèrement, je pense que le prix d’interprétation aurait dû être masculin et aller à Gérard Meylan. Evidemment j’étais très contente. Mais c’est un métier difficile. Et après un prix il faut tenir. On change de statut.

    Vous aviez pourtant déjà eu un César. Et apparemment vous avez bien supporté le choc.

    C’est vrai. Mais je l’ai eu à 40 ans. Heureusement d’ailleurs. De toute façon, à 20 ans, je ne correspondais pas aux actrices de mon âge. Après avoir été un handicap, mon physique particulier s’est révélé un avantage. Je reste un peu à côté, mais je suis incontournable.

    Dans le fond c’était une chance pour vous d’avoir un mari cinéaste.

    Je vous signale que lui aussi avait de la chance de m’avoir! On a chacun amené quelqu'un. Au départ c’était une petite entreprise à quatre. Et cela fait 36 ans que ça dure.

    A part deux films, vous jouez dans tous les Guédiguian. Vingt plus précisément. Mais vous collaborez avec d’autres réalisateurs. Comment cela se passe-t-il?

    Très bien. J’adore travailler avec d’autres cinéastes. La seule chose que je ne supporterais pas c’est le conflit. On me prend comme je suis ou on ne me prend pas. C’est très clair.

    "Gloria Mundi" à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 4 décembre.

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  • Grand écran: "And Then We Danced", émancipation sexuelle entre rivalité et désir irrésistible

    And-Then-We-Danced.jpgA priori la danse folklorique géorgienne et la discipline de fer qu’impose un maître intransigeant à l’un de ses meilleurs adeptes ne sont pas de nature à provoquer un fol enthousiasme. C’est compter sans le talent de Levan Atkin, réalisateur suédois d’origine géorgienne, qui nous touche et nous séduit avec son troisième long métrage, And Then We Danced, récit d’une émancipation sexuelle sur fond de culture et de politique dans un Etat orthodoxe peu favorable à la liberté des mœurs.  

    Depuis qu’il sait marcher, Merab (l’excellent et lumineux comédien-danseur Levan Gelbakhiani) s’est formé avec rigueur à la pratique traditionnelle des sauts, kartuli, kandjlouri et autres khevsourouli. Avec une fougue qui ne trompe pas sur la volonté farouche de ce garçon mince et musclé au physique androgyne d’atteindre les sommets, en réalisant son rêve d’intégrer le prestigieux Ballet National.

    Humilié par son professeur

    On le découvre en studio où, avec Mary son amie de toujours, il recommence  inlassablement ses pas et ses mouvements, tendant à leur apporter un peu de renouveau entre fluidité et rigidité. Mais ce n’est pas gagné, son entraîneur ne cessant de l’humilier, lui assénant qu’il est trop mou, aboyant, sans qu’il ose le contredire, qu’il n’y a pas de faiblesse dans la danse géorgienne. Elle requiert une hyper masculinité s’opposant à la candeur virginale des filles, lui répète-t-il.

    C’est alors que débarque le charismatique et magnétique Irakli (Baschi Valishvili) à la boucle d’oreille. Mais si ce garçon décomplexé face au prof se pose en grand rival, il devient aussi le plus cher désir de Merab, qui finit par l’emporter sur la compétition. Cette forte attirance se manifeste lors d’un de ces week-ends alcoolisés, où Merab et ses amis cherchent à s’évader d’un quotidien dominé par la promiscuité familiale, le manque lancinant d’argent et la  perspective désespérante d’un avenir bouché.  

    Si l’éveil sexuel de ce personnage aussi attachant que désarmant, commence avec Irakli, il ne se prolongera pas avec lui, l’intéressé disparaissant un jour sans prévenir. L’important n’est toutefois pas seulement une romance gay contrariée, par ailleurs dénoncée comme contre-nature, mais le parcours intérieur de Merab, la découverte de son identité, la manière dont le cinéaste filme les corps, captant l’érotisme masculin en mêlant sensualité, intensité, délicatesse et tendresse.

    And Then We Danced, qui représentera la Suède aux Oscars, est le premier film LGBT en Géorgie, tourné à Tbilissi, la capitale. On rappellera que même si une loi a été promulguée pour protéger les minorités sexuelles, leur situation reste précaire dans le pays, comme l’évoque l’œuvre. Sélectionné à la dernière Quinzaine des réalisateurs à Cannes, Levan Atkin avait d’ailleurs rendu hommage aux personnes attaquées dans ce qui devait être la première Gay Pride en 2013.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 4 décembre.

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