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le blog d'Edmée - Page 6

  • Grand écran: entre obscurité et lumière, "Berlin, été 42" sublime des héros ordinaires

    1942. C’est l’été. Alors que la guerre fait rage, ce que l'on ne verra pas, la Berlinoise Hilde Coppi (Liv Lisa Fries), 33 ans, rencontre Hans (Johannes Hegemann) de sept ans son cadet, et tombe follement amoureuse de lui. Avec leurs amis communistes , ils s’engagent dans un combat contre les nazis en intégrant l’Orchestre rouge, célèbre réseau soutenu par l’URSS.  

    Toutefois, ils ne réalisent pas pleinement le danger et les terribles conséquences que représente leur lutte clandestine. Hilde est enceinte. Mais bientôt, elle et Hans finissent par être arrêtés par la Gestapo, jetés en prison et  exécutés pour trahison et espionnage,  tout comme dix autres membres du groupe. 

    L'ombre froide de la prison et le chaud soleil de l'été

    Andreas Dresen raconte ainsi les derniers jours du couple, tout en se concentrant plus particulièrement sur Hilde, figure connue dans son pays.. L’intrigue débute en septembre 1942 avec l’arrestation de la jeune femme et se termine onze mois plus tard, le 5 août 1943, par sa décapitation. Son exécution  a été reportée pour qu’elle puisse allaiter son bébé, Hans Coppi Jr. Aujoud’hui âgé de 81 ans, il livrera une information  qui  nous brise le cœur… 

    Bouleversant, dépouillé, profond, humaniste, le récit oscille entre la noirceur et la lumière. Il alterne en effet avec la rude détention de Hilde dans une sombre prison sordide et des flashbacks évoquant les heureux souvenirs solaires de ce fameux été où les deux amoureux, (photo)  tout à leur bonheur et à leur exaltation, prêts à mourir pour leur idéal, commencent leurs actions subversives. 

    De remarquables interprètes 

    S’affranchissant de l’iconographie nazie, on verra un seul Heil Hitler, qui fait un flop de surcroît, mettant la  guerre à l’écart, on n‘entendra  pas un seul coup de feu, Andreas Dresen livre un film au visuel presque contemporain. Il est dominé par l’humain, représenté par des héros ordinaires et quotidiens, manifestant leurs préoccupations, leurs joies, leurs souffrances, leurs peurs. Mais qui se découvrent une force insoupçonnée. L'oeuvre est également traversée par l’importance donnée aux résistantes allemandes .

    Ce long métrage doit aussi sa réussite à ses remarquables interprètes. A commencer par la principale, Liv Lisa Fries, saisissante de naturel et de vérité. Très attachant lui aussi, Johannes Hegemann s’élève à sa hauteur. Excellent directeur, Andreas Dresen soigne pareillement ses personnages secondaires. Il le montre notamment dans l’évolution de celui, intéressant,  de Lia Wagner,  redoutable gardienne de prison, qui commence à s’adoucir un peu au contact de Hilde et de son bébé.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 30 avril. 

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  • Grand écran: "Oxana", portrait engagé d'une Femen, activiste radicale et artiste tourmentée. Avec Albina Korzh, magistrale

    Après Slalom en 2021 évoquant la relation abusive entre un coach de ski et sa protégée, Charlène Favier s’est penchée sur la vie de l’Ukrainienne Oksana Chatchko, co-fondatrice dans son pays, en 2008, des Femen, avec Sacha Shevchenko et Anna Hutsol. La réalisatrice française propose, avec Oxana; un bouleversant récit d’émancipation féminie,  en souvenir de cette jeune artiste et activiste qui s’est suicidée en 2018, à 31 ans.  

    Elle en a dix de moins lorsqu’elle se lance, avec ses amies, dans une série de happenings audacieux pour dénoncer le gouvernement corrompu, de l’époque,  la prostitution institutionnalisée  dans son pays, les élections truquées en Russie… Intrépides, le poing levé, couronne de fleurs dans les cheveux, les militantes s’exhibent seins nus, slogans politiques peints sur la poitrine et le corps. Un corps surutilisé qu’elles brandissent dès lors comme une arme. 

    Des militantes mondialisées mais aussi  emprisonnées, et torturées

    Les images de ces actions coups de poing font le tour du monde, le mouvement s’internationnalise et ses membres deviennent des symboles de la lutte contre l’oppression. Ce qui leur vaudra aussi d’être brutalement arrêtées, emprisonnées, torturées. A l’image d’Oksana, qui passionne surtout Charlène Favier. Elle brosse un portrait poignant, tragique, de cette guerrière rebelle et anarchiste, activiste radicale à la personnalité complexe et tourmentée.  
     
    Magistralement  incarnée par Albina Korzh

    Elle se dévoile aussi en fille d’ouvriers orthodoxes, peintre talentueuse d’icônes religieuses, image elle-même de la résistance au patriarcat, qui obtiendra le statut de réfugiée politique en France. Elle est formidablement incarnée par la jeune Ukrainienne Albina Korzh, littéralement habitée par son personnage dans cette œuvre féministe captivante, qui nous en apprend autant sur le collectif que sur ses téméraires adeptes

    Construit en flashbacks, le film raconte la dernière journée d’Oksana, le 23 juillet 2018, avec un retour sur les événements précédents qui convergent vers cette date funeste.  Une structure repensée pour laisser plus de place à la fiction, comme nous explique Charlène Favier, lors d’une rencontre à Genève. Elle nous apprend aussi pourquoi Oksana est devenue Oxana. «Parce que c’est la mienne et que ses amis avaient l’habitude de l’appeler Ox… » 

    Comment l’idée de ce film  vous est apparue?

    J’étais à la recherche d’une héroïne inspirante, plus grande que moi. Un peu par hasard, on me parle d’Oksana, me demandant si je savais qu’elle était une des Femen et qu’elle avait fait les Beaux-Arts à Paris. Mais j’ignorais jusqu’à son existence. Dès lors, en apprenant qu’elle était artiste, j’ai eu envie de me plonger dans son histoire pour essayer d’en savoir plus sur elle. Dès que je l’ai approchée, elle m’a comme possédée. Je devais faire ce film.
     
    Qu’est-ce qui vous a tellement attirée chez elle ?
     
    Sa force, sa fragilité, sa pureté, son ambivalence. Elle était brave, libre, incandescente, mystique, sextrémiste. Une combattante investie d’une mission avec une soif d’absolu. Un personnage hyper romanesque à la Jeanne d’Arc. Elle disait aussi "l'art c'est la révolution". Ça m’a beaucoup parlé. Je me suis reconnue en elle. Attention, je n’ai pas son courage et je ne me prends pas pour Jeanne d’Arc. Mais je suis marginale, un peu à part, obsessionnelle. Tous mes films sont militants. J’ai envie de faire bouger les lignes à traves le cinéma.  
     
    J’imagine que ce ne fut pas simple de trouver une comédienne à la hauteur.

    C’était en effet ma préoccupation majeure, d’autant que je la voulais absolument ukrainienne. Le processus fut long. On était en 2021. J’ai commencé à écrire. La directrice de casting nous lance sur des pistes. Je voulais aller en Ukraine, mais je n’ai pas pu. En même temps il n’était pas question de lâcher l’affaire. J’ai vu 300 filles en zoom. Mais il y avait la guerre et les sessions étaient parfois interrompues par les coupures d’électricité ou des alertes de missiles. J’ai cru que je n’y arriverais jamais. Finalement, c’est dans ce contexte qu’Albina s‘est imposée. Elle m’a bouleversée.  Ce jour-là, on a aussi trouvé les interprètes pour Sacha et Anna .Elles sont toutes venues à Paris après un voyage de vingt-cinq heures en bus. Elles étaient prêtes à tout pour raconter cette histoire. On a travaillé avec la caméra. En voyant Albina, le chef op a pleuré et j’ai su qu'elle était Oksana. 
     
    Vous avez aussi fait énormément de recherches pour vous familiariser avec les Femen 

    Pour raconter Oksana, je devais raconter la naissance des Femen en alors que l’Ukraine était sous la botte du KGB. Et je dois dire qu’’à leur arrivée en France en 2012, je suis passée complètement à côté, comme beaucoup de gens. Faire de son corps un objet politique. S’en servir comme arme au service d’un message, on a eu du mal à comprendre cela chez nous. On les percevait comme des filles sexy, racoleuses, provocantes, et non comme des combattantes. Il était important pour moi de montrer leur exceptionnel engagement. Du coup, j ’ai lu et vu beaucoup de choses, notamment le documentaire du réalisateur suisse Alain Margot Je suis Femen  réalisé en 2014. J’ai travaillé le sujet comme une enquête journalistique, en rencontrant ses intimes, sa mère. Et je me suis fait mon propre avis, même si tout est réel. 
     
    A cet égard, vous évoquez naturellement la trahison, le dévoiement des Femen  avec le débarquement d’Inna Chevtchenko, qui a pris la tête du mouvement, provoquant l’éviction brutale d’Oksana et de Sacha.
     
    Les choses se sont en effet compliquées à ce moment pour des êtres fragilisés par des années de manifestations et de violence. Ina était très ambitieuse, manifestant une volonté farouche de s’en sortir. Notamment en squattant les plateaux télé. Pour Oksana et Sacha, montrer ses seins était une performance artistique et politique. Pour Inna, d’ailleurs réticente à exhiber sa poitrine au début, cela devient un outil médiatique. Dénaturant ainsi  le message originel des Femen. Cela dit, tout en racontant le souffrance d’Oksana, dépossédée de son mouvement,  je comprends le besoin vital d’Inna d’y arriver, avec une manière totalement différente de voir le monde.

    Aujourd’hui, le collectif a singulièrement perdu de sa gloire.  Inna règne toujours sur les Femen, encore actives dans huit pays, mais ne faisant plus que des apparitions sporadiques. Comme celle du 8 mars denier à Paris, où elles ont milité contre l’avancée des extrêmes. 

    "Oxana", à l'affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 30 avril.

     

     

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  • Grand écran: "Les indomptés" évoque des amours queer face aux interdits, dans l'Amérique des ffties

    Plongée dans l’Amérique des fifties avec Daniel Minahan, auteur d’épisodes de séries cultes comme The  L World, Six Feet Under, The Newsroom  ou encore Game Of Thrones. S’inspirant du roman à succès On Swift Horses (Les indomptésde Shannon Pufahl paru en 2019, le réalisateur se penche sur la communauté queer, dont les membres mènent, face aux interdits stricts de l’époque,. une existence secrète dans la crainte de dénonciations et poursuites allant jusqu'à l'emprisonnement.  

    Dans cette fresque romantique et historique, Daniel Minahan suit en alternance le parcours et les liaisons entrecroisés de ses différents personnages. Jeunes mariés, Muriel (Daisy  Edgar-Jones) et Lee (Will Poulter) s’apprêtent à quitter leur Kansas natal rustique pour une nouvelle vie plus brillante en Californie. C’est alors que débarque Julius (Jacob Elordi) le frère de Lee, flambeur charismatique à la beauté fatale, démobilisé de la guerre de Corée en raison de son homosexualité. "Il n'est pas comme nous", dit d'ailleurs Lee à Muriel, sans se douter de la suite des événements 

    Relations clandestines

    Mais alors qu'on voit le triangle amoureux se former, Julius invité à suivre le couple décide de le quitter pour Las Vegas, où il rencontre Henry (Diego Calva), un jeune immigré mexicain avec qui il entame une bouillante relation clandestine. Tout en se livrant à des ébats torrides, ils montent une dangereuse arnaque au casino. De son côté Muriel, perturbée et en quête d’indépendance après le départ de Julius, se découvre une passion pour les paris hippiques et libère ses pulsions dans les bras de son audacieuse voisine Sandra (Sasha Celle).

    Avec Les indomptés, drame existentiel sensuel et sexuel, Daniel Minahan explore, sur fond de rêve américain,  les tabous, la culpabilité, les tentations refoulées, les désirs inavoués mais assouvis dans un farouche besoin de liberté, d’identité, d’émancipation féminine. Son univers rappelle celui des inoubliables Carol de Todd Haynes ou Brokeback Montain d’Ang Lee, mais se révèle moins bouleversant et vibrant. Principalement en raison d’une structure éclatée, Muriel et Julius vivant une romance platonique à travers leurss rapports avec un partenaire du même sexe. 

    Photographie et reconstitution soignées

    Le film ne manque cependant pas d’atouts, séduisant par sa belle photographie, sa reconstitution soignée des années 1950, et surtout par la prestation de ses protagonistes. Ils sont tous excellents, à commencer par Daisy Edgar-Jones (Muriel), actrice britannique qui s’est fait connaître grâce à la série Normal People. Elle est magnifique d’intensité, de sensibilité et d’émotion contenues, dans son aspiration à un rôle plus exaltant que celui d'épouse aimante au foyer. 

    On en dira autant de l’Australien Jacob Elordi, notamment vu en Elvis dans le mélancolique Priscilla de Sofia Coppola. Nettement plus convaincant que dans son incarnation assez plate du King, il apparaît aussi fascinant que follement sexy en joueur accro au risque et hanté par ses démons. Etoile montante, il pourrait bien faire de l’ombre à l’incontournable Timothée Chalamet, avec son look à la James Dean, dont il avoue être super fan. 

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 30 avril.

     

    A l’affche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 30 avril.

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