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le blog d'Edmée - Page 212

  • Grand écran: "Un peuple et son roi", quête bancale de la liberté par une France insoumise

    2987281.jpg-r_1280_720-f_jpg-q_x-xxyxx.jpgAprès L’exercice de l’Etat, Pierre Schoeller poursuit son exploration des hautes sphères du pouvoir. Cette fois, il retourne dans le passé avec Un peuple et son roi, dans les trois premières années de la Révolution française. Une ambitieuse fresque politique où se croisent les destins de gens du peuple et des figures historiques dans la toute jeune Assemblée nationale.

    Reconstruisant la révolution, sa naissance, son développement avec ses grandeurs et ses bassesses infâmes, l’œuvre commence le Jeudi saint 1789 avec la cérémonie, à Versailles, du lavement des pieds des enfants pauvres par le roi, et se termine par sa décapitation le 21 janvier 1793.

    Entre ces deux scènes se succèdent la prise de la Bastille, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la marche des femmes sur Versailles, la signature par le roi des décrets d’abolition des privilèges après avoir quitté le célèbre château pour Paris, la fuite manquée à Varennes, le discours de Saint Just sur le procès du monarque, celui de Robespierre, respectivement en novembre et décembre 1792.

    Frénésie bouillonnante d’une nation qui bâtit une nouvelle société. Le sujet est aussi passionnant, ample, dense, retentissant, que difficile à traiter. D’autant que Pierre Schoeller veut lui ajouter un côté épique et romanesque. Malheureusement le réalisateur, courant trop de lièvres à la fois, n’est pas à la hauteur de ses aspirations.

    XVMcb842f44-874d-11e8-b8b4-8c07df39ac28.jpgEn dépit d’un immense travail de recherche, d'interventions des députés et de débats à l’Assemblée parfaitement documentés, de beaux éclairages, du rôle décisif donné aux femmes, omniprésentes et faisant pour la première fois entendre leur voix, le film est une quête bancale et souvent confuse de la liberté par une France insoumise. En cause notamment un montage chaotique de trente-six tableaux trop courts, une reconstitution et une figuration revues à la baisse faute d’un budget suffisant.

    Une autre limite se situe dans la représentation d’un peuple idéal, fier, aseptisé, faisant bloc, d’une unité sans faille, d’une droiture et d’une solidarité à toute épreuve. On regrette également le manque d’incarnation des personnages. En cause un casting cinq étoiles qui se révèle être davantage un handicap qu’un atout.

    Autour d’Olivier Gourmet, verrier de son état (prétexte à une métaphore entre fusion, flammes et explosion), et de Noémie Lvosky sa compagne dans le film, Pierre Schoeller a en effet réuni Adèle Haenel, lavandière se rêvant citoyenne, Céline Sallette, vendeuse de harengs, Izia Higelin, victime expiatoire, Gaspard Ulliel, voleur de poules gracié, Laurent Laifitte, Louis XVI grognon Louis Garrel, Robespierre impitoyable, Nils Schneider, Saint-Just réclamant la mort du roi, Denis Lavant, scandaleux Marat déchaîné.

    Propres sur eux, les manants exhibent de surcroît d'improbables dents blanches, une belle peau et des ongles soignés. Et comme il faut que chacun ait une partition plus ou moins égale dans cet opus choral, l’ensemble a un côté théâtral qui sonne souvent faux. Peut-être en sera-t-il autrement dans une éventuelle deuxième partie intitulée Un monde nouveau.

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 26 septembre.

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  • Grand écran: "Les dames", une planète vivace de sexagénaires (ou plus) décidées à avancer

    p1chd5mr07vk81ak35ifsih1bo14.jpgAprès La petite chambre avec Michel Bouquet sorti il y a huit ans, Stéphanie Chuat et Véronique Reymond se penchent aujourd’hui sur la réalité de femmes qui, à l’aube de la retraite , ont perdu leur compagnon après de longues années de mariage. Confrontées à leur solitude, à leur sentiment croissant d’invisibilité, elles portent, dans Les dames, un regard sur leur vie passée et cherchent à réinventer leur quotidien.

    Pour nourrir leur documentaire, les réalisatrices avaient lancé un "appel à dames" dans les médias et ont reçu une centaine de réponses. "Sexagénaires, septuagénaires, elles avaient un désir de parole, une envie d'être vues et entendues". 

    Cinq d'entre elles, Marion, Odile, Pierrette, Noelle et Carmen ont été retenues. En pénétrant dans leur intimité, on découvre des personnalités originales, singulières, de la mélomane à la féministe en passant par la romantique ou la battante. Rigolote, émouvante, volontaire, sentimentale, chacune a son vécu, une façon personnelle d’appréhender l’existence, de tromper la solitude, de croire encore à l’amour.

    En donnant une voix à leurs protagonistes les deux cinéastes abordent la vraie vie et, pour rendre le récit cohérent s’ingénient, grâce à un excellent montage, à tisser des liens entre les trajectoires de leurs héroïnes. Avec des passages fluides de l’une à l’autre lorsque les sujets se recoupent.

    La planète dames de Stéphanie Chuat et Véronique Reymond se révèle guillerette et vivace, dans la mesure où elles ont délibérément choisi des personnes décidées à avancer. Si elles osent se dévoiler, raconter leurs blessures, leurs secrets, leurs désirs, leurs envies, elles le font avec une retenue mêlée d’humour et d’autodérision. Privilégiant l’espoir et l’optimisme, évitant des êtres pouvant dégager de la tristesse, de l’angoisse, du désespoir, les deux auteures, plongeant certes dans la réalité, ne nous en donnent toutefois qu’une image fragmentaire.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 26 septembre.

     

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  • Grand écran: "Chris The Swiss", passionnante enquête entre animation et documentaire

    4c6d2cbf33c3734955816c9f1b484bf9_XL.jpgPetite, Anja Kofmel admirait son ténébreux cousin Chris, correspondant de guerre. Sa mort mystérieuse en Croatie, en janvier 1992, d’abord imputée à une balle, puis à un étranglement suite à deux autopsies, l’occupe encore aujourd’hui, Car au moment de son décès, le journaliste suisse de 27 ans portait un l’uniforme d’un groupe international de mercenaires. Pourquoi ?

    Devenue adulte, Anja décide de suivre son histoire. Et, avec Chris The Swiss, nous emmène à Zagreb, pour saisir la véritable implication du jeune homme dans un conflit manipulé par divers intérêts inavoués. Qui était-il vraiment? Un reporter infiltré, un aventurier fasciné par le danger, un individu ambigu engagé dans une milice pro-croate d’extrême droite ayant perpétré d’affreux crimes ?

    Une passionnante enquête

    Mêlant documentaire, images d'archives et dessins animés en noir et blanc d’une beauté sépulcrale touchant au cauchemar sublime, la réalisatrice se livre à une enquête passionnante doublée d’une réflexion sur les abominations de la guerre. Elle construit un film particulièrement original, personnel, d'une portée universelle.

    En partant d'un deuil familial, elle élargit son propos au drame d'un conflit civil. Un voyage initiatique au cours duquel, équipée des carnets de son cousin rapatriés avec son corps, elle tente à la fois de percer les secrets de Christian Würtemberg et de reconstituer le quotidien dangereux des journalistes plongés dans un véritable bourbier. Donnant ainsi un éclairage inédit sur un profond traumatisme européen.

    Pour quelles raisons avez-vous choisi un style hybride? L’animation est si prenante qu’on aurait souhaité les voir constituer l’œuvre entière.

    J’aurais également bien voulu. Je viens de l’animation. Depuis que je suis enfant, je dessine. Tout le temps. C’est mon mode d’expression naturel. Mais ce n’était pas possible. D’une part pour une question d’argent et d’autre part, si l’animation peut beaucoup, elle ne peut pas tout quand on en vient aux dialogues, aux sentiments des personnes placées dans une certaine situation..

    Quand avez-vous décidé de consacrer un film au parcours de votre cousin?

    A peu près à l’âge où il est mort. Un peu plus tard. «J’ai commencé à comparer sa vie et la mienne. Nos réalités étaient si éloignées. J’étais intéressée, mais plus du tout admirative. Il a fait des choses très moches, tabous. Toutefois, en lisant son journal, je me suis rendu compte qu’il ne se voyait pas comme un mercenaire mais comme un journaliste. Pourtant il portait un uniforme et une arme.

    A votre avis, pourquoi s’était-il engagé?

    Ma théorie, c’est qu’il, s’est perdu lui-même à un certain moment, Il a notamment écrit ceci. "Je veux entendre, sentir, comprendre, survivre". Cela m’a beaucoup émue. Il ne savait plus comment s’en sortir. Pouvait-il redevenir à une vie normale ?

    Pour autant, votre but n’est pas de le réhabiliter.

    Pas du tout. Ses actes sont condamnables. Mais, sans l'excuser, peut-être lui ai-je donné une voix. Pour moi c’était très important de comprendre. Je me demande aussi pourquoi on n’arrive pas à se sortir de ces guerres, pourquoi on n’apprend jamais de l’histoire. Je sais que c’est naïf, mais je n’accepte pas cette fatalité de l’éternel recommencement. Même si je me sens impuissante

    La complexité de votre sujet vous a sans doute obligée à d’innombrables recherches.

    En effet. Ce fut un long processus. Je me suis énormément documentée, j’ai beaucoup lu et je me suis entourée de deux historiens, un Croate et un Suisse qui m’ont donné des conseils pour prouver que ce que je dis est vrai. Même dans l’animation, je parle de personnes qui existent et je dois être crédible. C’est le cas, selon des journalistes, des avocats, des soldats alors en guerre et qui me l’ont confirmé quand j’ai présenté le film à Sarajevo. C’est ma plus grande fierté.

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 19 septembre.

     

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