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le blog d'Edmée - Page 210

  • Grand écran: "The Guilty", thriller mental minimaliste en forme d'expérience immersive

    maxresdefault.jpgMuté au standard du 112 suite à une faute professionnelle, quitté par sa femme et en attente de son procès, un policier, Asger, passe désormais son temps à répondre à divers appels d’urgence. Alors qu’il va terminer son travail, il prend encore celui, inquiétant, d’une femme apparemment kidnappée par son ex et dont les deux enfants sont restés seuls à la maison.
     
    Mais avant qu’il ait l’occasion d’en savoir plus, la ligne est coupée. Pour la retrouver, il ne peut pas compter sur grand-chose, sinon son intuition, son imagination et surtout, son téléphone. Il n’aura dès lors de cesse que de rétablir la communication.
     
    Reposant entièrement sur le hors-champ, The Guilty est le premier long métrage du cinéaste danois Gustav Möller. Il a choisi un procédé astreignant pour un huis-clos se limitant à deux bureaux, où son protagoniste est majoritairement filmé en plans fixes. A l’image du spectateur, il est réduit au rôle d’auditeur d’un fait divers tragique qui demeure invisible, dont on ne perçoit la violence qu’à travers la bande-son.
     
    En effet, après avoir reçu l’angoissant appel, le flic ébranlé par la courte conversation qu’il vient d’avoir, ne quitte plus son poste. Assez peu sympathique au départ, il se mue en humaniste, s’’attachant à cette femme, l'écoutant, la conseillant, tentant de repérer l’endroit où l’emmène le kidnappeur. 
     
    L’intrigue qui se déroule en temps réel, est une expérience immersive, où le spectateur construit lui-même le film puisqu’il ne fait qu’entendre ce qui se passe au lieu de le voir. Du coup ce sont les sons, les voix, les dialogues qui créent les images dans sa tête.
     
    Excellente interprétation de Jakob Cedergren

    Ce thriller psychologique, mental, minimaliste, épuré, sans musique ni effet de caméra, où le cinéaste se fait un plaisir de jouer avec nos nerfs, de nous abuser et de nous retourner avec un rebondissement machiavélique, doit beaucoup à son interprète Jakob Cedergren.
     
    Nerveux, tourmenté, avide de bien faire, dépassant ses compétences, outrepassant la hiérarchie, Asger cherche par tous les moyens à résoudre un drame qui lui permettrait éventuellement  de se racheter de la bavure commise. Quitte à se tromper et à aggraver une situation qu’il ne comprend forcément pas.
     
    On regrettera pourtant, dans cette traque à distance efficace frisant l’exercice de style, quelques incohérence,  invraisemblances, voire un certain pathos. Et à la longue, on n’en peut plus d’entendre le téléphone sonner…
     
    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 10 octobre.

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  • Grand écran: dans "Girl", Lara, née garçon, est prête à tout pour devenir ballerine. Une perle rare

    girldhont.jpgCaméra d’or et Queer Palm au dernier Festival de Cannes, Girl avait fait chavirer la Croisette en nous laissant découvrir la ravissante timide, solaire et gracile Lara. Les yeux bleus, le teint translucide, l’adolescente de 15 ans a un rêve, devenir ballerine.

    Avec le soutien d’un père formidable qui l’aime, la comprend et la protège, elle est prête à tout pour le réaliser. Travaillant comme une forcenée, pieds en sang, dos douloureux, jambes raides, elle souffre plus encore que ses camarades, pour se plier à cette discipline de fer qu’est la danse classique.

    Car Lara est un garçon transgenre qui suit un traitement hormonal. Pour elle, une danseuse est l’incarnation de la féminité. Mais avant que la transition s’opère, elle doit dompter, soumettre ce corps qui se dérobe, cacher ce sexe qu’elle ne peut, qu’elle ne veut plus voir, le comprimant sous des pansements adhésifs qui lui brûlent douloureusement le ventre.

    Girl aurait pu sombrer dans le voyeurisme et le sensationnalisme. C’est le contraire dans ce récit choc qui vous emporte dès l’ouverture en vous touchant au cœur. Le Flamand Lukas Dhont, 27 ans, propose une première œuvre rare, sensible, subtile. Un bijou de grâce et d’émotion. Mais aussi frontal et cru. Déjà comparé au prodige québécois Xavier Dolan, l’auteur est une révélation à l’instar de son protagoniste Victor Polster.

    000_14v2v7.jpgUne formidable découverte

    Pour ses débuts à l’écran, ce Belge francophone de 16 ans, élève du Ballet royal d’Anvers, a logiquement décroché le Prix d'interprétation dans la section cannoise Un Certain Regard. Il est époustouflant de talent, de maîtrise, de justesse.

    Il livre une exceptionnelle performance physique dans le rôle d’une Lara en quête d’absolu, lancée à la fois dans l’apprentissage d’un art astreignant et le parcours hors-norme du changement de sexe.

    Car ce qui passionne, au-delà de magnifiques séquences chorégraphiées, c’est la façon dont le réalisateur montre la nécessité de faire reconnaître leur véritable identité sexuelle aux personnes emprisonnées dans un faux corps, les différentes et difficiles étapes pour en changer. Ainsi que la façon dont Lara vit sa métamorphose. Beaucoup trop lente à son goût, elle la poussera vers la violence…

    Le film est entré dans la tête de Lukas Dhont il y a une dizaine d’années lorsqu’il découvre la vraie histoire de Nora, une danseuse née garçon. Il la contacte pour un documentaire. Elle refuse mais lui raconte sa vie. Elle est alors devenue Lara et le documentaire s’est mué en fiction par la grâce d’un producteur belge qui a accepté de tenter l’aventure.

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 10 octobre.

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  • Grand écran: "Utoya, 22 juillet" nous plonge au coeur de l'enfer en reconstituant l'effroyable tuerie

    image.jpgC’était le 22 juillet 2011. Ce jour-là, l’extrémiste de droite norvégien Anders Behring Breivik, qui purge une peine de 21 ans de prison reconductible, tuait 77 personnes dans deux attentats. Le premier dans le centre-ville d’Oslo, où l’explosion d’une bombe devant le siège du gouvernement causait la mort de huit personnes, et le second lors d’une effroyable tuerie dans un camp de vacances sur l’île d’Utoya. Déguisé en policier, le terroriste abattait méthodiquement 69 membres de la Jeunesse travailliste, faisant par ailleurs des dizaines de blessés.

    Ancien photographe de guerre, le cinéaste norvégien Erik Poppe a reconstitué le massacre en adoptant le point de vue de Kaja, une jeune victime. Il a rapidement écarté le documentaire, choisissant la fiction pour être au plus près de la réalité. En consultant les survivants et les proches des victimes, il a décidé d'un récit entièrement du côté des jeunes, déclarait-il lors de la présentation du film à la Berlinale en février dernier.

    Un unique plan-séquence de 72 minutes

    Cinématographiquement, Utoya, 22 juillet est un exploit. A l’exception de son introduction, où Kaja assure notamment à sa mère au téléphone que tout est normal, se dispute avec Emilie, sa petite soeur rebelle dans leur tente, parle avec ses amis de l’attentat dans la capitale et du barbecue prévu pour le soir, le film est tourné en un seul et impressionnant plan-séquence de 72 minutes, la durée de la tuerie. Laissant le spectateur sur le flanc, pétrifié par la violence.

    En suivant Kaya (Andrea Berntzen, 19 ans, photo, convaincue par l’approche de l’auteur), militante sérieuse qui ne va cesser de rechercher sa soeur dès qu’elle entend le premier coup de feu, Erik Poppe nous plonge au cœur de l’enfer. Il nous fait vivre de l’intérieur l’interminable horreur vécue par les militants prisonniers de l’ile, se cachant dans les bois avec une envie de s’enfoncer dans le sol, ou se terrent dans les petits recoins des falaises tombant dans la mer.

    Tout en racontant l’histoire de façon radicale, implacable, brutale, sauvage, faisant parfois preuve d’un réalisme cru en montrant l’agonie d’une jeune fille, le film se concentre avant tout sur le claquement des balles, d'autres bruits effrayants, les courses chaotiques et la peur viscérale des jeunes coincés sur un coin de terre, luttant pour leur survie en ignorant l’origine du danger. Par ailleurs, du tireur traquant ses proies, on ne voit qu’à deux ou trois reprises une menaçante et lointaine silhouette noire.

    Deux autres films 

    Toutefois les avis divergent entre hommage vibrant aux victimes et récupération indéfendable. Si Utoya, 22 juillet a été bien accueilli par la critique scandinave, Erik Poppe est aussi accusé de complaisance et se retrouve au centre d’une polémique rappelant celle envers Gus Van Sant, lorsqu’il avait reconstitué la fusillade de Colombine il y a quinze ans.

    Cela n’a pas empêché deux autres cinéastes de se pencher sur la question, dont Paul Greengrass avec Norway, produit par Netflix et présenté à la dernière Mostra de Venise. Une série télévisée et également prévue sur la chaîne norvégienne NRK.

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 3 octobre.

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