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Sorties de la Semaine - Page 10

  • Grand écran: "Le consentement", adaptation fidèle de la bombe littéraire lancée par Vanessa Springora

    Début 2020, Vanessa Springora lançait une bombe dans le milieu littéraire et bien et au-delà, avec la publication de son livre Le Consentement. Minutieuse, implacable, la talentueuse éditrice décrivaiit l’emprise toxique durable exercée sur elle à la fin des années 80, alors qu’elle avait à peine 14 ans, par l’écrivain Gabriel Matzneff, pédophile quinquagénaire encensé à l’époque par le petit monde culturel parisien. 

    Le succès fulgurant de cette œuvre glaçante, dérangeante, devait forcément inspirer une version cinématographique. Trois ans plus tard, alors que Matzneff est à nouveau accusé de viol sur mineur par une femme dans la cinquantaine, dénonçant des agressions sexuelles endurées de ses 4 à 13 ans, sort sur nos écrans l’adaptation très fidèle du livre. Signée Vanessa Filho, elle propose un scénario auquel Vanessa Springora a participé. 

    Après une scène d’ouverture intrigante, on se retrouve dans un dîner en ville, où la lycéenne Vanessa (Kim Higelin) en compagnie de sa mère alcoolique mondaine (Laetitia Casta) rencontre pour la première fois Matzneff (Jean-Paul Rouve). Le vaniteux auteur plastronne devant un auditoire admiratif tout en jaugeant sa future proie, sur laquelle il met déjà ses griffes au retour, dans la voiture. Facilitatrice, la mère esquisse un froncement de sourcil....

    Descriptions crues et analyse froide

    Vanessa Filho, dont c’est le deuxième long métrage après Gueule d’ange ne craint pas de déranger, de choquer, de provoquer le malaise, en décrivant crument les relations sexuelles entre Matzneff et Vanessa. Tout en analysant froidement le mécanisme de l’emprise que subit l'adolescente, éblouie par l’intelligence du prédateur et persuadée de l’amour qu’il lui voue.

    Pour autant, cette adaptation réaliste, sans trahir l’œuvre, n’est pas tout à fait à sa hauteur, dans la mesure où la puissance de l’image n’égale pas celle de l’écrit. Mais elle s’avère édifiante pour ceux qui n’ont pas lu le livre. 

    Performances incroyables

    La performance de ses deux protagonistes principaux n'y est de loin pas étrangère. Pourtant âgée de 22 ans lors du tournage, Iza Higelin (la petite-fille du chanteur mort en 2018) fait totalement illusion. Elle est bouleversante en frêle gamine timide de 14 ans, ravagée, brisée. Victime inconsciente au début, elle réalise peu à peu que quelque chose ne va pas mais, incapable d’échapper seule au piège tendu par le terrifiant prédateur, elle ne sait pas vers qui se tourner.  .

    Quant à Jean-Paul Rouve, méconnaissable pour l’occasion avec son crâne rasé, et là où non ne l’attendait pas, il se révèle magistral en monstrueux et pervers manipulateur. Narcissique, redoutable, féroce, il sidère et fascine. On croit voir et entendre le présomptueux Matzneff, usant de son insupportable arrogance et de sa célébrité pour amuser la galerie.  

    A l’image de la fameuse émission de Bernard Pivot de 1990, où l’écrivain se vante de ses conquêtes juvéniles face à la complaisance de ses pairs, se moquant de l’écrivaine québécoise Denise Bombardier, seule à dénoncer les scandaleuses pratiques de cet écoeurant individu. 

    Si une partie de la critique française estime que Vanessa Filho a réussi son difficile pari, l’autre ne manque pas de l’égratigner. En revanche les jeunes ne se montrent pas indifférents, suite à une tendance TikTok, qui a fait progresser les entrées de 4o% en une semaine. 

    A l’affiche  dans les salles de Suisse romande dès mercredi 6 novembre.

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  • Grand écran: "Simple comme Sylvain" évoque l'impossibilité d'une passion durable, sur fond de lutte des classes

    Monia Chokri s’était révélée actrice au grand public en 2010 dans Les amours imaginaires de Xavier Dolan. Puis, en 2019, on l’avait découverte réalisatrice à Cannes avec La femme de mon frère, opus plutôt corrosif autour d’un personnage féminin dépressif, qui avait décroché le prix Coup de coeur à Un Certain Regard.

    En mai dernier on retrouvait la Québécoise dans cette même section, où elle présentait Simple comme Sylvain. Jouant avec les codes de la romance pour mieux  en déconstruire les clichés, elle explore le désir féminin, le couple, la compatibilité et son contraire, en racontant une rencontre explosive. Celle de Sophia (Magalie Lépine-Blondeau), prof de philo à Montréal vivant avec son ami intello Xavier depuis dix ans, et le beau charpentier Sylvain (Pierre-Yves Cardina)l, qui doit rénover leur maison de campagne.

    Des ébats torrides

    C’est le coup de foudre auquel ils cèdent aussitôt. Insatiables les deux amants se livrent à des ébats torrides. Répondant à l’appétit d’ogre de Sylvain, Sophia se laisse follement aller à ses envies sexuelles entre deux cours sur Platon ou Spinoza à l’université du troisième âge et des discussions philosophico-gaucho-bobos sur les grands thèmes sociaux en compagnie de gens de son monde.  

    Ce qui laisse sur le côté le brave Sylvain. Car s’il fait grimper Sophia aux rideaux, il a du mal, face à cet étalement de science, à régater avec son manque de connaissances, ses manières de bûcheron et son vocabulaire fruste. Alors forcément, la relation entre les tourtereaux ne tarde pas à en pâtir. 

    Préjugés inévitables

    Monia Chokri évoque l’impossibilité d’une passion durable, ce qui n'est pas nouveau en soi, mais qui se complique lorsqu’elle concerne deux êtres issus de milieux opposés. Sa réflexion se greffe ainsi sur une forme de lutte des classes et les préjugés inévitables des uns envers les autres. 

    Comme le dit l’auteure en se mettant dans le même sac, c’est bien joli de se revendiquer de gauche, de manifester un esprit ouvert, de militer pour l’environnement et l’immigration, mais dans le fond, est-on vraiment capable d’en parler avec quelqu’un de différent?

    Joyeux, sensuel, charnel, sexy, érotique, mélancolique, plein d’amour, d’humour, de dialogues savoureux et de situations piquantes, Simple comme Sylvain est une belle réussite, portée en plus par ses deux excellents comédiens, Magalie Lépine-Blondeau (la meilleure amie de Monia Chokri) et Pierre-Yves Cardinal.  

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 29 novembre. 

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  • Grand écran: dans "Napoléon", Ridley Scott s'emploie laborieusement à déconstruire le mythe. Avec un Joaquin Phoenix trop vieux pour le rôle

    Hautaine, Marie-Antoinette marche lentement vers l’échafaud, toisant une foule enragée, au son de la chanson Ah, ça ira!, version Edith Piaf de 1953. Ainsi commence le Napoléon de Ridley Scot, qui,  sur un scénario de David Scarpa,. revisite à son tour la légende pendant quelque 2h40, depuis la décapitation de la reine en 1793 jusqu’à la mort du héros en 1821 à Sainte-Hélène

    Et le moins qu’on puisse dire, c’est que son Napoléon, figure planétaire qui a inspiré plus de 1000 fictions ou documentaires au cinéma et à la télévision, fait causer. Malheureusement, on ne peut prétendre que le 28e film du réalisateur britannique soit à la hauteur des emballements positifs ou négatifs (plus fréquents) des critiques. Sans oublier les discussions enflammées entre historiens, dont certains s’étranglent face à la perfidie du représentant d’Albion. 

    PEn effet, Ridley Scott, qui avait enthousiasmé il y a trois ans avec Le dernier duel, peine cette fois-ci à convaincre avec sa vision burlesque  du petit caporal  devenu empereur. Sur fond de tragédie comique et de romance, l’auteur brosse le portrait caricatural, peu glorieux, d’un individu au costume trop imposant pour lui, curieusement niais, balourd et plaintif. .
     
    Pas grand-chose à raconter

    Il se plaît à ridiculiser rapidement cet homme dans la peau duquel s’est glissé Joaquin Phoenix. Et les choses commencent mal quand apparaît l’acteur, avec ses vingt-cinq ans de trop  pour incarner le jeune et fougueux capitaine, vainqueur du siège de Toulon, qui marque le début de son irrésistible ascension.  Mais comme il ne change pas de tête du début à la fin, Phoenix finit en quelque sorte par rattraper le temps et trouver un semblant d’adéquation et de crédibilité. 

    Par ailleurs, alors qu’il le suit pendant 28 ans, le cinéaste ne nous raconte pas grand-chose de son célébrissime protagoniste, entre deux lettres d’un sentimentalisme dégoulinant à son grand amour Joséphine de Beauharnais., incarnée par Vanessa Kirby, surprenante elle aussi au début,  avec son look à la Jane Birkin. Elle le trompe copieusement, menant par le bout du nez cet amoureux transi, tourmenté, déchiré, éjaculateur précoce ou quéquette en berne. Dominé par ailleurs par sa mère dont il a du mal à quitter les jupes. .

    Des erreurs grossières et des batailles spectaculaires

    Le film pèche pour d’autres raisons. On aurait pu attendre de Ridley Scott qu’il s’entoure de spécialistes, pour mieux ancrer sa prétendue fresque. Mais les erreurs se multiplient au fil de l’histoire.. Par exemple, Napoléon n’a pas assisté à l’exécution de Marie-Antoinette et n’a (heureusement) pas bombardé les pyramides.

    Restent les batailles, où Ridley Scott s’épanouit enfin. Outre le siège de Toulon, il propose des reconstitutions brillantes et spectaculaires de la victoire d’Austerlitz, chef d’d’œuvre tactique du général avec les soldats russes piégés dans des étangs gelés. Ou l’ultime débâcle de Waterloo, face à des Anglais particulièrement  bien organisés avec leurs formations en carres. 

    Aspects important sciemment occultés

    Dommage pourtant que le réalisateur en abuse. Et finisse par nous lasser, avec trop de combats certes épiques et visuellement saisissants, mais pas assez d’histoire. Les aspects politiques, culturels sont sciemment occultés. Code civil, Banque de France, lycées, baccalauréat, université, rien n’est dit des créations et réformes de Napoléon suite à son arrivée au pouvoir en 1799. 

    Seules comptent pour Scott la guerre, les conquêtes et la relation  addictive qu’il entretient avec Joséphine, notamment  illustrée par deux grotesques scènes de sexe. Finalement on assiste à une déconstruction de mythe, péché mignon de l’auteur, assez vaine et ennuyeuse.  

    A l’affiche dans salles  de Suisse romande depuis mercredi 22 novembre.

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