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Sorties de la Semaine - Page 133

  • Grand écran: "McQueen", portrait passionnant du fascinant génie britannique de la mode

    McQueen_ImageArticle02.jpgJe fais défiler les horreurs de mon âme sur les podiums…. Une phrase choc mais qui n’étonne guère de la part d’Alexander McQueen, le célèbre, fascinant et provoquant couturier britannique gay, descendu en flammes, haï ou adulé, mort à 40 ans il y a huit ans. Un visionnaire à qui le Genevois Ian Bonhôte et Peter Ettedgui ont consacré un passionnant et émouvant portrait.

    Il débute au Saint-Martin’s College Of Art And Design, pépinière de talents où il est repéré  par la journaliste de  mode Isabella Blow. Elle va le propulser vers les sommets. L’ascension est même fulgurante pour ce bad boy avant-gardiste, né dans un milieu modeste, d’un père chauffeur de taxi et d’une mère enseignante qu’il vénérait.

    260px-Alexander_McQueen_by_FashionWirePress.jpgSans un sou en poche, le «hooligan» de la fringue débarque à Paris et intègre la maison Givenchy dont il devient le directeur artistique. Le contraste avec son monde et son approche de la mode est saisissant. Mais il garde son propre label où il donne libre cours à sa créativité, son inventivité au sein d’un univers trouble, glauque, puisant son inspiration dans l’histoire, la danse, la peinture, la musique, la littérature et le cinéma.

    Défilés extravagants destinés à choquer

    Amoureux du drame et du scandale, désireux de choquer, le concepteur de vêtements déments imagine des défilés extravagants où il déploie son sens du spectacle, de la théâtralité, de la chorégraphie. A l’image de sa collection Le viol de l’Ecosse en 1995, proposant des  habits déchirés, lacérés au niveau des seins, avec des traces d’urine à l’entrejambe…  La presse se déchaîne.

    Toujours sulfureuses, ses collections avaient un thème, comme son utilisation de robots qui aspergeaient de peinture un mannequin en robe blanche, son  époustouflant hologramme de Kate Moss, son hommage à Hitchcock, sa mise en scène dans un asile psychiatrique, sa  dénonciation de la société de consommation dans Horn Of Plenty, ou sa dernière présentation, Plato’s Atlantis, filmée par des drones. Elle raconte un monde sous-marin hostile, avec des robes-méduses, des corps recouverts d’écailles, de corail…

    Images d'archives, vidéos et témoignages 

    Le documentaire tente ainsi de percer la personnalité complexe d’Alexander McQueen, homosexuel déclaré, abusé dans son enfance, grassouillet avant de se faire poser un anneau gastrique. Entre les shows extraordinaires, les réalisateurs proposent des images d’archives, de surprenantes vidéos intimes et inédites.

    Tous ces témoignages, dont ceux (un peu trop nombreux et répétitifs) des siens et de son entourage, évoquent l’excessif artiste de génie en symbiose avec la nature, mais aussi un homme obsessionnel, triste, torturé, miné par la drogue et l’alcool. Séropositif, il s’est pendu le 11 février 2010, la veille de l’enterrement de sa mère.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 5 septembre.

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  • Grand écran: avec "De chaque instant", Nicolas Philibert suit le difficile parcours de stagiaires infirmiers

    de-chaque-instant.jpgTrès intéressé par l’apprentissage, l’auteur du célèbre Etre et avoir (2002), tourné dans une école à classe unique en milieu rural, Nicolas Philibert propose De chaque instant. Le réalisateur français a décidé de suivre, sur trois ans, les élèves d’un institut de formation en soins infirmiers.

    Filles (une grande majorité) et garçons vont partager leur temps entre cours théoriques, exercices pratiques et stages sur le terrain. Un parcours difficile et intense qui leur permettra d’acquérir un grand nombre de connaissances, de maîtriser les gestes cruciaux, tout en se préparant à endosser de lourdes responsabilités.

    Souvent très jeunes, ils sont confrontés tôt à la fragilité humaine, aux fêlures des corps et des âmes, à la souffrance, à la maladie, à la mort. C’est ce que retrace l’opus divisé en trois parties. Chacune d’entre elles a une tonalité différente, la troisième rassemblant les témoignages des stagiaires qui expriment leur ressenti aux formateurs.

    Un film instructif, émouvant, non dénué d'un certain humour, qui vous laisse découvrir, en même temps que les protagonistes, le stress, les tensions, la réalité économique, la multiplication des tâches, l’obligation du rendement.

    Nicolas Philibert pensait traiter ce sujet depuis quelque temps. «Et puis j’ai fait une embolie en 2016, qui m’a expédié aux urgences et aux soins intensifs. Ce fut le déclic et ma volonté de rendre hommage à ce métier discrédité, déconsidéré, méprisé, mal payé, à des jeunes ou moins jeunes engagés, mobilisés. Un besoin de dire qu’il y a un savoir infirmier comme il y a un savoir médical. Et que ce n’est pas le même». Voir l’entier de l’article avec l’interview de Nicolas Philibert réalisé lors du Festival de Locarno dans notre note du 4 août dernier.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 29 août.

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  • Grand écran: "Le poirier sauvage", une nouvelle fresque monumentale signée Nuri Bilge Ceylan

    poirier_sauvage.jpgPalme d'or à Cannes en 2014 avec Winter Sleep, le Turc Nuri Bilge Ceylan, auteur d’un cinéma monumentaliste, propose sa nouvelle œuvre, une fresque familiale tournée dans Dardanelles, d’où il est originaire. Elle n'a cette fois pas eu l'heure de plaire au jury.

    Son héros Sinan (Ahmet Rifat), 20 ans, vient de terminer ses études à Istanbul. Il n’a pas encore de travail et revient vivre auprès de sa famille à Canakkale, site archéologique de l'antique Troie. Passionné de littérature, il a écrit un premier roman qu'il compte faire publier, Le poirier sauvage, titre qui est aussi celui du film. Mais son livre décrivant la culture populaire n'intéresse personne. Impuissant à récolter l’argent nécessaire, il se voit bon pour le service militaire.

    En attendant, c’est le temps des retrouvailles. Sinan revisite les lieux de son enfance, la ferme familiale, s’installe dans son ancienne chambre et retrouve des connaissances. Avec elles, il échange longuement autour d’une table, lors de promenades, ou d’une conversation sous un arbre avec un probable amour de jeunesse, une fille autrefois audacieuse et aujourd’hui prête à épouser un vieillard riche, quitte à être malheureuse. .

    Arrogant, dédaigneux, provocateur

    Suite à ce beau moment baigné de lumière, où la jeune femme ôte son foulard à l’abri des regards, Sinan s’attaque à un romancier célèbre, philosophe avec un intellectuel, croise le fer avec deux imams. Cette dernière rencontre donne lieu à un débat interminable entre un traditionnaliste et un réformiste sur l’évolution de la religion.

    Arrogant, dédaigneux, insolent, impatient, sûr de lui, se fâchant sans cesse, Sinan aime provoquer ses interlocuteurs, pour lui des abrutis provinciaux qu’il prend de haut. Dont son père, qu'il doit réapprendre à connaître. un instituteur proche de la retraite, moustachu à la fois charmeur, ricanant et progressiste, que les villageois ne respectent pas.

    Accro au jeu, couvert de dettes, il s’obstine à creuser un puits dans une terre sans eau. Son destin, auquel il est pourtant inexorablement lié, paraît misérable à son fils, à l’opposé de ses ambitions. Mais ce petit coq ingrat et peu sympathique, qui sera finalement ramené d’où il vient, ressemble déjà à ce géniteur qu'il méprise. 

    Profond, romanesque, mélancolique, tchékovien, visuellement magnifique, prenant quelques virages fantasmatiques et oniriques comme le plan de ce visage de bébé couvert de fourmis, Le poirier sauvage séduit évidemment aussi par son élégante mise en scène contemplative.

    Ce récit d’apprentissage désabusé est toutefois très bavard et on sent passer les 188 minutes. Si Nuri Bilge Ceylan livre, entre ironie et dérision, quelques ellipses fulgurantes, le service militaire de son héros est ainsi résumé en quelques secondes, il prend son temps pour nous raconter cette histoire d’initiation, de filiation et de réconciliation entre les générations. Le tout sur fond de solitude, de malaise, d’espoir perdu dans une Turquie soumise à une dérive autoritaire.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 22 août.

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