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Sorties de la Semaine - Page 87

  • Grand écran: "Queen & Slim", cavale désespérée de deux amants tragiques

    3992ef8c-adb0-44f3-aaa9-8d20e33ec6e0-VPC_TRAILER_ON_QUEEN_AND_SLIM_DESK_THUMB_V2.jpgNous sommes dans l’Ohio. Deux Afro-Américains, Queen, brillante avocate, et Slim, employé de magasin, rentrent en voiture après un premier rendez-vous amoureux. Ils sont alors arrêtés par un policier blanc pour une infraction mineure. La situation dégénère aussi soudainement que tragiquement et Slim, en état de légitime défense, tue le flic raciste qui vient de tirer sur Queen, la blessant à la jambe.

    Suite à cet évident contrôle au faciès qui tourne au drame, les deux jeunes gens traqués par les forces de l’ordre, sont fatalement poussés à la fuite pour éviter la prison à vie. Sinon pire. Cette cavale désespérée et mortelle leur fera traverser l’Amérique pendant six jours. Six jours au cours desquels ils vont se découvrir et s’aimer, tout en devenant les héros de la population noire, un symbole de sa lutte contre les violences policières et les discriminations dont elle est sans cesse victime.

    Si cette histoire d’amour et de mort laisse penser au mythe Bonnie and Clyde revisité, cette illustration tragique du racisme institutionnalisé fait surtout écho au meurtre de George Floyd, qui a mis le feu aux Etats-Unis. Avant de provoquer une série de grandes manifestations contre le racisme un peu partout, plus particulièrement en France.

    Un vrai regard de cinéaste

    Cette folle épopée romantico-politique est le premier long métrage de la réalisatrice afro-américaine Melina Matsoukas sur un scénario de Lena Waithe. Engagée, elle a un vrai regard d’auteur, tout en délivrant un message antiraciste fort dans ce thriller prometteur. Porté de surcroît par deux comédiens charismatiques, Jodie Turner-Smith et Daniel Kaluuya.

    Néanmoins, en dépit du suspense, de l’émotion et de l’énergie que Queen & Slim dégage, on regrette la longueur de ce road-movie au final convenu. Esthétisant, privilégiant la forme au fond, trop démonstratif, il est aussi parfois desservi par certaines incohérences et lourdeurs d’un scénario peu subtil.

    A l’affiche du Grütli à Genève depuis le 10 juin.

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  • Grand écran: "Mare", un nouveau portrait de femme signé Andrea Staka

    F8TVW5ltKgoAzI94vOtCXR.jpgSélectionnée en février dernier dans la section Panorama de la Berlinale, Andrea Staka avait pu présenter son long métrage Mare, alors que le coronavirus commençait déjà à circuler en Europe. Le film sort peu après le festival en Suisse alémanique, mais trois jours plus tard, c’est le confinement et la fermeture des salles.

    "Après Berlin. je suis tombée dans un trou", nous raconte la réalisatrice suisse d’origine croate, dont on rappellera qu’elle avait décroché le Léopard d’or à Locarno en 2006 pour Das Fräulein, et s'est retrouvée en compétition au Tessin avec Cure en 2014. "Et puis au bout d’un mois, j’ai quand même réalisé un court métrage, intitulé My Mom, My Son and Me. Mais je ne peux pas prétendre avoir utilisé cette période d’une manière très créative. Je me suis surtout posée, j’ai réfléchi. Cela dit, je ne sais pas si le monde d’après sera très différent de celui d’avant… " 

    Quelque temps avant, il y a donc eu Mare, tourné à Kanalve, l’aéroport de Dubrovnik. Un lieu qu’adore l'auteure, à la frontière du Montenegro et d’où vient son grand-père. Entre plage, soleil et nature, elle brosse le portrait au quotidien d’une femme dans la quarantaine qui, bien qu’entourée d’avions, n’est jamais allée nulle part. Dévouée, plus ou moins heureuse, plus ou moins invisible, elle n'a cessé de tenir son rôle d’épouse, de mère et de maîtresse de maison.

    Mais, arrivée à la moitié de sa vie et aspirant à la liberté, cette femme piégée par ses enfants, son mari, la société, mais également par elle-même, se pose des questions à la fois banales et importantes sur qui elle est, son rôle de femme, de mère, son partenaire, ses enfants, ce qui doit changer dans son couple, ce qu’elle fait de ses désirs, comment elle vit sa sexualité. Elle a d'ailleurs une petite aventure avec un étranger de passage. 

    Ecrit pour Marija Skaricic

    Andrea Staka a spécialement écrit pour Marija Skaricic (photo), l’actrice principale, qui se révèle convaincante. "Je la connais très bien. Je l’ai choisie parce qu’elle est intuitive, à la fois fragile et forte. Mais je dois préciser que si Mare se donne la liberté d’essayer quelque chose, c’était un problème pour Marija d’être libre. Mais elle a fini par se rendre compte qu’elles étaient proches". La cinéaste avoue aussi avoir mis d’elle-même dans le personnage, le courage, la curiosité, la recherche, la sensualité.

    Avec cette tendance à explorer l’intime, féminin avant tout, on pourrait imaginer que le cinéma est pour Andrea Staka une forme de psychanalyse. En réalité, c’est une manière de voir les choses plus clairement. «J’ai besoin d’images pour comprendre le monde et les gens». C’est ainsi qu’elle va porter son regard sur la société suisse dans son prochain film. "J’ai un sujet déjà écrit que je dois retravailler. J’ai dans la tête ce que j’appellerais mon  Zurich fiction. Avec une jeune femme (évidemment…) qui va tester ses limites en matière de liberté et d’identité".

    Mare, à l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 10 juin.

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  • Grand écran: "La bonne épouse", laborieuse comédie féministe aux couleurs pop

    labonneepouse.jpgTenir sa maison avec abnégation, se plier au devoir conjugal sans moufter, ne jamais se laisser aller, veiller à l’économie, bref respecter les piliers indispensables pour devenir des épouses et des mères parfaitement soumises, le rêve de l’homme: c’est ce qu’enseigne Paulette Van der Beck (Juliette Binoche) dans l’école ménagère qu’elle dirige avec son mari (François Berléand) en Alsace.

    Mais on approche de Mai 68. L’école est moins fréquentée, les mœurs changent, les jeunes filles s’émancipent, se montrant moins enthousiastes à l’idée de devenir d’irréprochables femmes au foyer cantonnées dans des situations subalternes, sans ressources financières, totalement dépendantes du bon vouloir de leur mari. Avec cette révolution qui s'annonce, les certitudes de Paulette vacillent. D’autant plus lorsque veuve et ruinée, elle s’abandonnera tardivement à un amour de jeunesse (Edouard Baer) longtemps éconduit. Des scènes qui confinent au pathétique.

    A l’image du film dans son ensemble, malheureusement. Car Martin Provost, réalisateur si apprécié et délicat de Séraphine et Violette, se complaît, en voulant rendre hommage aux femmes, dans une comédie caricaturale pour rappeler laborieusement l’histoire de leur émancipation. Grossissant outrancièrement le trait, il enfile dès lors les clichés comme des perles, tout en évoquant quelques stars d’alors, Adamo, Guy Lux, ou Joe Dassin pour nous mettre dans l’ambiance.

    On oublie aussi les ridicules François Berléand et Edouard Baer. C'est un peu mieux côté comédiennes, mais on n’atteint pas des sommets. Dans cet univers aux couleurs pop, Martin Provost a confié le rôle principal à Juliette Binoche, qu’on retrouve , dans les deux tiers de l'opus, en bourgeoise coincée faussement chic, boudinée dans son tailleur rose.

    Elle est secondée par sa belle-soeur (Yolande Moreau), vieille fille brindezingue qui rêve au prince charmant et découpe brutalement les volailles façon Maïté dans la fameuse émission télévisée que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître: La cuisine des mousquetaires, Ainsi que par une religieuse (Noémie Lvovsky), acerbe et autoritaire avant de céder elle aussi au vent de liberté qui souffle en ce printemps prometteur...

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 11 mars.

     

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