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le blog d'Edmée - Page 421

  • Festival de Locarno: Fernand Melgar et "L'Abri": "Je suis la mauvaise conscience de la Suisse"

    images[11].jpgAprès La Forteresse et Vol Spécial, le cinéaste vaudois Fernand Melgar nous plonge au cœur de L’Abri, un centre d’hébergement d’urgence pour SDF à Lausanne, bouclant ainsi en principe sa trilogie sur la migration. Le premier parle d’entrée en Suisse, le second évoque la fin du voyage. L’Abri, en lice pour le Léopard d’Or est une sorte de no man’s land, un entre-deux entre l’arrivée et le départ.

    Dans ce troisième volet qui peut en appeler un quatrième ("ce sont les films qui me choisissent"), Fernand Melgar et Elise Schubs, sa preneuse de son auteure d’un formidable travail, nous emmènent dans un souterrain jusqu’à la porte du centre. C’est l’hiver, le froid mord, il  neige. Chaque soir se déroule le même rituel d’entrée dramatique qui provoque des bousculades parfois violentes.

    La lourde tâche du tri des démunis

    Trois veilleurs ont la terrible tâche de trier les démunis, laissant pénétrer d’abord les personnes âgées, les handicapés, les femmes et les enfants, puis les hommes. Alors que la capacité est de 100 places, seuls 50 seront admis et auront droit à un repas et à un lit. Pour les autres, la nuit sera dure. Comme la suivante et toutes celles d’après jusqu’en mars.  

    La technique de Melgar, c’est l’immersion totale. Pendant six mois, lui et Elise Schubs ont vécu au milieu des sans-logis, attendant avec eux à l’extérieur et pénétrant aussi à l’intérieur du centre. Et cela après un long travail de recherche et de préparation, qui a également duré six mois, sans caméra, pour approcher les gens dans la rue à la soupe populaire, expliquant leur démarche pour établir une relation, gagner leur confiance. 

    Des êtres humains cherchant à survivre

    310-175-abri01[1].jpgCeux qui fréquentent l’Abri sont en majorité des citoyens de l’Est et du Sud de l’Europe. Ce ne sont pas des clandestins, ils ont des papiers, des passeports et fuient la crise. Ce sont des migrants économiques, des working poors avec enfants à charge. Ils touchent des salaires de misère ne leur permettant pas d’avoir un logement. "Il n’y a pas de différences entre eux et les personnages de mes films précédents. Ce sont tous des êtres humains qui cherchent désespérément à s’en sortir".

     

    Le reproche qu’on peut faire à Melgar c’est de ne pas porter de jugement. Par exemple sur les gérants du lieu, dont un se révèle particulièrement odieux. En même temps, il ne faut pas être grand clerc pour voir où vont ses sympathies. Mais il ne veut pas catégoriser. "Il n’y a pas de gentils, de salauds, mais des êtres humains qui essayent de trouver un terrain d’entente. On attend de moi des réponses alors que je suis le témoin d’une réalité qu’on cache, qu’on veut oublier".

    "Je n’ouvre pas des portes mais des fenêtres"

    "Mon cinéma est celui de l’intranquillité. Je suis la mauvaise conscience de ce pays. J’essaye de faire réfléchir les gens. Je pose des questions à mes concitoyens après le vote du 9 février qui a conduit à la fermeture des portes. En même temps, c’est un message d’espoir. J'ouvre des fenêtres".


    Il a ainsi réalisé L’Abri pour lever le voile sur des victimes du silence et de l’ignorance, sur une humanité à la dérive que Lausanne occulte comme si elle faisait tache dans le paysage. "Comment dans ma ville peuvent exister ces fantômes, ces citoyens de seconde zone ? Quand j’en parle avec des amis, ils me croient à moitié. Puisqu’il faut voir pour le croire, je montre".

    Et Melgar le montre dans un film fort, dérangeant, bouleversant racontant ce lieu dit d’accueil mais surtout de tri, dont les barrières interdisant l’entrée à certains représentant la loi et l’autorité. Il a posé d’énormes questions morales à son auteur. "Pour moi le fondement de la société moderne c’est le respect des droits humain. Or c’est le contraire dans ce film. Aujourd’hui on glisse vers l’exclusion, l’élite, écartant de notre chemin ceux qui sont dans le besoin".

    Il reste à espérer qu’il sera mieux  compris par le jury que Vol Spécial qui avait poussé, il y a trois ans, le président Paulo Branco à traiter l’opus de fasciste…


    Andrea Staka propose "Cure-The Life Of Another"

    images[4].jpgAutre représentante suisse en compétition, Andrea Staka, lauréate en 2007du léopard d’Or pour son premier long-métrage Das Fräulein. Avec Cure–The Life Of Another, la réalisatrice originaire d’ex-Yougoslavie situe son action à Dubrovnik, en 1993, après la guerre.

    L’histoire est celle de Linda, 14 ans. Née en Croatie elle a grandi en Suisse et retourne dans son pays avec son père. Elle y rencontre Eta, qui l’entraîne dans une forêt dangereuse sur les hauteurs de la ville. Les deux adolescentes jouent à un échange d’identité plein de sous-entendus sexuels jusqu’à ce que Linda pousse son amie dans le vide.

    Revenue seule, elle prend peu à peu la place d’Eta dans la famille de cette dernière. Au bord du gouffre, elle perd pied,  hantée par les images de la chute mortelle de sa nouvelle amie. On reste plutôt perplexe devant le message du film, décevant dans la mesure où il promet plus qu’il ne tient. On attendait davantage de la talentueuse cinéaste qui, chose rare, avait fait salle comble lors de la projection de presse. On retiendra toutefois la beauté de son actrice principale, Sylvie Marinkovic.

    "Durak", un film russe aux allures de Léopard 

    44cd99ffb7d5f598c44b89758944775d3f32629b[1].jpgJusqu’à présent, le meilleur film de la compétition c’est Durak, du Russe Yuri Bykov. Il met en scène Dima Nikitin, un plombier honnête qui habite une petite ville. On découvre son exceptionnelle intégrité lorsque qu’un vieil immeuble mal construit de neuf étages, abritant principalement des ivrognes et des marginaux, menace de s’écrouler suite à une explosion. 

    Tout le monde doit être immédiatement évacué, mais c’est le cadet des soucis des élus locaux qui célèbrent l’anniversaire de la maire au restaurant. Dima se lance alors dans une course contre la montre qui lui sera fatale, pour tenter de convaincre les bureaucrates pourris et corrompus jusqu’à l’os de se remuer et éviter une catastrophe qu'il estime imminente. 

    Critiquer la corruption au pays de Poutine n’est pas une nouveauté. Mais il y a la manière. Et ce faisant, Yuri Bykov livre un film coup de poing haletant, qui allie l’excellence de la mise en scène à celle du traitement et à la belle prestation des acteurs. 

     

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  • Festival de Locarno: Le grand écart entre Piazza et compétition!

    images[4].jpgEntre l’ouverture sur la Piazza Grande avec Lucy et ses neurones en folie et le premier film de la compétition Mula sa kung ano ang noon (From What Is Before) du cinéaste philippin Lav Diaz, il y avait comme un gouffre. A croire qu’on n’était pas dans le même festival.

    Un village isolé des Philippines en 1972, où se passent de très mystérieux événements. Des hurlements viennent de la forêt, des vaches sont massacrées, un homme est retrouvé ensanglanté à un carrefour des maisons sont incendiées, Sous prétexte de protéger les habitants qui veulent juste une petite aide financière de l’Etat, des militaires débarquent et instaurent le couvre-feu. Et le président Marcos promulgue la loi martiale dans tout le pays.

    Filmée en noir et blanc, librement inspirée de personnages et de faits réels, l’anatomie de ce village et de ses habitants se révèle aussi intéressante cinématographiquement que socialement. Mais la durée du métrage, 5h38, en a découragé ld’un. Et ce n’est de loin pas le plus long du réalisateur…

    On se retrouvait côté auteur sur la Piazza Grande avec le dernier opus de l’Israélien Eran Riklis Dancing Arabs, tiré des romans de Sayed Kashua Les Arabes dansent aussi et La deuxième personne. Il raconte l’histoire d’Eyad, qui a grandi dans une ville israélo-arabe et que ses parents envoient dans un prestigieux internat de Jérusalem. Une première.

    Déchiré entre deux cultures, l'adolescent cherche désespérément à s’intégrer, tombe amoureux d’une jeune Juive mais doit quitter l’école lorsque leur relation est découverte. Pour être accepté, il devra prendre une décision douloureuse qui changera à jamais sa vie. Eran Riklis séduit avec ce sujet casse-gueule. Evitant les clichés, surfant finement sur le dérisoire, il livre un film au ton satirique, original et sans complaisance.

    On n’en dira pas autant de Love Island, signé de Jasmila Zbanic. Liliane et son mari passent des vacances dans une station balnéaire croate, genre Cub Méd. Enceinte, Liliane est près d’accoucher, le mari se réjouit follement de la naissance de leur petite fille, mais la rencontre d’une belle femme qui leur plaît à tous les deux va singulièrement leur compliquer la vie. On assiste dès lors à une sorte de sous Bronzés croisé avec un ersatz de Gazon maudit. Calamiteux à quelques chansons près. 

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  • Festival de Locarno: pour Mélanie Griffith, il n'y a pas de petites rôles, juste de petits acteurs...

    1958389_pic_970x641[1].jpgLes objectifs sont braqués, Mélanie Griffith peut débarquer au Forum. La star américaine, montée sur scène lors de la cérémonie sur la Piazza Grande qu’elle a prise en photo, était invitée pour son rôle dans le court métrage Thirst de Rachel McDonald, en compétition chez les Léopards de demain. Dans cet opus sur la compassion et la connexion entre les humains, Mélanie joue Sue, une beauté alcoolique sur le retour.

    Devant un public tout acquis, comme d’habitude dans ce genre de rencontres, l’actrice au visage très retouché mais se révélant simple et directe, évoque l’expérience fantastique qu’elle a vécue avec la réalisatrice de 31 ans.

    «Ce n’est pas pour moi que je suis venue. Je n’aime pas me voir… Je suis ici pour la soutenir et lui permettre de faire de nombreux autres films. Mon personnage est une alcoolique qui essaye de survivre. Survient alors un jeune homme et tous deux se métamorphosent. J’étais moi-même alcoolique. Cela fait partie de ma thérapie. C’est une façon de sortir de mon corps, de mon esprit ».

    Mélanie Griffith a été recommandée par la directrice de casting à Rachel McDonald, qui a envoyé  une lettre avec le script à a comédienne. Touchée par la missive, le sujet et surtout par la  réalisatrice, elle-ci a tout de suite accepté. «J’ai vu quelque chose chez Rachel. J’ai eu un très grand plaisir de travailler avec elle. Elle sait ce qu’elle veut, elle avait tout prévu. Elle m’a laissé faire ce que je pensais être juste, tout en me donnant des indications très intelligentes que je suivais».

    Le fait que ce soit un court métrage n’est pas entré en ligne de compte. Que le film dure vingt minutes ou cinq heures, c’est pareil. Il n’y a pas de petits rôles, juste de petits acteurs… »

    Le cinéma suisse touchera six millions de plus par an

    Quelques heures auparavant, Alain Berset se livrait au traditionnel exercice de la conférence de presse à Locarno. «La culture est essentielle et nous souhaitons lui accorder plus de poids », déclarait le ministre avant d’annoncer, même si ce n’est pas le Pérou, la bonne nouvelle du jour: six millions de plus par an pour le cinéma, avec l’introduction  du programme de Promotion de l’investissement dans la cinématographie suisse (PICS).

    Cette mesure servira à soutenir la réalisation de films et sera développée dans le cadre des nouveaux régimes d’encouragement du cinéma pour 2016-2019. Le septième art fait partie du message  sur la culture que Berne a mis en consultation jusqu’au 19 septembre.

    Il prévoit une augmentation du budget de 3,4% par an. Des 895 millions que le gouvernement veut investir dans la culture de 2016 à 2019, 200 millions iront comme jusqu’ici à l’encouragement du cinéma suisse, que le ministre souhaite fort et capable de dépasser les frontières.

    Alain Berset a par ailleurs souligné avec force la nécessité de la participation de la Suisse au programme MEDIA de l’Union européenne. Celui-ci ayant été interrompu et les négociations avec Buxelles gelées  après  le oui à ‘initiative sur l‘immigration de masse, des mesures compensatoires ont été prises le 1er juillet. Mais elles ne représentent qu’une solution transitoire et le Conseil fédéral vise une réintégration de l’accord MEDIA.

    Quand et comment ? Difficile à dire, selon le ministre. «Nous devons nous préparer à différents scénarios. Nous discutons des aspects techniques. Nous voulons rentrer en janvier 2015 ». Un vœu pieux?

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