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Sorties de la Semaine - Page 93

  • Grand écran: avec "1917", Sam Mendes nous emmène en enfer. Un film immersif, haletant, éprouvant

    fmc_mc_1917.jpgLe pari est plutôt rare et casse-gueule. Un film conçu comme un seul plan-séquence de deux heures. Sam Mendes a audacieusement et brillamment relevé le défi avec 1917, une époustouflante prouesse technique où il propose une course quasi ininterrompue (il y a forcément quelques coupures) de deux soldats britanniques contre la montre et contre la mort.

    Cet exploit, où l’auteur déjà oscarisé trois fois pour American Beauty, Les sentiers de la perdition et Skyfall, réussit à ne pas sacrifier la dimension humaine et émotionnelle, lui a permis de rafler le 5 janvier dernier deux Golden Globes, dont celui de la meilleure œuvre dramatique. A nouveau parmi les favoris aux Oscars, il pourrait faire coup double si Joker ne dynamite pas cette 92e édition le 9 février prochain, avec ses onze nominations.

    Une mission impossible

    L’histoire est inspirée de celles que lui racontait son grand-père, engagé volontaire. Dans un contexte historique, la bataille des Flandres, Sam Mendes construit une l’intrigue simple. Le 6 avril 1917, alors qu’ils se reposent dans un champ de blé, une scène bucolique, les jeunes caporaux Blake (Dean-Charles Chapman) et Schofield (Georges McKay) reçoivent l’ordre d’aller voir leur commandant.

    5e15a6cdb41d26.50584974-e1578479656413-580x372.jpgCe dernier leur assigne une mission impossible. Porteurs d’un message qui pourrait empêcher une tuerie, ils doivent sortir des tranchées, franchir les barbelés, traverser la zone démilitarisée et une partie des lignes allemandes pour aller avertir un autre bataillon de ne pas attaquer l’ennemi. Faute de quoi 1600 hommes, dont le frère de Blake, tomberont dans un piège et seront tous massacrés.

    La caméra sur les talons, elle ne les lâchera jamais, les deux hommes nous emmènent en enfer. Le réalisateur a choisi des acteurs peu connus (même s’ils éclatent à l’écran) pour que les spectateurs se sentent plus proches d’eux et, ce qui n’aurait pas été le cas avec des stars, doutent de leur chance de survie. C’est réussi. A chaque avancée entre les explosions, dans le sang, dans la boue des tranchées et des champs de bataille défoncés par les obus, on redoute le pire pour les deux héros.

    Immersion totale

    D’où le suspense presque insoutenable que nous fait vivre cet opus virtuose à tous égards, totalement immersif, captivant, éprouvant. Il nous prend aux tripes en nous plongeant au plus près de l’horreur de la guerre, de sa folie meurtrière, nous laissant ressentir physiquement la peur et l’angoisse de ces deux soldats bouleversants de de courage.

    1917 est plus haletant dans sa première partie. La seconde se révèle moins prenante en raison de trop nombreux rebondissements parfois improbables, à l’image d’une longue traversée dans les eaux tumultueuses d’une rivière jonchée de cadavres, qu’il faut enjamber pour regagner la rive. Mais cette œuvre très personnelle n’en reste pas moins un grand film.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 15 janvier.

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  • Grand écran: "Seules les bêtes", un polar rural inquiétant, tortueux et mystérieux

    CHANSON-4_960x500_acf_cropped.jpgUne femme disparaît. Le lendemain d’une tempête de neige, sa voiture est retrouvée sur une route conduisant au plateau où subsistent quelques fermes isolées. Les gendarmes n'ont aucune piste, mais cinq personnes sont liées à cette disparition. Chacune a son secret, mais personne ne se doute que cette histoire a commencé́ loin de cette froide montagne venteuse, sur un continent où la chaleur règne. Mais où certains se débrouillent pour rendre la pauvreté moins pénible au soleil…

    Vingt ans après Harry, un ami qui vous veut du bien, où il nous emportait par son art de la manipulation et de la perversion, Dominik Moll, confirmant son talent de conteur et de metteur en scène, récidive dans le genre avec Seules les bêtes, adapté du roman éponyme de Colin Niel et chapitré selon les prénoms des cinq personnages. 

    Dans ce polar rural noir, inquiétant et tortueux qui se mue petit à petit en drame psycho-pathétique, Il livre un récit troublant, aussi mystérieux, complexe et fascinant que ses personnages en quête de bonheur, mais aux curieuses motivations. Qu’il s’agisse du paysan collé à son ordinateur ou souffrant d’abandon, de la bourgeoise évanouie dans la nature ou de la jeune fille se remettant d'une peine de cœur dans les bras de cette dernière (photo).

    Cette glaçante, grinçante et énigmatique intrigue avance par couches et indices successifs, le cinéaste adoptant tour à tour les points de vue des personnages principaux. Du plateau de Causse enneigé, il nous emmène en Côte d’Ivoire où de jeunes hackers, les Brouteurs, piègent des hommes en mal d’amour en fabriquant de faux profils féminins pour leur piquer leur argent. Réaliste et convaincant, Dominik Moll explore la solitude contemporaine, les dégâts de la misère affective, en traitant de l’illusion aux effets dramatiques des réseaux sociaux sur des proies faciles.

    Si le sixième long métrage en forme de puzzle de Dominik Moll est une réussite, en dépit de retournements et d’un dénouement plus ou moins extravagants mais peu importe en l’occurrence, il le doit évidemment aussi à ses comédiens. Ils sont tous formidables à l’image de Denis Ménochet confondant de naïveté, de l’intense Laure Calamy, du taiseux Damien Bonnard, ou encore de la cruelle Valeria Bruni Tedeschi, bobo qui surprend par une dureté inhabituelle.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 8 décembre.

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  • Grand écran: "La Vérité" réunit pour la première fois Catherine Deneuve et Juliette Binoche

    LA_VERITE_01_mood-0cfc98a784c4.jpgAprès sa Palme d’or en 2018 pour Une affaire de famille, le Japonais Hirokazu Kore-eda s’est plus ou moins fourvoyé dans un tournage en français. Certes, il ne quitte pas son terrain favori des liens familiaux où il excelle en général, mais ce n’est pas le cas dans La Vérité. Un opus sentimental assez décevant au service d’une histoire anodine, où le talentueux réalisateur perd de son pouvoir dramatique et émotionnel en usant d’une langue qu’il maîtrise mal. 

    Dans ce nouveau long métrage qui avait fait l’ouverture de la Mostra de Venise en septembre dernier, il a choisi de développer les rapports complexes entre Fabienne, arrogante icône du cinéma français au caractère de chien et sa fille Lumir, personnage réservé, scénariste à New York. La publication des mémoires largement inventées de Fabienne qui se donne le beau rôle, ramène Lumir et sa famille dans la maison de son enfance.

    Mais les retrouvailles entre les deux femmes vont rapidement tourner à l’aigre entre non-dits, mensonges, rancunes inavouées et amours impossibles. Parallèlement, Fabienne tourne un film de science-fiction (séquences assez laborieuses) où, réduite à un rôle secondaire, le seul qu’on lui ait proposé, elle incarne la fille âgée d’une mère éternellement jeune.

    Au-delà de l'intrigue, l’idée de Kore-Eda était évidemment de mettre face-à-face Deneuve et Binoche qui n’avaient jamais joué ensemble. Le duel est pourtant inégal. Dans son rôle de star vieillissante, méchante, sarcastique, égocentrique et vaniteuse, la grande Catherine domine les débats. Même si elle n’est pas à son meilleur, elle laisse Juliette en retrait. Quant aux autres acteurs, ils doivent se contenter de servir la reine. A commencer par le malheureux Ethan Hawke en ingrat et inutile mari américain de Binoche. Véritable pièce rapportée, il ne fait qu'errer dans le film comme une âme en peine.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 25 décembre.

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