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Sorties de la Semaine - Page 313

  • Cinéma: Martin Provost fait revivre Violette Leduc. Une réussite

    5229c1058e3fb[1].jpgPendant la Deuxième Guerre mondiale, Violette Leduc fait du marché noir. Rien alors ne destinait cette femme, née bâtarde 35 ans auparavant et morte en 1972, à une carrière littéraire. Réfugiée en Basse-Normandie, elle vit avec l’écrivain homosexuel Maurice Sachs, qu’elle aime sans être payée de retour, et publie des articles dans les journaux. 

    Sur ses conseils, elle commence à écrire ses souvenirs d’enfance et remet le manuscrit à Simone de Beauvoir, dont elle tombe immédiatement amoureuse. Une passion non partagée. Mais la célèbre philosophe et essayiste est convaincue, en dépit du flop initial de Violette Leduc avec L’Asphyxie, d’avoir découvert un écrivain hors norme chez celle qu’elle appelait la femme laide. Elle l’exhorte, sinon lui ordonne de continuer à travailler. Et l’aidera toute sa vie, préfaçant La bâtarde, son premier succès. 

    C’est entre ces livres que se déroule le film. Très réussi, il évoque à la fois cette relation entre les deux femmes basée sur l’écriture et le combat que Violette Leduc, écorchée vive, souffrant d’avoir été reniée à sa venue au monde, mène contre elle-même pour s‘en sortir.

    Magnifiquement interprété par Emmanuelle Devos (Violette) Sandrine Kiberlain ( Simone de Beauvoir) entourée d’une brochette d’excellents acteurs comme Catherine Hiegel, Olivier Goumet, Jaques Bonnaffé, Olivier Py, il est signé Matin Provost (photo), auteur il y a cinq ans de Séraphine. Il racontait l’histoire d’une peintre autodidacte visionnaire, femme de ménage chez un marchand d’art allemand et morte à 78 ans dans un asile psychiatrique. Le réalisateur a coécrit à la même période Violette, avec son biographe René de Ceccaty qui lui a fait découvrir la talentueuse romancière.

    Martin+Provost+NhNQG1MVE6Km[1].jpgAprès ces deux portraits de femmes très à l’avant-garde dans leur époque, Martin Provost en imagine un troisième. "Peut-être une musicienne, je cherche encore", nous a-t-il confié lors d’un récent passage à Genève.

    – Qu’est-ce qui vous fascine tant chez Séraphine de Senlis et Violette Leduc, héroïnes oubliées du grand public?

    -Je ne suis pas vraiment fasciné. Je veux surtout montrer que des êtres humains en marge, des femmes, ont œuvré, même dans l’ombre,  pour évolution de l’art. Violette est la première à avoir pratiqué ce que l’on appelle aujourd’hui l’autofiction la première à s’exprimer ouvertement sur  l’homosexualité féminine, à décrire un pénis avec des mots extraordinaires.

    -Vous semblez d’ailleurs parler de vous à travers Violette Leduc.

    -C’est vrai. Comme j’ai traversé des années difficiles, il y a une identification forte. Je suis arrivé très jeune à Paris avec ma valise. J’ai vécu dans une chambre de bonne. J’aurais pu être délinquant. Mais j’ai eu de la chance. Je pense que la richesse de Violette, c’est d’avoir été bâtarde et rejetée. Je suis également quelqu’un de très féminin. J’ai été élevé par des femmes. Ce que je suis me vient de ma mère, dotée d’un formidable potentiel, mais une artiste frustrée. J’ai réalisé ce qu’elle n’a pas osé faire. A cause de mon père. C’est du moins ce qu’elle disait.

    -Comment avez-vous choisi vos deux comédiennes principales?

    -J’ai écrit le rôle de Violette pour Emmanuelle Devos comme j’avais destiné celui de Séraphine à Yolande Moreau. Emmanuelle a accepté de s’enlaidir, de mettre un nez postiche. C’est aussi elle qui m’a suggéré Sandrine Kiberlain pour jouer Simone de Beauvoir. Beaucoup d’actrices refusent de l’incarner par crainte de ne pas être à la hauteur. Pas Sandrine. Elle était déterminée et y est allée à fond.

    Film à l'affiche dans les salles romandes, dès mercredi 6 octobre.

     

     

     

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  • Cinéma: "Quai d'Orsay", dans les coulisses de la diplomatie fraçaise

    b00889f2-5a50-11e2-922f-0c1a40f503f3-493x328[1].jpgTombé sous le charme de la BD éponyme de d’Abel Lanzac et Christophe et Blain, Bertrand Tavernier signe sa première satire politique avec Quai d’Orsay, adapté du premier tome. Le jeune Arthur Vlaminck est engagé au service du ministre des Affaires étrangères Alexandre Taillard de Worms. Au contact de ce grand homme charmeur, survolté et virevoltant, il découvre, et nous avec lui, les coulisses de la diplomatie française.

    Diplômé de l’ENA, Arthur, brillamment interprété par Raphaël Personnaz, doit donc écrire les discours du maître des lieux, jusqu’au plus célèbre d’entre eux, celui contre la guerre en Irak, applaudi aux Nations-Unies le 14 février 2003. 

    La  tâche est dantesque dans la mesure où chaque mot est pesé dans des phrases remaniées à l'envi par le ministre jamais satisfait. Et où "la plume", humiliée plus souvent qu’à son tour doit on seulement remettre sans relâche son ouvrage méprisé sur le métier, mais également composer avec les susceptibilités, les hypocrisies, les coups fourrés et les ambitions de chacun, au sein d’une équipe constamment sous stress. 

    Cette comédie du pouvoir est emmenée tambour battant par un bluffant Thierry Lhermitte, qui ne craint ni l’outrance ni l’exubérance en enfilant le costume de l’extravagant, théâtral, séduisant et agaçant maître des lieux, inspiré par de Dominique de Villepin. Evitant de tomber dans le piège de l'imitation, mais se délectant à l’évidence de son personnage aux tics de langage, citant Héraclite et vouant une passion immodérée au Stabilo Boss jaune, il s’amuse comme un petit fou.

    Le contraste est saisissant entre son énergie débordante et la placidité de Niels Arestrup, excellent dans son rôle le de directeur de cabinet à la voix douce et traînante, tentant d’apaiser les tensions avec un détachement et calme qui confinent à l’apathie.

    Un film intelligent, tourbillonnant, bien maîtrisé, en dépit de son côté un peu caricatural. On regrette par ailleurs quelques scènes débordant du cadre en nous emmenant dans l’intimité de la "plume".   Alourdissant l’intrigue, elles parasitent inutilement un univers dingue, dont les protagonistes dévoués corps et âme à leur fonction vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sont censés n’avoir aucune vie privée. (Photo: Bertrand Tavernier au centre entre Thierry Lhermitte et Raphaël Personnaz).

    Film à l’affiche dans les salles romands dès mercredi 6 novembre.   

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  • Cinéma: "Inside Llewyn Davis", la virée folk des Coen à Greenwich Village

    the-title-character-of-inside-llewyn-davis-mdash-and-the-cat-thats-not-actually-his[1].jpgAvec Inside Llewyn Davis, les frères Coen opèrent une plongée dans le New York musical des sixties, avant Bob Dylan, pour évoquer une semaine de la vie d’un jeune chanteur folk. Habité par sa passion et ses rêves, il débarqué guitare à la main dans Big Apple pour tenter sa chance. Aide de quelques amis, il survit en se produisant à Greenwich Village et en acceptant n’importe quel job.

    Mais l’hiver est rude et les obstacles insurmontables pour le malheureux Llewyn, dont l’aventure commence par un douloureux passage à tabac. Galères, tribulations et désillusions se succédent pour notre loser errant de bars en clubs plus ou moins déserts, jusqu’à une improbable audition pour le géant de la musique Bud Grossman. Avant d’être rendu à son anonymat...

    A travers le portrait de cet homme, prétexte à un hommage nostalgique, émouvant, un peu triste, un rien déjanté mais très drôle, les Coen portent un regard critique sur un monde mercantile imperméable à la créativité et au talent. Tout en déclarant leur flamme à la musique en particulier et à l’art en général.

    Cette histoire originale, servie par une remarquable photographie, révèle par ailleurs un formidable acteur, Oscar Isaac, dans le rôle de ce musicien à la fois doué, pleurnichard, maladroit, insupportable par moments. Lui donnent la réplique Carey Mulligan et Justin Timberlake, qui a mis sa griffe musicale en retravaillant notamment quelques morceaux traditionnels. 

    Un chat nommé Ulysse

    A noter qu’à part eux, on trouve une autre star en la personne d’un chat roux nommé Ulysse qui ne cesse de s'enfuir, au grand dam de Llewyn qui s'escrime à le rechercher (photo). Un clin d’oeil joliment " homérique" pour cette odyssée américaine en forme de comédie burlesque, peuplée de personnages loufoques et aux dialogues souvent irrésistibles.

    Le tout sur fond de gags, de chansons, d’humour noir, d’introspection et de quête existentielle  pour le protagoniste principal au comportement autodestructeur. Rappelons qu'Inside Llewyn Davis, en compétition à Cannes en mai dernier, avait décroché le Grand Prix du jury vingt ans après la Palme d’Or remportée par les deux frères pour Barton Fink.

    Film à l'affiche dans les salles romandes dès mercredi 6 novembre.

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