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Sorties de la Semaine - Page 206

  • Grand écran: Xavier Dolan bouleverse, fascine et exaspère dans "Juste la fin du monde"

    axavierd.jpgPour son septième film, qui a décroché le Grand Prix du jury en mai dernier à Cannes, le réalisateur québecois a choisi d’adapter une pièce de Jean-Luc Lagarce, dont il apprécie la beauté du texte et de la langue. Jeune auteur à succès, homosexuel intello plein de douceur, Louis n’a pas revu sa mère, sa sœur et son frère depuis 12 ans. Gravement malade, il revient chez les siens pour leur annoncer sa mort prochaine. Et ne cessera de chercher le bon moment pour le faire. Mais très sensible à l’extrême tension que sa visite provoque, il recule à chaque fois face à ces gens qui le noient sous les reproches, l’accablent de leur amertume et de leur rancœur. De leur amour aussi.

    Juste la fin du monde est un huis-clos théâtral familial asphyxiant, à la fois bouleversant et exaspérant, où tout le monde a envie de déballer ce qu’il a sur le cœur, mais où chacun crie, pleure, s’engueule, balance des vannes, ment, pour éviter, dans une fuite en avant logorrhéique, de parler de l’essentiel. A savoir de la raison du retour de Louis qui les tourmente.

    Xavier Dolan propose une mise en scène virtuose privilégiant les gros plans pour se rapprocher des visages de manière à en saisir les expressions les plus révélatrices. L’histoire passe en effet aussi par les silences, les regards, le moindre mouvement d’une bouche exprimant les non-dits. Les comédiens sont ainsi placés sous une sorte de microscope, la caméra jouant avec eux dans une tentative de capter le moindre souffle.

    Gaspard Ulliel se révèle excellent dans le rôle de Louis. L’opus est porté par quatre autres stars françaises aux prestations en revanche inégales. Nathalie Baye (la mère Martine), perruque noire et maquillage outrancier et Vincent Cassel (son frère Antoine) en font des tonnes dans une hystérie galopante. Lea Seydoux (sa sœur Suzanne qu’il n’a pas vu grandir) n’est pas moins irritante.

    En revanche, à l'image d'Ulliel, Marion Cotillard (sa belle-sœur Catherine que Louis ne connaissait pas) séduit. Dans ses hésitations, son bégaiement, sa gentillesse et sa compassion à l’égard de Louis dont elle a tout de suite compris le secret, on l’a rarement vue aussi bonne et aussi différente.

    "C'est mon meilleur film"

    A l’issue de la projection cannoise pour les journalistes, Xavier Dolan s’était montré un peu blessé par les critiques négatives, mais disait son bonheur d'être sur la Croisette. "je suis fier de mon film. J’estime que c’est mon meilleur", avouait-t-il à la conférence de presse. De leur côté, ses comédiens ne tarissaient pas d’éloges sur leur réalisateur, s’accordant à évoquer une rencontre passionnante avec un homme hors norme, proche d’eux, les mettant sous un microscope, jouant avec eux, donnant tout, essayant de capter le moindre souffle.

    Xavier Dolan aime la prolixité des personnages qui parlent de tout sauf de ce qu’ils savent. "Louis réagit à la nervosité, à l’ambiance. On s’évade à travers lui, grâce aux regards échangés avec Catherine. Il est en escapade perpétuelle dans une maison où sa famille le noie sous les reproches. Le plus attrayant, c’est son côté désagréable. Dans la vie on pleure, on explose, on ment. Je suis content d’avoir pu travailler avec des acteurs que j’admire pour exprimer cette imperfection humaine".

    Le réalisateur s’explique aussi sur l’utilisation des gros plan quasi constants. "Pour moi, c’était une nécessité de me rapprocher des visages qui reflètent la tension. L’histoire passe par les silences, les regards, le moindre mouvement d’une bouche exprimant les non-dits".

    A 'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 21 septembre.

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  • Grand écran: "Clash" évoque l'Egypte à travers un huis-clos étouffant en forme de thriller

    aclash.jpgAu lendemain de la destitution du président islamiste Morsi, deux ans après l’échec de la révolution égyptienne, de violentes émeutes éclatent au Caire. Un journaliste égypto-américain et son photographe, considérés comme des traîtres sont embarqués dans un fourgon de police.

    Ils sont aussitôt suivis par des dizaines de manifestants aux convictions politiques et religieuses diverses. Des sympathisants des Frères musulmans, des modérés, un chrétien, des femmes sont ainsi forcés de cohabiter dans cet espace restreint et forcés de surmonter leurs divisions pour tenter de survivre. A la fin le fourgon est pris dans une grande manifestation chaotique, où il est difficile de définir le camp des protestataires.

    Du coup, alors qu’ils luttent depuis le début pour sortir du fourgon se déplaçant dans une ville à feu et à sang, les prisonniers du panier à salade se rapprochent et veulent rester à l’intérieur, face à la folie meurtrière qui se déroule à l’extérieur. On ne sait pas dès lors ce qui va leur arriver. Tout en se doutant que l’issue ne devrait pas être des plus favorables.

    Clash est signé du réalisateur Mohamed Diab, dont le travail pointe les problèmes de la société égyptienne et dont le premier long-métrage Les femmes du bus 678 évoquait le combat de trois femmes cairotes contre le machisme et le harcèlement sexuel. Il avait fortement déplu à la censure égyptienne. Cela n'a pas empêché son auteur de faire l’ouverture de la section cannoise Un certain regard, sans que son oeuvre ait été préalablement montrée à la dite censure.

    Symbolique et centré sur l'humain

    Durant l’entier de cet opus centré sur l’humain, on ne quitte pas la fourgonnette et ses occupants. Ce huis-clos dantesque mélangeant plusieurs visages, reflet des colères, des peurs, des angoisses, des incertitudes, des espoirs d’un peuple, est symbolique d’un pays sous la botte des militaires et s’enfonçant dans la répression de toute opposition islamiste et laïque.  

    Eprouvant, étouffant, ce thriller parabolique se veut haletant, percutant, efficace. Mais au-delà d’une réussite technique, de quelques scènes impressionnantes, on retiendra surtout le courage politique de l’auteur, son honnêteté, sa volonté d‘impartialité et d’absence de manichéisme.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 14 septembre.

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  • Grand écran: "Un juif pour l'exemple" revisite le livre polémique de Jacques Chessex

    ajuifec.jpgEn 1942, Payerne est le théâtre d’un meurtre immonde. Celui d’Arthur Bloch (Bruno Ganz, photo), un marchand de bétail juif sexagénaire, massacré par une bande de nazillons débiles sous l’influence du pasteur Lugrin et du «gauleiter» local, le minable garagiste Fernand Ischi.

    Avec une vingtaine d’autres Payernois au front bas qui ont fait allégeance au parti nazi, il veut offrir un juif mort en cadeau à Hitler, son idole dont on va bientôt fêter l’anniversaire. Sous prétexte de vendre une vache à Bloch lors de la foire aux bestiaux, cinq d’entre eux l’attirent dans une grange l’assassinent, le dépècent comme un cochon, répartissent les morceaux dans des boilles qu’ils vont jeter au lac.

    Le film du Genevois Jacob Berger est adapté du livre éponyme de Jacques Chessex. Enfant au moment des faits, l’écrivain était revenu en 2009 sur cet événement tragique qui l’a marqué à jamais, décrivant l’abomination en stigmatisant la ville de charcutiers «confite dans la vanité et le saindoux». La publication de l’ouvrage a déclenché une impressionnante levée de boucliers. Et une détestation dont l’auteur a beaucoup souffert. Il est pour ainsi dire mort sur scène cette année-là, vivement interpelé par un détracteur alors qu’il défendait Roman Polanski.

    Un Juif pour l’exemple est un thème puissant, qui résonne avec ce qui se passe aujourd’hui, bien que Jacob Berger, dont on salue le travail de mémoire, ne cherche pas la dénonciation. Mais la grandeur du propos ne fait pas automatiquement la force d’un film et son auteur peine un peu à convaincre dans sa façon de réinventer Chessex. Il n’est pas toujours à la hauteur de son sujet dans sa réalisation, en dépit de scènes impressionnantes dans leur brutalité, heureusement contenue à l’image, comme l’effroyable équarrissage d’Arthur Bloch.

    Un bémol par ailleurs sur le télescopage certes assumé des époques, voitures ou uniformes modernes, ou Chessex à la fois enfant et vieillard. Mais ce qui cloche surtout c’est la mauvaise prestation des comédiens. A part peut-être André Wilms dans le rôle de l’écrivain.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 14 septembre.

     

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