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  • Grand écran: "Grosse Freiheit", la vie volée d'un rebelle gay en quête d’amour

    Le réalisateur autrichien Sebastian Meise raconte l’histoire de Hans Hoffman dans l'Allemagne d'après-guerre, à l’époque où l’amour est traité comme un crime. Son héros est gay et l’homosexualité, illégale dans le pays jusqu’en 1969, est condamnée selon le redoutable article 175 du code pénal.

    Comme Hans (Franz Rogowski), personnage sacrificiel au destin tragique, d’autres homosexuels sont passés directement des camps de concentration à la prison. A peine sorti de taule le malheureux Hans ne cesse d’être repris en flagrant délit d’actes interdits et renvoyé dans le quartier haute sécurité du même établissement.Entre bagarres dans la cour et nuits au mitard, il s’obstine à rechercher la liberté et l’amour dans ce lieu devenu une métaphore de sa vie.

    Le second long métrage de Sebastian Meise commence par des films d’archives où des hommes se rencontrent dans des pissotières. Il pourrait s’agir de souvenirs. Mais en réalité ce sont des pièces à conviction, permettant la persécution autorisée et abjecte de ces hommes traqués, qui se retrouvent derrière les barreaux.

    Remarquable Hans Rogowski 

    Trois dates, 1968, 1945 et 1957, ponctuent ce film physique, austère, radical, mais non dénué de romanesque. Evoquant l’ignominie de vies volées, il se passe pratiquement entièrement entre les murs gris du pénitencier. On y retrouve les mêmes individus à différents âges, passant leur temps dans l’atelier de couture pour confectionner, selon les époques, des bleus de travail ou des draps roses.

    Le personnage récurrent de ces trois périodes historiques c’est Viktor, qui purge une peine à perpétuité pour meurtre et passe pour un homophobe convaincu. Inlassable rebelle sans cesse puni, c’est pourtant avec ce criminel endurci mais capable de compassion qu’Hans poursuit une relation amicale, parfois intime et parfois violente. De talentueux comédiens portent cette quête intense et incertaine de liberté, à commencer par le remarquable Franz Rogowski dans le rôle du naïf et romantique Hans.

    Grosse Freiheit, avait été longuement ovationné en julllet dernier à Cannes, où il avait été sélectionné dans Un certain regard. 

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 16 février.

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  • Grand écran: dans "Un autre monde", Stéphane Brizé retrouve un Vincent Lindon impérial

    Après La loi du marché en 2015 et En guerre en 2018, Stéphane Brizé boucle, avec Un autre monde,  sa trilogie sur l’univers du travail et son impact sur la vie privée.  Dans son nouveau film, il a encore  fait appel à son acteur fétiche Vincent Lindon. Après s’être glissé dans la peau d’un surveillant de grand magasin et d’un leader syndical, le comédien incarne cette fois un  cadre d'une filiale industrielle américaine en France. 

    Performant,  intelligent, expérimenté, Philippe Lemesle commence à perdre pied sous une double pression professionnelle et familiale. Hier dirigeant, il devient exécutant. L’obligation d’élaborer un énième plan social pour dégraisser les effectifs, qui lui demande des efforts supplémentaires, met son couple en échec. Sa femme (Sandrine Kiberlain) demande le divorce, lui reprochant  de la négliger toujours davantage au profit de son boulot auquel il se dévoue corps et âme.  

    Violence et ravages du management entrepreneurial

    Dans ce drame social très réaliste, sous tension générée par les désaccords au bureau et à la maison, démontrant l’extrême perméabilité entre le professionnel et le personnel, Stéphane Brizé pointe à nouveau, sans manichéisme,  la violence, le dévoiement et les ravages du management entrepreneurial. Tout en en brossant avec sobriété le portrait d’un homme tiraillé entre sa loyauté envers ses subordonnés et la demande de ses employeurs qui s’opposent  à ses convictions. En plein dilemme moral face à l'inacceptable, Il tente peu à peu de résister. Il y a là comme un espoir. 

    A son habitude Vincent Lindon  est formidable dans ce personnage se retrouvant seul, cachant ses sentiments, sa sensibilité sociale, se posant des questions éthiques, cherchant désespérément des solutions et un sens à sa vie. De son côté, Sandrine Kiberlain est comme toujours parfaite dans cette épouse fatiguée d’être mariée à l'entreprise... 

    Excellente Marie Drucker

    On découvre par ailleurs Marie Drucker, ex-star du petit écran dans son premier rôle. Directrice de l’unité France, elle excelle dans son rôle de patronne froide, dure, tranchante, bras armé du groupe américain et chargée de faire appliquer le plan social.   

    Rencontré à Genève, Stéphane Brizé nous en dit plus sur ce film né pendant En guerre et plus précisément des confrontations entre les syndicats, l’Etat et les cadres prônant la fermeture de la société. Il évoque bien sûr sa cinquième collaboration avec Vincent Lindon. "Elle se passe de façon intense, bienveillante et honnête. On s’autorise  à interroger l’instant,  même si cela remet en cause des séquences entières". 

    Les trois films évoquant le monde du travail, on parle naturellement d’une trilogie. Validez-vous le terme? 

    Je n’y ai pas pensé quand j’ai réalisé La loi du marché. "Aujourd’hui ça fait trilogie, mais en réalité si chaque film est construit sur le précédent, ils sont indépendants les uns des autres.  On peut les voir dans les deux sens avec En guerre au milieu. Et si les  trois montrent les conséquences des destructions d’emplois sur des vies ou des rapports humains, avec le dernier, j’avais envie de sortir de la dialectique réductrice des gentils ouvriers et des méchants cadres pour explorer plus profondément un système implacable et son dysfonctionnement. 

    Pourquoi faire de Vincent Lindon un cadre, cette-fois-ci ?

    Après deux longs métrages où je m’intéressais aux plus faibles, j’ai voulu retourner la caméra vers ceux qui les fragilisent, en me demandant s’ils se sentent si bien que ça avec les injonctions de leur hiérarchie. Les problèmes et les tourments qu’elles provoquent chez  Philippe Lemesle, prouvent que ce n’est pas le cas. Au contraire. Il ne croit plus à ce qu’il dit. Ces directives ont pour lui de moins en moins de signification. La seule qui a mon avis a une réponse ferme, c’est sa femme, plus courageuse, plus prompte à expliquer ce qui ne va pas et à prendre une décision difficile.   

    Ce n’est pourtant pas la première  fois qu’on demande à Philippe de mener un plan social.

    C’est vrai. L’ennui, c’est qu’on n’a cessé au fil des années de tirer sur les organismes, avec l’exigence de faire aussi bien sinon mieux avec moins de gens. Et si on avait trouvé des solutions, là, on arrive inévitablement à un point de rupture.

    Comme d’habitude votre film est très documenté.

    Mon travail c’est d’écrire des histoires. Il y a plein de clichés sur l’entreprise. La réalité est toute autre. Donc je vais interroger des gens qui vivent dans ce milieu, et j’en ai rencontré beaucoup. A partir  de là, je commence la fiction. 

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 16 février.

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  • Grand écran: "Mort sur le Nil", de et avec Kenneth Branagh, un mauvais Poirot

    Au cours d’une luxueuse croisière sur le Nil, ce qui devait être une lune de miel idyllique se conclut par la mort brutale de la mariée, la jeune et belle héritière Linnet  Ridgeway. Elle a piqué son fiancé Simon Doyle à sa meilleure amie Jacqueline de  Belfort, qui lui voue désormais une haine farouche. Ce crime sonne la fin des vacances pour le cultissime détective belge Hercule Poirot. A bord en tant que passager, il se voit confier l’enquête par le capitaine du bateau. 

    Et dans cette sombre affaire d’amour obsessionnel aux conséquences meurtrières, ce ne sont pas les suspects qui manquent, à commencer par l’inquiétante Jacqueline. Sauf qu’elle est la seule à avoir un solide alibi parmi les nombreuses personnes présentes, qui ont eux aussi des comptes à régler avec Linnet. S’ensuivent alors une série de rebondissements et de retournements de situation jusqu’à l’incroyable dénouement!

    Question fondamentale face à cette nouvelle adaptation de Mort sur le Nil, l’un des meilleurs policiers de la célèbre d’Agatha  Christie, publié en 1937. Pourquoi Kenneth Branagh a-t-il jugé utile de se lancer dans l’aventure ? Certes il ne s’agit que d’une deuxième version cinématographique après celle de John Guillermin en 1978 , contrairement aux nombreuses  vues au théâtre ou à la télévision. Mais au sortir de la projection, il est hélas clair que rien ou presque ne justifie cette mouture. Un gâchis de pellicule encore plus désolant que pour Le crime de l’Orient-Express, du même réalisateur il y a cinq ans.  

    Personnaliser ou moderniser une œuvre, pourquoi pas ? Sauf que Kenneth Branagh, derrière et devant la caméra, se montre particulièrement maladroit dans son entreprise. Non seulement il se montre absurdement infidèle au roman, ajoutant ou transformant notamment certains personnages, mais se révèle mauvais en campant un Poirot ridicule, faisant de cet homme fier de ses capacités intellectuelles une sorte d'homme d’action inadéquat. Par ailleurs, si Branagh nous gratifie de quelques paysages somptueux, on n’aime pas sa mise en scène tapageuse, artificielle, traînant en longueur avant de précipiter fâcheusement le dénouement, sacrifiant une sulfureuse atmosphère et un brin d'humour à un vulgaire et lourd étalage de luxe. 

    On retiendra curieusement le prologue, flashback en noir et blanc qui nous ramène en 1914, et où le jeune Poirot qui se bat dans les tranchées sauve ses camarades de la mort en utilisant déjà ses petites cellules grises. Ainsi que le prologue où on est censé découvrir l’origine de sa fameuse moustache. Ce qui nous fait une belle jambe...

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 9 janvier.

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