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  • Grand écran: avec "Il mio corpo", Michele Pennetta se penche sur le sort d'êtres rejetés, ignorés de tous

    Il Mio Corpo, du réalisateur italo-suisse Michele Pennetta, boucle une trilogie autour des migrants invisibles, commencée par A iucata en 2013 et Pescatori di corpi en 2016. Dans ce dernier volet, l'auteur se penche à nouveau sur le misérable sort des laissés-pour-compte, traitant son sujet de façon individuelle, avec deux êtres qui se répondent sans véritablement se rencontrer.    

    D’un côté il y a Oscar. Sous le chaud soleil de Sicile le jeune garçon récupère, avec son frère, de la ferraille dans des déchetteries sauvages et désertes, tandis que du haut du pont son père, personnage antipathique, violent, ivrogne et paresseux, exploitant  ses enfants sans vergogne, ne cesse de l’insulter, le traitant comme un moins que rien.

    De l’autre, on trouve Stanley, émigré nigérian qui a des papiers mais n'arrive pas à se défaire de son étiquette de clandestin. Ouvrier agricole trimant pour trois fois rien, , il vivote grâce aux petits travaux donnés par le prêtre de la paroisse. En apparence tout les sépare, sauf le sentiment d’être rejetés, ignorés de tous, obligés de subir, et le désir  d’une vie meilleure qui leur permettrait d’échapper à un destin choisi pour eux.  

    Dans une Sicile dont la lumière accentue la dureté, devenue une terre de migrants très isolée du continent, on est loin de la carte postale paradisiaque pour touristes. Comme le montrent la précarité d’Oscar et les siens entassés les uns sur les autres dans un taudis, subsistant au jour le jour, ainsi que les gros problèmes administratifs de Stanley, peinant à trouver un travail stable. 

    Pour autant, Michele Pennetta évite le misérabilisme et le cliché en décrivant le parcours de ces deux exclus sans pathos, complaisance ou sentimentalisme. Il y a du Ken Loach dans ce film poétique entre documentaire et fiction. Un genre hybride qui s’explique dans la mesure où les protagonistes existent vraiment et que l’auteur les a longuement suivis pour mieux s’imprégner de leur réalité. 

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 21 avril.

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  • Grand écran: ces "Petites danseuses" qui rêvent de devenir des étoiles

    Elles ont entre 6 et 11 ans et rêvent de devenir des danseuses étoiles. De briller au firmament d'un art alliant l’exploit physique, la performance artistique, la beauté du mouvement et la recherche constante de l’excellence. Extraordinairement motivées, elles vivent cet art exigeant une discipline de fer entre passion et ambition, s’y livrant sans relâche pour atteindre le graal. 

    Selon un schéma classique, la réalisatrice Anne-Claire Dolivet qui a la danse chevillée au corps depuis toujours, suit plus particulièrement quatre d’entre elles: Jeanne, la benjamine irrésistible, Olympe, espiègle et malicieuse, Marie et Ida, plus calmes et plus sages Après les avoir filmées et observées de loin, elle s’approche et s’invite dans leur routine quotidienne, à la maison, à l’école, dans la rue. 

    Toutes vont au lycée le matin et suivent, six après-midis par semaine, un cours dans le nord de Paris, sous la houlette de Muriel, professeure à la fois majestueuse, redoutable, tyrannique, affectueuse, pleine d'humour et de tendresse, qui fait office de coach intransigeant et de maman bienveillante. Et à qui le documentaire, dont elle est l’armature, la figure principale, rend un bel hommage.

    C’est avec elle que ces adorables et fragiles gamines,  étonnamment matures pour leur jeune âge, bien que la cinéaste tienne à conserver leur pureté et leur candeur, engagent un véritable parcours du combattant. Et elles en bavent, tout au long du chemin, où les répits sont rares entre les entraînements inlassablement répétés et les devoirs, qui doit les mener jusqu’à un important concours à Deauville.

    En immersion entre les "pliés, piqués, frottés, dégagés" clamés en musique par Muriel, on vit leurs joies lors de scènes émouvantes, mais aussi, à la faveur d’une larme, d’un regard triste, d’une moue, le doute, la désillusion, le découragement que leur vaut ce sport impitoyable. Où, en en dépit de la douleur, des contraintes, de  l’incroyable énergie déployée, de la fatigue, de la pression, de la dictature du poids, il faut sourire, encore et toujours pour laisser croire au spectateur que tout est facile et ne demande aucun effort. Il suffit de voir ces petits rats virevolter et s'envoler avec une grâce infinie, pour se l'imaginer. 

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 21 avril.

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  • Grand écran: "Le diable n'existe pas", plaidoyer contre la peine de mort et pour la liberté de conscience

    Avec la bienvenue réouverture des salles, certes avec une jauge très réduite, les films déboulent en nombre. Ce mercredi, ils sont onze à envahir les écrans de Suisse romande. Dans l'impossibilité de parler de tous, on commencera par "Le diable n'existe pas", qui avait décroché l'Ours d'or à Berlin en 2020.  Tourné clandestinement et censuré en Iran, il est signé du militant Mohammad Rasoulof. Deux fois condamné pour actes de propagande hostiles et atteinte la sécurité, interdit de quitter l’Iran, le réalisateur raconte l’histoire de quatre personnages aux destins liés.

    Poursuivant sans relâche son combat, il place ses personnages face à des questions éthiques et politiques autour de la liberté de conscience et de la peine de mort. Heshmat, la quarantaine passée,  est un mari et un père exemplaire mais personne ne sait où il se rend chaque matin.  Pouya, jeune conscrit, ne peut se résoudre à tuer un homme comme on lui ordonne de le faire. Javad, venu demander son amoureuse en mariage, est soudain prisonnier d’un dilemme cornélien. Bharam, médecin interdit d’exercer, a enfin décidé de révéler à sa nièce le secret de toute une vie. 

    Ce sont ces quatre récits qui structurent le métrage, avec la peine de mort et son impact sur les personnes, des hommes qui doivent servir de bourreaux, Détenteurs de la violence et du pouvoir de la mort, obligés de la donner, couverts par la loi, contraints par elle,  ils accomplissent dans la souffrance et la honte les tâches affreuses que les autorités leur assignent dans un régime despotique « Dire non, c’est détruire sa vie », déclare l’un des protagonistes, avant toutefois de décider de se battre pour échapper à cette horreur. 

    A cet égard la première histoire est terrifiante dans la démonstration du quotidien normal d’une famille comme une autre, avec des préoccupations banales. Jusqu’à ce que tout bascule dans une réalité tragique. Mais tout en filmant brillamment des personnages au bord de l’abîme,  privés d’une liberté destinées à les empêcher de réfléchir à leurs actes et à se révolter, Mohammad Rasoulof, n’en propose pas moins un film plein d’humanité et de poésie, se déroulant dans de superbes décors. 

    Il réserve également une belle place aux femmes, à la fois fortes et vulnérables dans cette oeuvre universelle. Il y aborde les différents thèmes qui traversent une société confrontée à des choix douloureux et qui nous pousse à la réflexion en ce qui concerne les nôtres. 

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