Steve Jobs disparu, on imaginait bien qu’un film sur sa vie ne tarderait pas à voir le jour. Le cinéma indépendant s'y est immédiatement attelé pour nous livrer la chose même pas deux ans après sa mort, survenue le 5 octobre 2011. Jobs est signé Joshua Michael Stern, qui s’est emparé du génie planétaire d’Apple pour nous livrer un biopic… sans génie hélas.
Il a confié au "geek" Ashton Kutcher (photo), comme il le revendique, le soin de se glisser dans la peau du grand homme dont il s'applique, après avoir regardé des centaines d'heures de vidéos sur lui, à reproduire la démarche, la gestuelle et la diction. Le réalisateur en rajoute d'ailleurs lourdement, histoire de nous montrer à quel point son protagoniste s’en tire bien…
En fait, on se demande quelle est la réelle utilité de l’opus. Sinon de prendre de court Hollywood en se consacrant le premier au parcours et à l’ascension extraordinaires de cet innovateur hors du commun, qui a révolutionné notre manière de vivre et de percevoir le monde. Sony planche en effet également sur le sujet avec Steve Wozniak, l’autre père de la marque à la pomme. Ce qui l’a poussé à émettre des réserves sur Jobs, où son personnage est interprété par Josh Gad.
C’est aussi le cas des critiques et du public aux Etats-Unis qui ont largement boudé le film à sa sortie. Joshua Michel Stern y retrace vingt ans de l’existence de Steve Jobs, de la création d’Apple dans un garage californien à son retour triomphant à la tête de l’entreprise qu’il avait créée avant d’en être écarté. Pour en faire un formidable succès.
L'homme derrière l'icône
Tout en glorifiant l’inventeur visionnaire, le cinéaste s’attache aussi à révéler l’homme derrière l’icône. Et en dresse un portrait peu flatteur, le dépeignant comme un personnage froid, dur avec ses collaborateurs, égocentrique, asocial. Fuyant également lâchement ses responsabilités si on se réfère à sa rupture avec sa petite amie enceinte et à son refus initial de reconnaître l’enfant.
Très bien tout ça, sauf que les choses s’arrêtent au moment de la relance d’Apple, avec la sortie de l’iPod en 2001. Laissant le spectateur sur sa faim en ce qui concerne les dernières avancées technologiques de la compagnie et la maladie de son géniteur. Pour cela il faudra attendre la biographie de Sony, basée sur le bouquin à succès de Walter Isaacson et dont on doit le scénario à Aaron Sorkin.
Ce dernier avait déjà écrit celui de The Social Network consacré à Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook et qui avait rapporté 200 millions de dollars. C’est dire si Jobs aura affaire à la plus rude des concurrences.
Film à l'affiche dans les salles romandes dès mercredi 21 août.
Selon le directeur artistique Carlo Chatrian, l’urgent, pour la prochaine édition, c’est de changer les chaises de la Piazza Grande! A mon humble avis, il serait plus pressant de se préoccuper d’une meilleure qualité des films, notamment en compétition. Par exemple pour primer un Léopard d’or réellement digne du précieux métal.
La seconde mention récompense Short Term 12 de l’Américain Destin Cretton, où la jeune Grace, s’occupant d’ados à problèmes, est rattrapée par sa propre enfance douloureuse. Sa protagoniste Brie Larson (photo) a par ailleurs été sacrée meilleure actrice. Côté masculin, le trophée a été remporté par le Mexicain Fernando Bacilio, qui porte sur ses épaules l’œuvre plutôt alambiquée des frères Daniel et Diego Vega.
Comme son prédécesseur Olivier Père, Carlo Chatrian a battu le rappel des stars et misé sur la rétrospective pour pimenter son édition. Bien lui en a pris, même si ce sont des arbres qui cachent la forêt. A l’image d’Otto Preminger l’an dernier, George Cukor, le maître de la comédie hollywoodienne, justifiait à lui seul le voyage au Tessin.
Et voilà, les jeux sont quasiment faits pour la course au Léopard d'or 2013. Il ne reste plus qu’un film taïwanais en compétition A Time in Quchi. De quoi espérer encore... Je parlais en effet du côté languissant de la compétition à une ou deux exceptions près, jusqu’à l’émouvante réussite de Tableau noir d’Yves Yersin. Depuis, le concours n’a pas franchement décollé, comptant hélas davantage de bas que de hauts.
Honorable également Mary Queen Of Scots, film en costumes du Suisse Thomas Imbach fasciné par cette figure historique. S’inspirant de Stephan Zweig, il revisite l’aventure tragique de celle dont l’ennemie mortelle, sa cousine Elisabeth, ordonna l’emprisonnement pendant dix-neuf ans avant de lui faire couper la tête. Le cinéaste qui procède par voie de lettres lues en voie off que Mary (Camille Rutherford, photo) écrit à sa rivale, compare les deux femmes à deux lionnes se battant pour le même trône. Le tout sur fond de guerres de religion renvoyant à ce qui se passe aujourd’hui.
Le choix de faire parler l’ex-terroriste a déplu au gouvernement tessinois mais a été bien applaudi par les critiques. Tout comme Educaçao Sentimental du Portugais Julio Bressane, un objet cinématographique pourtant assez plombant. Je lui préfère nettement E Agora? Lembra-me de son compatriote Joaquim Pinto (photo), dont je vous avais déjà parlé. Vivant depuis vingt ans avec le sida et l’hépatite C, il se livre à une réflexion sur la survie, l'amour et l'amitié à la fois douloureuse et pleine d'espoir.