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  • Grand écran: "Retour en Alexanndrie", mini road-trip introspectif avec Nadine Labaki et Fanny Ardant

    Partie d’Égypte, Sue (Nadine Labaki) est installée en Suisse depuis vingt ans. Elle a décidé de rompre tout lien avec sa mère, Fairouz (Fanny Ardant), une aristocrate excentrique, volontiers arrogante et humiliante. Les deux femmes ne se sont donc jamais revues, mais en apprenant que Fairouz a été victime d’une attaque, Sue décide de retourner dans son pays natal pour la revoir.

    Sue entreprend alors un voyage qui la mènera du Caire à Alexandrie, entre hier et aujourd’hui. Confrontée aux fantômes du passé, aux blessures d’enfance qu’elle a tenté d’oublier, elle fera aussi de singulières rencontres, dévoilant une sorte de malaise. Dans ce surprenant mini road-trip à l’esthétique queer, empreint de nostalgie, Sue renoue avec ses racines et surtout avec elle-même.

    Porté par Nadine Labaki (actrice, mais aussi réalisatrice de Caramel et Capharnaüm) aux côtés de Fanny Ardant, Retour en Alexandrie est le premier long métrage de Tamer Ruggli. Moitié Égyptien et moitié Suisse, le cinéaste de 37 ans a passé une maturité artistique à Zurich, avant de suivre des cours à l’ECAL, à Lausanne, et de réaliser quatre courts métrages dont son très remarqué film de diplôme, Capuccino.

    Retour aux sources

    «Je me suis inspiré d’une histoire de famille, de mes souvenirs personnels en Égypte et de la relation compliquée de ma mère avec la sienne», nous raconte l’auteur. «Sue a développé un rapport d’amour-haine avec son pays. Elle s’est échappée pendant des années pour se créer une autre vie, mais elle n’a pas complètement réussi. Elle revient alors aux sources pour tourner la page. Dès son arrivée pourtant, elle est happée, séduite par tout ce qu’elle a voulu fuir, mais qui a néanmoins contribué à la construire.»

    Un mot sur les comédiennes? «J’ai eu la chance de travailler avec Nadine Labaki et Fanny Ardant. Nadine, que j’ai directement contactée grâce à un ami ami libanais, a tout de suite accepté. Quant à Fanny, c’est une passionnée de cinéma. Comme Catherine Deneuve, elle aime aider les réalisateurs débutants..Elle a adoré le scénario. Pour moi, elle représente cette surféminité, cette élégance intemporelle. Elle ressemble aux femmes de ma famille.»

    Tamer Ruggli, qui a mis dix ans à boucler cette première œuvre, s’est lancé entre-temps dans deux autres projets. «Les deux traitent de l’homosexualité, l’un dans le monde arabe et l’autre en Italie et en Suisse. J’espère commencer à tourner en 2025.»

    "Retour en Alexandrie", à l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 31 janvier.

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  • Grand écran: dans "Zone Of Interest", Jonathan Glazer filme l'horreur de la Shoah sans jamais la montrer. Absolument glaçant blogspirit

    Le titre s’efface lentement pour laisser place, pendant de longues minutes, à un écran noir. Des sons organiques, oppressants.  Et puis la lumière, le soleil, le gazouillis des oiseaux, les joies de la baignade dans la rivière. C’est dans ce décor bucolique qu’on découvre le commandant d’Auschwitz Rudolf Höss, sa femme Hedwig et leurs cinq enfants. 

    Entre pique-nique, pêche à la ligne et balades à cheval, ils mènent une vie idyllique dans leur jolie maison avec vastes jardins fleuris, grande serre et piscine. Mais juste derrière le mur, il y a le pire camp de la mort. Le film, tourné sur place, suit ainsi le quotidien des Höss, petits bourgeois épouvantablement médiocres et ordinaires. 

    Deviner, imaginer, n’est que plus effroyable

    La banalité du mal à l’œuvre. Pour The Zone Of Interest (les 40 kilomètres entourant Auschwitz-Birkenau), adaptation libre du roman de Martin Amis, le Britannique Jonathan Glazer a obtenu le Grand Prix à Cannes l’an dernier. Il a choisi le hors-champ pour raconter l’horreur de la Shoah sans la montrer. 

    Mais il ne nous laisse jamais l’oublier, grâce à la bande-son (musiques composées par  Mica Levi), contrepoint saisissant aux images champêtres. Si on voit de loin le haut des toits des baraquements, la fumée s’échapper, on entend surtout les cris étouffés des prisonniers, les vociférations de leurs tortionnaires, le bruit des trains, des coups de feu, des chiens qui aboient. 

    Deviner, imaginer cette violence indicible n’est que plus effroyable, le film se concentrant sur des scènes de famille, l’école, le ménage, les soucis de Monsieur (Christian Friedel). Fonctionnaire obéissant et zélé qui a vraiment dirigé le camp, il est notamment obsédé par le rendement des fours crématoires.

    Des détails sinistres 

    Et il y a ces détails sinistres. Volontairement ignorante, comme sa progéniture, des atrocités à sa porte, Madame, autoproclamée reine d’Auschwitz (Sandra Hüller), essaie un manteau de fourrure apporté par un domestique juif. Elle fait la moue. L’ourlet est déchiré...

    Elle trie aussi quelques vêtements volés à des détenues, s’amuse en prenant le thé avec des amies, de la découverte d'un diamant si «ingénieusement» dissimulé dans un tube de dentifrice. Tandis que de l’autre côté du mur qu’on ne franchira pas, des milliers de Juifs meurent dans d’horribles souffrances, leurs cendres servant à faire encore mieux pousser les magnifiques fleurs devant lesquelles s’extasie Hedwig, son bébé dans les bras. Elle aime tellement son confortable chez-soi qu’elle refusera de suivre son mari à Berlin, après une promotion.   

    On retiendra enfin deux scènes tournées en vision nocturne, où une fillette sème de la nourriture sur les chantiers où les prisonniers sont obligés de travailler comme des forcenés. Un trait d’humanité déchirant qui contribue à rendre l’ensemble absolument glaçant. Mais aussi immensément nécessaire.  

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 31 janvier. 

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  • Grand écran: "La Couleur pourpre", dur combat d'une femme saccagée, sauvée par sa résilience et son courage

    En 1986, Steven Spielberg faisait pleurer la planète avec La Couleur pourpre., captivante et fidèle adaptation du roman d'Alice Walker, première femme afro-américaine à être couronnée par le célèbre Prix Pulitzer. En 2005, le livre devient une comédie musicale à Broadway. La version 2024 en est la transposition sur grand écran, mise en scène par  Blitz Bazawule  Emmenée par Fantasia Barrino (Celie), elle-mêle chant et danse aux dialogues.  

    On connaît l’intrigue. Celie Harris est une jeune noire vivant dans le sud américain ségrégationniste en 1900. Abusée par son père, privée de ses enfants à leur naissance, elle est mariée de force à  « Monsieur », un fermier d’une rare brutalité qui va la séparer sadiquement de Nettie, sa sœur adorée. Sur quarante ans, on suit le déchirant combat de Célie face aux violences physiques, sexuelles et aux pires humiliations que ce barbare lui fait subir. Elle finira par se révolter.

    Absence de pudeur et étalage de bons sentiments

    On peut être séduit par le spectacle flamboyant, la mise en scène enlevée, les performances des artistes et leur interprétation. Mais ce visuel clinquant, les beaux costumes, les chorégraphies brillantes et joyeuses nuisent à la force d’un récit noir et cruel. En fait, bien que misant sur les luttes et la solidarité féminines, cette comédie musicale proprette,  remake somme tout inutile, ne rend pas compte de l’aspect dramatique de cette tragique histoire. 

    La Couleur pourpre 2024 tend ainsi à gommer la misère et la dureté sociales qu’avait si bien réussi à nous faire ressentir Spielberg. A l'image de l’excellente Whoopi Goldberg, bouleversante et inégalable dans le rôle de cette femme saccagée,  qui s’en sortira à force de résilience, de courage et d’énergie. On regrettera par ailleurs une absence de pudeur et un étalage éprouvant de bons sentiments. 

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercvredi 24 janvier. 

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