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  • Grand écran: Christophe Honoré bouleverse avec "Plaire, aimer et courir vite"

    4745491.jpg-r_1280_720-f_jpg-q_x-xxyxx.jpgEn compétition récemment à Cannes, Christophe Honoré, à l’image de tous les concurrents français, est reparti les mains vides. Dommage pour le bouleversant Plaire, aimer et courir vite, porté par le craquant Vincent Lacoste. De tous les plans, le comédien est comme toujours formidable de naturel et de justesse dans un univers qu’il découvrait. A ses côtés, Pierre Deladonchamps (photo), se révèle pareillement convaincant.

    S’il est beaucoup question de sexe, l’auteur privilégie à son habitude la pudeur, la délicatesse des sentiments dans cette belle et bouleversante romance gay, condamnée dans les années 90, mais pleine de grâce, de vitalité et de légèreté.

    1993. Arthur (Vincent Lacoste), un étudiant de Rennes (comme le réalisateur avant lui) rêve de monter dans la capitale pour faire du cinéma. Il voit sa vie basculer lorsqu’il rencontre par hasard dans une salle obscure Jacques (Pierre Deladonchamps), un dramaturge parisien malade du sida. Les deux héros vont se plaire, s’aimer et courir vite. Les jours de Jacques sont comptés. Pour autant, il ne s’agit pas d’un coup de foudre. Les amants sont souvent séparés éloignés l’un de l’autre par d’autres histoires. De cœur ou de cul.

    Une comparaison qui énerve le réalisateur

    Comme le film évoque le sida ravageur des années 90, la tentation est forte de tirer un parallèle avec 120 battements par minute de Robin Campillo, Grand prix du jury l’an dernier. Christophe Honoré peut le comprendre, mais la raison l'agace.

    «Ils ont l’air de se ressembler, mais en réalité ils sont opposés», relevait-il lors de la conférence de presse qu’il a donnée à Cannes. «Ce qui m’énerve c’est qu’on cherche à les rapprocher simplement parce qu’il y a de l’homosexualité dans l’air. Pourquoi ne pas relier par exemple Plaire, aimer et courir vite à Mektoub my Love qui se passe à la même période ? Pourquoi associer deux films à cause de l’identité sexuelle des protagonistes?»

    Le plus important, c’est l’aspect très personnel revendiqué du film, où Christophe Honoré a tenté de retrouver une émotion propre à sa jeunesse, tout en rendant hommage à une génération d’artistes fauchés avant 40 ans par la maladie. Il avoue avoir mis beaucoup de lui dans le rôle du père homosexuel joué par Pierre Deladonchamps et dans celui du jeune étudiant provincial incarné par Vincent Lacoste, cherchant sa voie à la fois professionnelle et sexuelle.

    «Cela fait un moment que je l’ai repéré et que je voulais l’inviter dans un de mes films. Je me souviens de cette phrase de Françoise Sagan : à force de parader on finit par avoir l’âme paradeuse. Je trouve que Vincent a l’âme paradeuse».

    «Que puis-je dire après ça, s’amuse l’intéressé. «C’est simple. Je suis un acteur et très fan des films de Christophe Honoré. Alors évidemment, quand on a la chance de recevoir une telle proposition d’un tel cinéaste, on n’hésite pas ».

    Auparavant, le comédien avait rappelé qu’il était justement venu au monde en 1993. «A part ma naissance, dont je me souviens très bien… je ne sais pas grand-chose de cette époque. Je n’ai pas d’images comme pour les hippies et les pattes d’éph’… »

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 23 mai.

     

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  • Festival de Cannes: Palme d'or au Japonais Kore-eda. Une autre, spéciale, a été créée pour Godard

    Festival-de-Cannes-2018-la-Palme-d-Or-remise-a-Hirokazu-Kore-eda-pour-Une-affaire-de-famille.jpgAu terme d'une cérémonie de clôture emmenée par Edouard Baer, le jury présidé par Cate Blanchett a rendu un verdict mêlant le banal au curieux. La Palme d’or de cette 71e édition féministo-politico-sociale a ainsi été remise à Une affaire de famille de Hirokazu Kore-Eda, qui n'atteint franchement pas des sommets dans l'oeuvre du Japonais. Le film raconte l’histoire d’une famille vivotant en volant dans les magasins et recueillant une fillette maltraitée. 

    Saluant "un artiste qui fait avancer le cinéma, qui a repoussé les limites, qui cherche sans arrêt à définir et redéfinir le cinéma", Cate Blanchett vêtue d’une spectaculaire robe noire avec un grand nœud rouge dans le dos, a par ailleurs décerné une Palme d’or aussi spéciale que surprenante à Jean-Luc Godard pour Le livre d’image, un montage fascinant d’archives, d’extraits de films, de photos, de reportages télévisés, de fragments textuels ou musicaux.

    Le Grand prix du jury est allé, un vrai plaisir, à Spike Lee, auteur du décoiffant BlaKkKlansman, charge cinglante d’un humour férocement militant contre le racisme, l'extrême droite et le président Donald Trump. Le film est basé sur l’histoire véridique d’un policier afro-américain de Colorado Springs qui avait infiltré le Ku Klux Klan avec un collègue juif au début des années 70. John David Washington et Adam Driver se révèlent irrésistibles. 

    Contrairement à ce qui se profilait comme une Palme annoncée, la Libanaise Nadine Labaki a dû se contenter, tant mieux, du prix du jury pour Capharnaüm, mélo tire-larmes brassant toutes les thématiques du moment, enfance maltraitée, sans-papiers, migrants en suivant un gamin des faubourgs de Beyrouth, génialement interprété au demeurant.

    Le choc Asia Argento et le show Benigni 

    Avant de donner le prix d’interprétation féminine, l’actrice italienne s'est lancée dans une déclaration véhémente. «En 1997, j’ai été violée par Harvey Weinstein Ce festival était sa chasse gardée. (...) Il ne sera plus le bienvenu  à Cannes ». La suite est inexplicable. C’est en effet la gémissante et fade Kazakhe Samal Yeslyamova qui a été sacrée meilleure actrice dans Ayka du Russe Sergey Dvortsevoy, le film le plus assommant de la compétition.

    Quant à Roberto Benigni, il a refait le show d’il y a 20 ans, où il avait serré dans ses bras Martin Scorsese après avoir remporté le Grand Prix pour La vie est belle. Il a ensuite remis celui d’interprétation masculine à Marcello Fonte, très convaincant lui en revanche, pour son rôle de toiletteur pour chiens concoctant une vengeance féroce dans Dogman, de l'Italien Matteo Garrone.

    Le Polonais Pawel Pawlikowski a décroché le prix de la mise en scène pour Cold War tandis que celui du scénario récompensait ex-aequo à Alice Rohrwacher pour l'attachant Heureux comme Lazzare et à Jafar Panahi pour le fastidieux 3 visages. Cate Blanchett a rendu hommage à l’Iranien interdit de Croisette, ainsi qu'au Russe Kirill Serebrennikov, dont le film Leto, plébiscité par la critique, n’a toutefois pas plu au jury. 

    C’est l’occasion de regretter l’absence au palmarès de notre préféré, Burning, du Sud -Coréen Lee Chang-dong. Ce superbe thriller lent et contemplatif explore des sentiments passionnels et pervers sur fond de jalousie, de rivalité et de différences de classe. Quant aux Français, ils ont tous été ignorés. Logique pour le calamiteux métrage d’Eva Husson Les filles du soleil. Mais dommage, en ce qui concerne Stéphane Brizé évoquant dans En guerre le combat des ouvriers pour sauver leur usine et pour Christophe Honoré qui nous a bouleversé avec Plaire, aimer et courir vite, poignante romance gay.

    000_14v2v7.jpgLa caméra d’or à Girl

    Girl de Lukas Dhont, déjà lauréat de la Queer Palm, a raflé la Caméra d'or distinguant le meilleur premier long-métrage. Un excellent choix du jury présidé par la Suissesse Ursula Meir pour cette œuvre sensible, subtile, pleine de grâce et d’émotion sur un garçon transgenre qui veut devenir ballerine. Et qui se lance à la fois dans l’apprentissage de la danse, art d’une rare exigence et le parcours hors norme du changement de sexe. Formidable, son acteur Victor Polster (photo), est de son côté reparti avec le prix d’interprétation dans Un Certain Regard.

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  • Festival de Cannes: "En guerre", avec un formidable Vincent Lindon prétendant à un nouveau sacre

    en_guerre_a.jpg«Je ne pense pas être assez bon pour composer un personnage. Je me demande simplement: si moi j’étais lui, qu’est-ce que je ferais ? Et j’incarne. C’est ce qui m’intéresse. Je ne sais pas interpréter des caractères trop loin de moi », explique Vincent Lindon, héros d’ «En guerre», le dernier Stéphane Brizé aligné en compétition.

    Plus qu’incarner, le comédien « est » Laurent Amédéo, porte-parole d’une intersyndicale luttant contre la fermeture brutale de son usine. Il nous emporte et nous bouleverse par son engagement, sa conviction, sa pugnacité, son sens de la morale, son plaidoyer poignant pour la justice et le respect dans ce très grand film qui a eu droit à une ovation de 15 minutes lors de sa présentation publique.

    Si on devrait pour le moins le retrouver au palmarès, Vincent Lindon peut largement prétendre à un deuxième prix d’interprétation, après une performance aussi remarquable, sinon davantage que celle qui l’a sacré meilleur acteur il y a trois ans pour « La loi du marché » du même Stéphane Brizé. On ne change pas une équipe qui gagne.

    La dimension humaine face à la dimension économique

    Une fois de plus, le réalisateur se penche sur un drame économique social en explorant, à travers le combat des employés, les mécanismes économiques qui mènent à des fermetures d’usine. Elles deviennent très conflictuelles dans la mesure où la colère des victimes désespérées se nourrit de l’humiliation et de l’injustice subies. Car en l’occurrence il ne s'agit pas de se débarrasser d’une affaire en déficit mais d’une usine rentable qui ne correspond pas aux visées des actionnaires en voulant toujours plus. Une situation loin d’être rare

    Opposant la dimension humaine à la dimension économique en nous montrant la disproportion colossale des forces en présence, Stéphane Brizé nous plonge immédiatement dans le bain avec l’annonce de la liquidation du site français devenu la filiale d’un groupe allemand. Et décrit le désespoir des 1100 salariés qui en feront les frais, alors qu’ils étaient en train de négocier pour sauver l’entreprise.

    «La réalité nourrit ma fiction»

    Laurent Amédéo dénonce violemment le mensonge des patrons, l’accord bafoué, les promesses non tenues. La grève est décidée, le ton monte, le conflit s’amplifie, les ouvriers crient toujours plus fort, sans arriver à se faire entendre du pouvoir qui les ignore, nie leur souffrance. Ou les divise pour mieux régner. C’est la guerre. Et comme toutes les guerres, celle-ci engendre des tragédies.

    Pour Stéphane Brizé, le désir de son film, «politique dans le sens étymologique du terme, je ne suis le porte-parole d’aucun parti, d’aucun syndicat», vient notamment de la fameuse affaire de la chemise déchirée du DRH d’Air France en 2016. « La réalité nourrit ma fiction qui vient à son tour éclairer le réel, en donner une idée. Le cinéma le permet, contrairement aux reportages télévisés, qui n’ont pas le temps de la nuance et ne peuvent que rapporter les faits avec quelques images, auxquelles on fait dire ce qu’on veut, un commentaire et des bouts d’interviews ».

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 16 mai.

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