Pendant six mois, Nicolas Philibert s’est immergé au siège de Radio France, qui abrite notamment France Inter, France Info, France Culture ou France Musique. Il propose son regard, à la fois bienveillant et ironique, qui va au-delà du media pour livrer La Maison de la radio, un film sur le son et ceux qui travaillent autour, l'écoute, l’échange, la circulation de la parole.
Récemment de passage à Genève, l’auteur du célèbre Etre et avoir a évoqué ce documentaire singulier et inédit plongeant dans les coulisses d'une véritable institution, et dont l’action se déroule sur une journée et une nuit, en nous offrant un imposant éventail d’émissions, de voix, de visages.
C’est extravagant de tourner un film sur un media qui se caractérise justement par l’absence d’images.
A première vue, il s’agit d’un projet contre nature, voire bébête. Mais en réalité, non. Il y a précisément là un véritable enjeu de cinéma pour tenter de sortir du paradoxe. J’ai alors réfléchi à ce que j’allais montrer, pourquoi, comment, jusqu’où je pouvais aller.
Comment les gens vous ont-ils reçu? Craignaient-ils de se dévoiler ou au contraire y ont-ils pris du plaisir?
Je ne force jamais les portes. Je filme ce qu’on veut bien me donner. Je suis un homme pudique. Si quelqu’un a des réticences, je n’insiste pas. J’ai essuyé les refus d’un animateur et de deux invités, sinon la plupart de ceux à qui je me suis adressé a accepté. Beaucoup connaissaient d’ailleurs mon travail et très vite nous avons établi une relation de confiance.
Ce documentaire se regarde comme une sorte de comédie.
Je l'ai voulu assez joyeux, pétillant avec des situations cocasses. Et des effets de montage qui sont censés provoquer le rire.
Vos interlocuteurs étaient-ils naturels ou avaient-ils une tendance à surjouer?
En dépit de mes efforts de discrétion, ils n’ont pas oublié la caméra. Mais leur comportement n’a en général pas changé. A mon avis, on découvre surtout des gens très investis dans leur travail, envers eux-mêmes et leurs auditeurs. Ils ne sont pas arrogants et capables d’humour. J’en profite pour préciser que je n’ai pas fait mon casting en fonction de leur notoriété.
On n'entrevoit effectivement Audrey Pulvar que l’espace d’une seconde... Il y a pourtant deux femmes qui apparaissent à plusieurs reprises.
C'est vrai. Mais c’est moi qui les ai sollicitées et pas le contraire. Il s’agit de Marie-Claude Rabot-Pinson qui travaille au journal de France Inter et de Marguerite Gateau qui réalise une fiction pour France Culture. Il me fallait des personnages récurrents et elles sont devenues indispensables en raison de leur forte personnalité.
Quelle a été votre plus grosse difficulté?
Le danger de présenter un catalogue, mon appétit de filmer en raison de la richesse et de la diversité du sujet. J’étais pris entre le désir d’en montrer toujours plus et l’idée que c’était un puits sans fonds. Je me suis aussi rendu compte que les contenus les plus forts comme une grosse actualité, printemps arabe, Fukushima, constituaient un piège. Si elle prend trop de place, on se perd et le documentaire devient autre.
Vous avez donc dû énormément couper .
Le montage dans un documentaire est une affaire de deuil. Non seulement il faut l'accepter, mais je suis plutôt sévère avec moi-même.
Nouveau film à l'affiche dans les salles romandes.
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