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le blog d'Edmée - Page 276

  • Grand écran: "Corporate", plongée dans un univers impitoyable. Avec Céline Sallette et Lambert Wilson

    aaaacorporate.jpgC’est la place de l’homme au sein de l’entreprise, un univers de plus en plus impitoyable, qu’a choisie Nicolas Silhol pour son premier long-métrage, Corporate, racontant l’histoire d’Emilie Tesson-Hanson. Jeune, brillante et implacable cadre des ressources humaines au sein d’un grand groupe agroalimentaire, elle est chargée du «dégraissage» en exécutant les ordres du PDG sous forme d’un plan de restructuration déguisé.

    Une gestion par la peur, évitant le mot de licenciement mais poussant cyniquement les salariés indésirables à la démission. Ou pire. Un jour, l’un des employés du service d’Emilie dont elle voulait se débarrasser, se suicide en se jetant sous ses yeux dans la cour de l’immeuble du siège parisien et une enquête est ouverte par l’inspection du travail.

    Emilie, engagée pour sa réputation de "killeuse", se rend compte de son rôle dans le drame. Elle n’est évidemment pas seule en cause, mais confrontée aux dénégations de la direction, qui lui met la pression en voyant en elle le fusible idéal, elle va s’employer à mouiller ses supérieurs en divulguant leur stratégie vicieuse visant à accroître les profits. A la fois une question d’humanité et de survie.

    Dans ce polar social sous tension permanente, l'auteur nous emmène dans les arcanes de la firme et se livre en connaisseur à une étude sociologique en analysant froidement les méthodes modernes de management ainsi que leur impact déplorable sur les rapports humains dénués de tout sentiment.

    Excellents comédiens

    Intelligent dans son propos d’une actualité aussi sombre que brûlante, évitant de juger, sec et austère dans son traitement au service d’une mise en scène brute en accord avec un thème passionnant, symbolique d’un grave dysfonctionnement dans nos sociétés, l’opus révèle un auteur plus que prometteur. Une réussite à laquelle contribuent par ailleurs grandement les comédiens

    A commencer par Céline Sallette, excellente en RRH antipathique, froide, distante et sans scrupule. Une prestation à contre-emploi pour cette actrice solaire, à la fois expressive, vive et bienveillante. Incarnant le déni mais dégageant une autorité naturelle, l’élégant Lambert Wilson en col roulé impeccable se montre parfait dans le rôle de son supérieur, tout comme Violaine Fumeau dans celui d’une inspectrice du travail se muant presque en assistante sociale.

    aaaasilhol.jpgL’intérêt pour le monde du travail de Nicolas Silhol (photo), récemment rencontré à Genève, lui vient de son père, professeur de management dans une école de commerce et consultant en ressources humaines, avec qui il a souvent discuté de ces questions. Il a eu l’idée de Corporate suite à la terrible vague de suicides chez France Télécom en 2008 et 2009.

    Comment avez-vous procédé?

    En découvrant ce système de gestion par la terreur qui pouvait détruire des vies, j’ai abordé mon film sous l’angle de la responsabilité de ceux qui font le sale boulot. On connaît mal l’entreprise. Je désirais être le plus juste possible. J’ai rencontré plein de gens, des inspecteurs du travail en ce qui concerne les enjeux juridiques. Comment établit-on un lien entre la mort d’un individu et son rapport à son job? Mais j’ai aussi vu des responsables des RH, des sociologues.

    Corporate est porté par une étonnante Céline Sallette à contre-emploi.

    C’est une formidable actrice, forte et fragile, avec qui j'avais très envie de collaborer. Il s'agissait d'un vrai défi pour elle. L'’expérience et la possibilité de construire un rôle nouveau l'ont séduite. Sensible au sujet, elle a accepté tout de suite. Cette "killeuse" antipathique, opaque, coupée de ses émotions et qui va progressivement se reconnecter, provoquait chez elle un mélange de fascination et de répulsion.

    Son personnage est inspiré par une vraie manageuse.

    Effectivement. Elle m’a raconté la façon dont elle mettait la pression sur les salariés dans le but de les mettre dehors. Avant de finir par craquer elle-même. A la faveur de cette rupture, elle a décidé de changer de métier.

    Quid du choix de Christophe Lambert dans la peau d’un DRH?

    Il me fallait un comédien connu et charismatique, car je ne voulais pas juste un salaud, un grand méchant. Il était aussi important qu’il ait un lien fort avec Emilie. Ce qui choque avant tout chez lui, c’est sa façon d’être dans le refus total de responsabilité dans le drame, exprimé par ailleurs avec beaucoup de violence. 

    Après cette plongée au sein de l’entreprise, Nicolas Silhol souhaite explorer d’autres sujets ancrés dans le réel et qui posent question. Toujours dans une même veine, en restant dans la fiction.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 5 avril.

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  • Grand écran: "A United Kingdom", l'amour inébranlable d'un couple mixte qui va tout défier

    aaaaaunited.jpgSeretse Khama, 27 ans, roi du Bechuanaland alors sous protectorat britannique et Ruth Williams, une dactylo londonienne de 24 ans tombent éperdument amoureux. Nous sommes en 1947 et la chose provoque un gros scandale. Tout s’oppose à ce mariage mixte, qu’il s’agisse de leurs familles et pays respectifs de l’Afrique du Sud en plein Apartheid. Mais les deux tourtereaux vont surmonter tous les obstacles.

    Leur amour inébranlable a changé leur pays et inspiré le monde. L’Anglaise Amma Asante, fille d’immigrés ghanéens, à qui l’on doit également Belle et A Way Of Life, s’en est servie pour porter à l’écran le biopic A United Kingdom, adapté du livre Colour Bar de Susan Williams.

    Entre Histoire, lutte politique, passion et romance, elle revient ainsi sur l’incroyable aventure du couple mixte discriminé, son combat ensuite pour l’indépendance du Bechuanaland devenu le Botswana et dont le démocrate Seretse Khama fut le père.

    La première partie est centrée sur la relation impossible entre ces deux êtres, la seconde sur leur installation au Bechuanaland. Bien que leur union ait déclenché un vrai conflit diplomatique (les Britanniques ont retenu le jeune ménage jusqu’en 1956, notamment pour ne pas déplaire à l’Afrique du Sud), on reprochera à l’auteur une vision simpliste et très idéalisée dans son approche ultra sentimentale de la situation.

    Mais en dépit de son côté excessivement lisse, le film se laisse voir à la fois pour cet important épisode historique que bien peu connaissent et la prestation convaincante des deux comédiens principaux David Oyelowo (Selma, Le Majordome) et Rosamund Pike vue dans Gone Girl ou encore Orgueil et préjugés.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 29 mars.

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  • Grand écran: "Cahier africain" raconte l'enfer vécu en République centrafricaine

    aaaacahier.jpgAu début il y a un cahier d‘écolier ordinaire. Sur les feuillets à petits carreaux des photos en forme de témoignages courageux de femmes, jeunes filles, garçons enfants de Centreafrique, dont les vies ont été brisées par la vague de meurtres et de viols commis par les 1500 hommes de la milice de Jean-Pierre Bemba, leader du Mouvement de libération congolais entre octobre 2002 et mars 2003. Des traumatismes vécus par des familles entières.

    Ce cahier, devenu un vrai personnage du documentaire et que les victimes ont-elles-mêmes fabriqué a été découvert par hasard en 2008 par la réalisatrice Heidi Specogna. Elle s’est alors embarquée pour un voyage cinématographique de sept ans qui lui a valu trois nominations au Prix du cinéma suisse. 

    Au départ l’idée était de se focaliser sur un petit nombre de femmes violées essayant de se reconstruire. Toutefois elle a été rattrapée par la réalité en 2012, cinq ans après la guerre civile, quand les rebelles de la Séléka opposés au président François Bozizé ont repris les armes. Et que l’horreur recommençait nourrie par la rivalité entre chrétiens et musulmans. Un nouveau cauchemar pour les victimes d’atrocités, qui pensaient être enfin sorties de l’enfer.

    On retiendra à cet égard la remarque désespérée d’un chef de village. «C’est comme si le diable avait choisi notre pays… » Une malédiction que la réalisatrice nous laisse ressentir en évoquant un pays où tout se répète, rien ne s’arrête dans un cycle de violence constamment renouvelé.

    Hedi Specogna n’hésite pas à en montrer les terribles stigmates avec des images choc mais non voyeuristes dans son film divisé en trois chapitres. Il débute avec le procès de Bemba en 2011 (il a été condamné à 18 ans de prison par la Cour pénale internationale) et se termine en 2015, sur une petite note d’espoir. Il raconte un peuple meurtri, dont les souffrances passent par le récit, le regard triste, douloureux et digne des protagonistes dont les visages sont souvent filmés en gros plans.

    Un petit regret pourtant. Evoquant un pan de vie tragique, ce documentaire émouvant plein d'une humanité teintée de poésie, reste parfois difficile à suivre pour qui connaît mal ou pas du tout l'histoire des monstruosités commises et subies dans cette partie du monde.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 22 mars.

     

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