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Sorties de la Semaine - Page 100

  • Grand écran: "Matthias et Maxime", un baiser déroutant et un Xavier Dolan se disant transformé

    matthiasmaxime_credit_photo_obligatoire_shayne_laverdire_1280.jpgAprès Ma vie avec John F. Donovan, première œuvre en anglais descendue par la critique américaine au Festival de Toronto, Xavier Dolan est revenu sur ses terres québécoises pour Matthias et Maxime.

    En compétition à Cannes en mai dernier, le huitième film du prodige n’a pas davantage plu au jury, contrairement à Juste la fin du monde en 2016 où il avait décroché le Grand Prix (à défaut de cette Palme d’or qu’il espère tant), et Mommy qui lui avait valu le prix du jury en 2014.

    Logique, l’œuvre se révélant mineure dans la filmographie de l’auteur. Même si elle démarre sur les chapeaux de roues dans un chalet, où s’éclate une bande de copains. Alors que les blagues douteuses, les charriages et les invectives  (en pur québécois, c’est redoutable) fusent entre deux joints, une étudiante en cinéma force Matthias et Maxime, deux amis d’enfance, à s’embrasser pour les besoins de son court métrage.

    Un grand trouble et un gros doute

    Ce baiser en apparence anodin les confronte soudain à leurs préférences sexuelles, provoquant chez eux un grand trouble et un gros doute. Matthias, en couple avec une femme, fait carrière dans la finance. De son côté Maxime (Xavier Dolan comme toujours excellent), garçon introverti et timide, barman dans un club, est sur le point d’émigrer en Australie. Vont-ils tout balancer au risque de bouleverser leur existence et l’équilibre de leur cercle social. 

    On retrouve dans ce drame à la fois romantique, hystérique et infantile, où il a engagé des potes avec qui il se sent bien, les figures et les sujets chers à Xavier Dolan comme la mère étouffante ou l’homosexualité. Pour autant il ne s’agit pas, selon lui, d’un métrage sur ce dernier thème. «Il ne traite pas de l’amour gay, mais de l’amour tout court. Et avant tout il s’agit d’amitié. L’amitié est-elle de l’amour? voilà la question essentielle.»

    Le réalisateur, qui refuse par ailleurs d’être catalogué auteur homosexuel, admet certes que le fameux baiser vient bouleverser l’ordre des choses chez les protagonistes. «Oui, ils luttent car cela remet en cause leurs certitudes d’être ce qu’on leur a toujours assuré qu’ils étaient. Matthias est effrayé. Il se demande s’il est possible d’aimer sans se poser de questions. Ce que ne fait plus la génération d’après nous, les trentenaires. Les plus jeunes abordent d’une manière nouvelle la sexualité, le genre.»

    Une œuvre de transition

    Pour Xavier Dolan, «Matthias et Maxime» où il se remet en scène avec une tache rouge de naissance très graphique sur une joue, est une œuvre de transition, un nouveau départ, une façon de réfléchir sur la vie, le cinéma, le langage qui creuse un fossé entre les ados et les plus âgés. «J’arrive à la fin d’une décennie avec toutes sortes de sentiments contradictoires. Cela m’a transformé. Ce film était l’occasion d’essayer autre chose, de montrer une part différente de moi-même, de naviguer dans certaines zones plus en demi-teinte, de boucler un chapitre personnel et cinématographique.»

    Signalons que le petit génie aujourd'hui trentenaire est le grand invité du Geneva International Film Festival (GIFF), qui lui consacre sa rétrospective. On aura l’occasion d’y revenir.

    "Matthias et Maxime" à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 30 octobre.

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  • Grand écran: dans "Mon nom est clitoris", deux réalisatrices se penchent sur cet organe dédié au plaisir. Interview


    capture-d_rsquo_e__cran-2018-09-09-a__-10_32_55-copie.pngFaire du clitoris un personnage de cinéma voilà qui n’est pas banal. Mais il faut dire qu'il ne l’est pas non plus. Aussi grand en moyenne qu’un pénis, disposant de plus de 8000 terminaisons nerveuses qui le rendent extrêmement sensible, c’est le seul organe entièrement et uniquement destiné au plaisir. Et pourtant, il a été longtemps le grand oublié des études scientifiques et autres traités anatomiques. En fait ce n’est qu’en 1998 que son anatomie a été correctement décrite.

    Du coup, il s’agit de la partie la moins connue du corps féminin. Raison pour laquelle la Française Daphné Leblond et la Belge Lisa Billuart Monet se sont penchées sur ce fameux clitoris, qui ne se limite donc pas à sa tête qui dépasse, cachée sous deux grandes lèvres. Ce petit bouton n’est que la pointe de l’iceberg, vu qu’il se prolonge en profondeur d’environ onze centimètres.

    Dans Mon nom est clitoris, les deux réalisatrices, instaurant un dialogue autour de la sexualité, ont ainsi donné la parole à une douzaine de jeunes femmes de 20 à 25 ans, à orientations sexuelles différentes, qui partagent leurs histoires, leurs émois. Dans leur chambre, face caméra, elles racontent leur parcours depuis l’enfance, répondant avec humour, courage, une audace parfois teintée d’embarras, aux questions des deux cinéastes, dont le documentaire met le doigt où il faudrait qu’il soit davantage, comme on peut si justement le lire dans une critique...

    A la recherche d’une sexualité épanouissante

    Elles rient (et nous aussi) en se souvenant plus ou moins précisément de leurs premières sensations, de leurs explorations aussi tâtonnantes que frustrantes. Toutes sont à la recherche d’une sexualité épanouissante et égalitaire, où se masturber irait autant de soi que chez les hommes, au lieu d’en avoir honte et d’en parler avec gêne sous le manteau. La démarche des deux auteures s’inscrit à l’évidence dans la lutte pour le droit de la femme, celui d’exprimer ses préférences, de choisir son partenaire, de les multiplier, de faire du bien toute seule.

    Lors d’une rencontre à Genève, Daphné et Lisa précisent qu’elles ont décidé de tourner leur documentaire après une longue conversation où elles ont parlé de censure autour de la masturbation féminine et de leurs expériences personnelles. Se demandant par exemple ce qu’on fait du clitoris dans la pénétration hétérosexuelle. « On a appris sa taille, son emplacement, sa position dans le corps, son fonctionnement dans la mesure où la partie à l’intérieur réagit aussi. On souhaiterait remplacer l’orgasme vaginal par un orgasme clitoridien interne ».

    -Comment avez-vous choisi les jeunes femmes et les avez-vous amenées à se livrer à visage découvert sur un sujet aussi intime?

    -Nous aimerions bien nous attribuer le mérite de la persuasion. Mais en fait, nous nous sommes d’abord adressés à des amies et elles ont dit oui assez rapidement. Ce qui n’était dans le fond pas trop étonnant. Nous avons misé sur l’humour et adopté un ton naturel, nous formions une toute petite équipe, nous connaissions un tiers de protagonistes, nous nous débattions nous-mêmes avec le sujet et parfois elles en savaient plus que nous.

    -Reste que discuter du clitoris à bâtons rompus demeure souvent tabou en 2019.

    -En effet. Mais c’est notamment une question d’âge. Le jour où il faut causer de sexe un peu tard, cela devient difficile. Nous voulons que les femmes ne connaissent plus désormais les mêmes problèmes, que les choses s’améliorent pour les générations suivantes.

    -Votre message est politique. La femme doit disposer de son corps, délivrée des contraintes qui continuent à le gérer. Par exemple vous plaidez pour une masturbation égalitaire.

    -C'est vrai. 60% des femmes déclarent se masturber contre 90 % des hommes On parle aussi d’un fossé orgasmique, la jouissance étant atteinte à 95% chez les hommes et à 65 % chez les femmes dans les rapports hétérosexuels. Chez les lesbiennes le pourcentage augmente.

    Ce premier film où les deux militantes s’adressent à un maximum de gens leur a donné d’autres envies. Si elles ont procédé à un casting, il ne s’agit pas d’un panel suffisamment représentatif. Du coup, elles ont un projet web, avec de petites capsules vidéo où elles parleraient de toutes les minorités sexuelles.

    «Mon nom est clitoris» à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 30 octobre.

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  • Grand écran: "Madame" fait valser les tabous dans un émouvant double autoportrait

    Madame_Stephane_Riethauser_outplayfilms_05.jpgElle lui offre une  caméra pour Noël et il se met à la filmer à l’occasion de son 90e anniversaire. Quinze ans après sa mort, en 2004, on plonge ainsi dans l’intimité d’une incroyable relation, belle, émouvante et cash entre Caroline, une grand-mère peu banale et son petit-fils Stéphane Riethauser, réalisateur de Madame, qui leur est consacré.

    Mis à nu dans un double autoportrait, les deux se confient sur le genre, la sexualité, la domination masculine,  la condition féminine. Elle était devenue une pestiférée, lui a craint de l’être. D’un côté, on découvre une fille d’immigrés italiens promise à une vie domestique dans les années 1920, qui parvient à sortir d’un mariage forcé pour s’imposer en femme d’affaires dans un univers d’hommes.

    De l’autre, on trouve un jeune homme formaté hétéro qui s’oblige, entre doutes et mensonges, à jouer la partition du sexe fort au sein d’une famille genevoise bourgeoise. Avant de dire non au comportement machiste, au discours homophobe de droite et de faire son coming out à 22 ans. Pour militer ensuite sans relâche pour la cause.

    Stéphane Riethauser, photographe, auteur de nombreux reportages et documentaires pour la Télévision romande,  réalisateur et producteur indépendant à Berlin où il vit depuis dix ans, explore ainsi  la transmission de l’identité de genre dans un monde patriarcal hostile à la différence. Il  imagine le dur combat féminin, à travers celui de sa Madame à lui pour mener sa barque à son idée. Particulièrement en son temps. D’où un dialogue à la fois réel et fictif remettant en question les tabous, entre cette charismatique vieille dame et le bouillant activiste gay.

    Une tonne d'archives

    Objet cinématographique singulier à la fibre tragicomique, Madame tire une part de son originalité d’une tonne d’archives privées s’étalant sur trois générations. Un trésor composé de photos, de westerns que le petit Stéphane tournait dans son jardin, de journaux intimes d’images  en noir et blanc d’un film en noir  et blanc tourné par son père qui voulait être cinéaste, mais  qui est devenu expert-comptable.

    S’il a documenté son enfance, Stéphane se considère comme le descendant spirituel de son excentrique aïeule. « A sa manière, elle s’immisçait dans ma vie. Elle n’était pas toujours facile. Elle m’a même boudé quand j’ai refusé de cacher mon homosexualité. Puis nous nous sommes encore mieux retrouvés. Parce que nos destins se rejoignent. Tous les deux, on a dû lutter pour être qui on était, au risque de se faire rejeter. Mais au-delà de la volonté de préserver la mémoire, j’utilise surtout mon parcours pour raconter quelque chose de plus large sur l’éducation des enfants en forme de lavage de cerveau à l’époque ».

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 23 octobre. Avant-première au Bio, Carouge, le 22 à 20h30.

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