Maïwenn ne partait pas gagnante. Bien avant la projection de Jeanne du Barry en ouverture de Cannes, le film faisait polémique, notamment en raison de la présence de Johnny Depp au casting. En roi qui plus est. Si l’accueil fut sans surprise enthousiaste au Grand Théâtre Lumière où se pressait le gratin, il fut comme prévu indifférent, sinon moqueur à Debussy où s’entassaient les critiques. Loin d’être un convaincus, à quelques exceptions près, ils trouvent le film guindé, académique, ennuyeux, plombé par un Johnny Depp au bout d’un rouleau, comme le relève le Figaro dans son tour de presse française et internationale.
Sans tomber dans l’excès inverse, on n’est pas de cet avis. On suit même avec un certain plaisir l’itinéraire de Jeanne Vaubernier, cette fille de rien qui s’évade par la lecture, prête à tout pour s’élever dans l’échelle sociale et qui paie de sa personne pour y arriver. Réussissant à tourner la tête de Louis XV au point qu’il ne peut plus se passer d’elle et en fait sa favorite officielle.
Au grand dam de la cour refusant cette ancienne prostituée et surtout des filles de Sa Majesté. Méchants laiderons craignant de devenir la risée de Versailles, elles n’auront de cesse de vouloir se débarrasser de Jeanne Même si son amant du Barry, âpre au gain, en fait une « femme honnête » , mieux une comtesse à la demande du souverain, en l’épousant contre une coquette somme d’argent.
Une figure féministe
Installée à demeure parmi les puissants, snobée par la progéniture royale et la future reine Marie-Antoinette, Jeanne sait qu’elle marche sur un fil et que le moindre faux-pas peut lui être fatal. Ce qui ne l’empêche pas d’envoyer valser les usages, en imposant son naturel et un style vestimentaire que certaines nobles dames n’hésitent pas à imiter. Ignorant l’étiquette elle regarde son Louis droit dans les yeux, ose lui tourner le dos et va jusqu’à s’habiller en homme en lâchant ses cheveux.
Maïwenn en fait ainsi une rebelle évoluant entre dentelles, costumes, bougies et perruques dans des décors impressionnants et somptueux. Une figure féministe à son image, d’autant plus qu’elle s’est donné le premier rôle. Ses virulents détracteurs lui reprochent du coup le parallèle qu’elle se permet, selon eux, de tisser entre le parcours de Jeanne et le sien, toutes deux ayant en quelque sorte subi le même mépris de classe.
C’est plutôt mesquin, les esprits chagrins déplorant encore (à tort) sa façon d’en faire des tonnes en cabotinant à mort. Là où on peut les rejoindre, c’est dans le choix de Johnny Depp, peu crédible et empesé dans sa prestation de roi. C’est la vraie faiblesse du film.
A l’affiche depuis mercredi 17 mai dans les salles de Suisse romande.