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  • Festival de Locarno: "Une femme de notre temps" et "Last Dance", les improbables de la Piazza Grande

    Commissaire de police à Paris, tireuse émérite à l’arc, un sport qui a une grosse importance dans l’intrigue, Juliane Verbecke fait preuve d’une belle intégrité morale. Mais quand elle découvre la double vie de son mari, elle se comporte d’une manière qu’elle n’aurait jamais cru possible.

    Héroïne de ce drame projeté sur la Piazza Grande, Sophie Marceau, qu’on avait beaucoup aimée dans Tout s’est bien passé de François Ozon. On ne peut en dire autant de sa prestation devant la caméra de Jean-Paul Civeyrac, notamment auteur de Mon amie Victoria (2014), opus réussi adapté du roman de Doris Lessing. Mais qui s’égare également fâcheusement dans Une femme de notre temps, un titre bizarroîde de surcroît 
     
    "Il y a trois ans, nous explique le réalisateur à la conférence de presse, j’ai pensé à un personnage qui basculerait, à un monde qui s’effondrerait et à une prise de conscience. Tout cela reposant davantage sur la tension que sur les dialogues+.
     
    Quant à Sophie Marceau, elle évoque un caractère fascinant, qui lui parle par sa droiture, son  intensité, sa féminité rassurante. "Elle choisit de suivre son chemin, sa trajectoire, comme une flèche. Elle y va direct. Elle y met tout son corps, tout son coeur. Même si sa vie bascule, elle va jusqu’au bout. C’est ce que j’ai fait en l'incarnant"-

    Vu de cette façon, c’est plutôt engageant. Malheureusement entre un cinéaste peu inspiré et une comédienne inexpressive,en dépit de sa véritable profession de foi, le résultat est d’une platitude qui le dispute à l’incohérence. L’auteur nous sert le drame convenu, qui vire au comique intempestif, d’une femme trompée par son mari, un homme peu séduisant, mou et lâche, souffrant carrément le martyre d’être physiquement infidèle à une épouse qu’il prétend adorer. Et qui a par ailleurs eu une liaison avec la sœur de cette dernière, ce qui aurait provoqué son décès.  
     
    Désespérée en découvrant ces turpitudes, l’amoureuse trahie n’a plus qu’une idée en été, se venger. Si possible mortellement. Et de poursuivre, carquois à l’épaule bien garni de flèches, son conjoint veule et menteur jusqu’en Normandie, où il est parti roucouler avec sa maîtresse. L'ensemble pathétiquement noyé sous les violons.
     
    Bref, dans le genre soap on ne fait pas mieux, Ce n’est évidemment pas l’avis de son auteur qui dit même s’être référé, l’espace d’une scène, à Ecrit sur du vent de Douglas Sirk, Franchement osé pour un tel ratage! 
     
    François Berléand la joue danseur contemporain
     
    Dans le genre improbable, il y a aussi Last Dance, de la Neuchâteloise installée en Belgique. Delphine Lehericey. Elle nous raconte l’histoire de Germain, bienheureux retraité un peu fainéant et misanthrope de 75 ans (François Berléand), qui se retrouve soudainement veuf, après 50 ans d’une union fusionnelle avec Lise.
     
    Inquiète pour Germain qu'elle imagine dorénavant dangereusement livré à lui-même, sa famille s’invite dans son quotidien, se relayant pour organiser une surveillance pesante de chaque instant. Sous pression, le pauvre n’en peut plus. D’autant qu’il a un secret. Lise et lui s’étaient en effet promis que celui des deux qui resterait irait au bout du projet que l’autre avait commencé.
     
    Et c’est ainsi que Germain déboule dans le spectacle, mêlant amateurs et professionnels de la chorégraphe genevoise Maria La Ribot, pour remplacer sa femme. Comme la danse contemporaine est en principe accessible à n’importe qui, et qu’en plus on a du respect pour François Berléand (même s’li se contente le plus souvent de souffler fort pour manifester ses sentiments), on veut bien croire à son engagement immédiat dans la troupe.

    En revanche, que tout le show tourne désormais, tant La Ribot le trouve unique, autour de ce septuagénaire un rien ventripotent et qui n’a jamais esquissé le moindre pas de danse de sa vie, c'est trop. Et provoque des moments qui confinent au ridicule et à la caricature. Le public de la Piazza n’en a pas moins été conquis.       

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  • Festival de Locarno: "Paradise Highway" sur la Piazza Grande. Un film d'action qui tient la route, avec Juliette Binoche au volant

    Depuis que son frère adoré (Frank Grillo) purge une peine de prison, Sally (Juliette Binoche), une camionneuse dure à cuire, accepte à contrecoeur de faire de la  contrebande de marchandises pour lui. Alors qu’il est sur le point de sortir, elle effectue ce qui est censé être un dernier travail.   

    Elle entame alors un voyage dangereux à travers les Etats-Unis pour se rendre compte qu’il s’agit en fait de livrer Leila (Hala Finley)une gamine de 11 ans, à des trafiquants sexuels. Face à cette abomination, Sally décide de la racheter. Parallèlement, deux agents du FBI (dont l’un campé par Morgan Freeman) se lancent à la poursuite du réseau, déterminés à sauver la fillette. 

    Dans une volonté de réalisme, la réalisatrice Anna Gutto a opéré une plongée dans le milieu des chauffeuses routières grâce à l’organisation Real Women In Trucking et à sa dirigeante Desiree Wood. S’inspirant de leur vie, de leur façon de s’entraider, elle propose, à l’exception de son dénouement, un captivant road movie d’action. Bien documenté, Il tient la route en brassant plusieurs thèmes, dont l’un des principaux réside dans le développement de la relation entre Sally et Leila, qui débute de façon particulièrement orageuse.   

    Les deux comédiennes sont irréprochables. Juliette Binoche, qui a véritablement appris à conduire un semi-remorque, se révèle très crédible en routière vieillissante, costaude, aguerrie, têtue et laconique, abîmée dans son enfance et qui a dû apprendre à se défendre. De son côté, Hala Finley, surprenante de maturité, se montre plus qu’à la hauteur dans le rôle de la maigrichonne Leila, à la fois terrorisée et rebelle, laissant deviner à travers son regard tout ce qu’elle déjà subi.

    Juliette Binoche raconte son expériemce

    On les a retrouvées en compagnie d’Anna Gutto à la conférence de presse. Chapeau noir à large bord, chemisette blanche, paraissant dix ans plus jeune avec dix kilos en moins que dans le film, Juliette Binoche raconte son expérience. "J’ai rencontré Desiree Wood. J’ai fait la route avec elle et j’ai eu le temps de lui poser des questions, de me rendre compte des dangers de ce métier, des heures interminables passées sur la route, de la malbouffe, de la nécessité de se montrer malignes pour se protéger, de ne pas avoir peur, se méfier des hommes. Certaines femmes ont été violées quand elles ont passé l’examen, qui prend beaucoup de temps, pour obtenir leur permis". 

    Juliette évoque bien sûr sa partition, la manière de toucher les spectateurs en se mettant au service d’un personnage de plus en lus grand. Elle parle des conditions éprouvantes, de la chaleur encore plus intense qu’ici, de la fatigue, des moustiques. Mais surtout elle évoque l’importance du travail d’équipe et ce qui l’a vraiment frappée : l’extrême générosité d’Hala, comme  tout ce qu’Anna a préparé seule avant le tournage.  

    Par ailleurs elle a fait une déclaration d’amour à Locarno. «C’est un grand festival qui me laisse des souveniirs extraordinaires et qui permet de découvrir des pépites». 

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  • Festival de Locarno: la compétition démarre bien, avec notamment "Bowling Saturne", de Patricia Mazuy

    Ayant souvent un peu de mal à exister entre la Piazza grande et la Réptrospective, la compétition locarnaise a bien démarré avec notamment deux métrages qui semblent déjà se dégager. On s’arrêtera plus particulièrement sur Bowling Saturne de Patricia Mazuy, qu’on peut qualifier d habituée du festival. En 1994 elle remportait un Léopard de bronze avec Travolta et moi, un épisode de la série Arte Tous les garçons et les filles de leur âge, et en 2011 invitait le public sous les étoiles avec Sport de filles, mettant en scène la gracieuse Marina Hands.

    Après Paul Sanchez est revenu, thriller de 2018 où Laurent Laffite se glisse dans la peau d’un criminel, la réalisatrice française reste dans la brutalité et la noirceur. A la mort de son père, Guillaume (Arieh Worthalter), commissaire de police ambitieux , hérite du bowling familial et le donne en gérance, pour l'aider,  à Quentin. son demi-frère (Achille Reggiani).   

    Un décision fatale. Quentin est un garçon marginal répudié par son père et sujet à de redoutables pulsions. Son comportement instable et sa gestion douteuse du lieu  perturbent Guillaume et l’empêchent de se consacrer véritablement à son enquête sordide sur une série d’horribles meurtres de jeunes femmes.

    Patrizia Mazuy propose un film d’une intensité tragique, marqué par une extrême violence, surtout dans une scène qui atteint son paroxysme au début de l’histoire. Il vous secoue en outre par sa vision noire de la réalité, son âpreté, son traitement aride, son manque total de rédemption et d’espoir. Il est parfaitement interprété par les deux protagonistes principaux.

    Réflexion sur la guerre aux accents métaphysiques 

    A noter également Naçao Valente du Portugais Carlos Conceiçao., situé en 1974, un an avant l’indépendance de l’Angola, dont le territoire est peu à peu reconquis par les séparatistes. peu à peu. Là encore, la violence s’invite dès l’ouverture. Tandis que des homes meurent et qu’une bonne sœur est chassée par les rebelles, une jeune Angolaise croise le chemin d’un jeune soldat portugais, qui la tue froidement après un accouplement ardent. On est sous le choc.. 

    Par ailleurs, Un peloton lusitanien barricadé à l'intérieur d'un mur devra en sortir, quand le passé ressurgit pour réclamer la justice tant attendue. Avec cet opus puisant aux accents métaphysiques et parfois surnaturels, Carlos Conceiçao livre, comme il le relève lui-même, une réflexion sur l’histoire, la guerre, la peur, la tyrannie. Une réflexion sur la nature cyclique du fascisme et la faćon dont il demeure une menace pour l’évolution. Cela vaut le détour.   

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