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  • Grand écran: "Aquarius" dénonce un Brésil gangrené à travers un somptueux portrait de femme

    aquarius.jpgSélectionné surprise en compétition au dernier Festival de Cannes, Aquarius, le deuxième long-métrage de Kleber Mendonça Filho avait été plébiscité, à l’image de Maren Ade et son Toni Erdmann. Mais, tout comme l’Allemande, le Brésilien était reparti les mains vides. L’équipe du film n’en n’avait pas moins profité de la fameuse montée des marches et son écho international pour brandir des pancartes, protestant contre la destitution de l’ex-présidente Dilma Roussef et comparant cet acte à un coup d’Etat.

    Dans Aquarius, le réalisateur se penche sur le quotidien de Clara, issue de la classe moyenne aisée, et qui fut une critique musicale réputée à Recife, au cours des années 60 et 70. Aujourd’hui cette veuve sexagénaire et mère de trois enfants, possède le dernier appartement d’un immeuble qui n’a pas été racheté par un promoteur voyou. Mais il commence à la harceler pour l’obliger à vendre.

    La combative obstinée et orgueilleuse Clara, une vraie résistante qui a notamment survécu à un cancer du sein et qui continue à jouir de l’existence comme bon lui semble, ne se laisse pourtant pas facilement déstabiliser. Elle est bien décidée à rester dans un leu désormais désert, mais qui contient toute sa vie entre ses souvenirs, sa collection de vinyles et ses livres. S’il est subtil et intelligent, le portrait que brosse le cinéaste n’est pas toujours flatteur, dévoilant un personnage impérial et digne, qui peut à l'occasion se révéler égoïste, sinon odieux.

    Un pays miné par la crise, la spéculation, la corruption

    Plus important, à travers la lutte de cette femme forte incarnée par la grande, magnifique, sensuelle et solaire Sonia Braga, le cinéaste livre une sorte de radiographie du Brésil. Evoquant plus largement un pays gangrené par un libéralisme agressif, il dénonce un capitalisme sauvage se traduisant par la crise, la spéculation, la corruption, les persistantes inégalités sociales.

    En raison de son sujet et de la petite manifestation cannoise, Aquarius, fable fleuve en forme de chronique politique, avait été d’abord interdit aux moins de dix-huit ans, un âge qui a finalement été abaissé à 16 ans. Il a par ailleurs fait un véritable carton au Brésil et décroché deux prix au Festival Biarritz Amérique latine. Mais voilà qui ne lui a pas suffi pour représenter son pays dans la course aux Oscars.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 5 octobre.

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  • Grand écran: "Une vie entre deux océans", trop tire-larmes pour émouvoir vraiment

    auneviie.jpgAu lendemain de la première Guerre ondiale. Tom Sherbourne, ancien soldat encore traumatisé par le conflit, aspire à l’isolement pour tenter d'oublier ses horreurs. Il pense le trouver en se proposant comme gardien de phare sur la petite île inhabitée de Janus, en Australie. Il y vit en solitaire, avant de tomber sous le charme d’Isabel, la fille d’un dignitaire du port le plus proche. Elle le supplie de l’épouser et de l’emmener avec lui sur cette terre austère, belle et sauvage. 

    Tous deux s’aiment d’un amour fusionnel que vient de surcroît bénir la promesse d’un enfant. Que demander de plus dans l’existence? Hélas Isabel fait deux fausses couches et doit se résoudre à la pensée qu’elle n’aura plus jamais d’enfant. C’est pourtant là que le destin s’en mêle. Une barque s’échoue sur la plage, avec à l’intérieur un homme mort et un nouveau-né miraculeusement indemne. Tom et Isabel commettent alors la folie d’enterrer secrètement le corps et de garder le nourrisson, une petite fille, en laissant croire qu’il s’agit de la leur…

    Réalisé par Derek Clanfrance, interprété par Michael Fassbender, Alicia Vikander (photo) et Rachel Weisz,  Une vie entre deux océans est tiré du best-seller éponyme de M.L. Stedman. Surfant entre folle passion, désir obsessionnel de maternité, secret, mensonge, culpabilité et abnégation, l’auteur défie le spectateur de rester indifférent au drame vécu par ses héros.

    C’est pourtant le cas face à ce mélo, bien que porté par des acteurs de talent et ne lésinant pas sur la somptuosité des paysages. Mais il est tellement calibré pour faire pleurer dans les chaumières qu’il peine à émouvoir vraiment.

    A l‘affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 5 octobre.

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  • Grand écran: "Le ciel attendra" montre des jeunes filles piégées par Daech. Bouleversant et indispensable

    aciel.jpgComment et pourquoi une jeune fllle, aujourd’hui, peut avoir envie de partir en Syrie? C’est ce qu'explique Le ciel attendra en mettant en scène deux d'entre elles. Mélanie et Sonia. Mélanie a 16 ans. Elle vit avec sa mère Sylvie, aime l’école et ses copines, joue du violoncelle et veut changer le monde. Mais l'irréparable se profile lorsqu’elle rencontre son "prince" sur internet, en tombe amoureuse et se fait petit à petit prendre dans les filets de Daech. Un piège qui a aussi failli se refermer sur Sonia, 17 ans, pour "garantir à sa famille une place au paradis".

    Un film intelligent, lucide, indispensable, analysant ce moment où les ados sont contre tout ce qui représente l'autorité, explorant parallèlement l’intimité et la psychologie de deux filles qui ont basculé, ou vont le faire, dans le fanatisme. L’opus montre aussi la façon dont les proies sont repérées grâce aux réseaux sociaux, après avoir posté des messages avec des mots-clés qui permettent d'établir le contact. Il y a enfin la douleur, la colère, le courage de parents qui tentent de comprendre et se sentent coupables de n'avoir rien vu venir.

    Le ciel attendra est signé de la réalisatrice scénariste et productrice française Marie-Castille Mention-Schaar. "Partie de questions que je me posais, j’ai commencé à rencontrer des journalistes couvrant le sujet, un frère parti sur les traces de sa sœur. Ensuite j'ai fait beaucoup de recherches, vu des reportages, lu des articles, regardé des heures de vidéo de propagande dont certaines sont juste insoutenables, pour mieux saisir l'emprise des rabatteurs".

    Grâce aux contacts de Dounia Bouzar

    Toutefois, le plus important pour Marie-Castille Mention Schaar était d’entrer en contact avec des adolescentes qui ont été, sont encore dans la radicalisation. Et cela grâce à Dounia Bouzar, anthropologue française qui a fondé en 2014 le Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l’islam.

    "Elle a accepté que je la suive pendant trois mois avec son équipe partout en France. Et j’ai découvert la réalité du processus d’embrigadement en parlant notamment avec une jeune fille passée par là. Avec leur soif d’absolu, de pureté, de romantisme, leur besoin d’être utiles, elles succombent plus facilement. Les prédateurs les ciblent en leur assurant que leur existence va avoir un autre sens que dans cette société pourrie, dépourvue de spiritualité, uniquement attirée par la consommation, le succès. Ce qu’on leur promet, c’est la vie après la vie, un monde où il n’y a pas d’injustice, de pauvreté et où tout est beau".

    Clotilde Courau particulièrement impliquée

    Ce long-métrage est porté par quatre comédiennes très convaincantes. Outre Noémie Merlant et Naomi Amarger qui incarnent parfaitement les deux filles, la réalisatrice a fait appel à Sandrine Bonnaire et Clotilde Courau. "Sandrine devait mais n’a pas pu jouer dans Les Héritiers, mon précédent film. Suite à ce rendez-vous manqué, j’étais contente de la retrouver car elle me paraissait évidente dans le rôle de l’une des mères. En ce qui concerne Clotilde Courau, l’autre maman, c’est son agent qui m’en a parlé. J’ai regardé L'ombre des femmes de Philippe Garrel et j'ai été séduite par sa volonté d'implication dans l'histoire".

    "Quand Marie-Castille m’a proposé de participer à l’aventure, j’ai été frappée par l’intelligence du propos", nous dit Clotlide. "J’avais eu l’occasion d’aller à Tunis lors de l’explosion au Musée national du Bardo et je me sentais concernée. J’ai.écouté des témoignages, lu des ouvrages sur Daech, qui applique le même principe que les sectes. Isoler les gens, les couper de leur famille, de leurs émotions. Et bien sûr, je me suis plongée dans les problématiques de l’adolescence".

    Evoquant son rôle, Clotilde Courau relève à quel point elle l’a trouvé bouleversant. "Incarner ce genre de personnage c’est m’interroger sur cette femme qui se retrouve dans une solitude absolue, à laquelle s’ajoute une terrible culpabilité, c’est questionner mon identité de parent qui veut comprendre, mais n’a rien vu venir. Pour le jouer, j’ai surtout pensé à toutes les mères qui ont vécu ce drame. En espérant être à la hauteur»

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 5 octobre.

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