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La griffe du léopard - Page 45

  • Les Romands cartonnent à Locarno

     

    Normal que les Alémaniques l’aient mauvaise cette année. Non seulement ils se plaignent que  les Romands raflent la mise, mais ces derniers font mouche. Jusqu’ici du moins, en proposant incontestablement ce qu’on a vu de mieux  en compétition et chez les cinéastes du présent..

    A commencer par Lionel Baier, candidat au Léopard d’Or avec son irrésistible Un autre homme, Bijou en noir et blanc, ludique, culotté, provoquant, très sexe, en forme de satire sociale sur le désir de plaire et l’envie de pouvoir.

    Ce film, qui épingle joyeusement des critiques de cinéma à l’éthique douteuse à travers la relation perverse et les jeux érotiques d’un pigiste plagiaire et d’une brillante manipulatrice dans le domaine, a été en plus tourné avec des bouts de ficelles. Sans aucun argent de l’OFC, Nicolas Bideau et ses experts ayant refusé de le soutenir. Comme le raconte sur le site des Quotidiennes l’excellente Natacha Koutchoumov, partageant l’affiche avec Robin Harsch.

    Certes, cela n’a pas grand-chose à voir, mais quand on pense que le chef de la section Cinéma a préféré mettre de l’argent dans sa saugrenue opération panini, dont la facture se monterait donc  finalement à 300.000 francs, on hallucine la moindre…

    Il reste à espérer que les spectateurs se rueront dans les salles à la sortie d’Un autre homme. Histoire d’augmenter la part de marché pour 2008 et surtout pour montrer aux responsables de la Culture à quel point ils peuvent rater la cible !

    A l’image de Baier mais dans un tout autre genre et sans les mêmes problèmes, Fernand Melgar a lui aussi mis dans le mille avec La Forteresse, un rpojet décidé à la suite du oui populaire au durcissement des lois sur l’asile. Il suit ainsi des requérants d’asile dans l’attente d’un statut de réfugiés au Centre d’enregistrement de Vallorbe, où il s’est immergé pendant deux mois avec son équipe. Montrant la détresse des demandeurs et les employés qui y sont confrontés, son documentaire est également  un objet de réflexion sur un pays moins xénophobe qu’on l’imagine, se posant des questions et doutant de son identité. Fort, émouvant et de nature à nourrir le débat politique.        

     

     

     

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  • Tant que le cinéma suisse bouge encore...

     

    Il n’y a pas que les Jeux Olympiques dans le monde. Il y a aussi l’état de la pellicule helvétique qui  a fait, comme chaque année, l’objet d’une conférence de presse très suivie à Locarno. Et à ce propos tout baigne, à en croire Jean-Frédéric Jauslin, directeur de l’ Office de la Culture, dont on pourrait résumer ainsi la satisfaction : tant que le cinéma suisse n’est pas mort, il se porte bien… Raison de ce diagnostic fort positif: la présence de plus de huit cent mille personnes dans les salles l’an dernier.

    Sauf qu’à y regarder de plus près, seul le documentaire tire relativement son épingle du jeu et que les chiffres du premier semestre de 2008 sont plutôt catastrophiques. Ce qui m’inciterait à penser que notre Monsieur Culture a une idée très personnelle de la bonne santé des choses. Invité à s’exprimer sur la question, il n’en démord pas. Tout en se défendant certes de nager dans l’optimisme béat, il estime non seulement que le trend est bon mais le potentiel énorme. Soutenu par Nicolas Bideau, chef de la section Cinéma, sentant  lui que «le film suisse existe».

    Rassurant, non ? Ca me fait songer à ce malheureux  Köbi Kuhn, vantant follement avant juin dernier les possibilités fabuleuses de nos footeux. C’est dire si les réalisateurs ont du souci à se faire au cas où leurs œuvres suivraient la même pente savonneuse que l’équipe nationale… Et si je vous cause de crampon, c’est que Bideau, surfant sur la vague de l’Euro, a eu la faussse bonne idée d’une brochure intitulée «Le cinéma suisse- film&faces », à travers laquelle l’OFC veut donner un visage à la grande famille du septième art. Et qui, surtout, fonctionne à la manière des panini. Je vous passe les détails, mais quand l’album est au complet ­–les fans du genre comprendront-  on peut gagner des prix « magnifiques».  Par exemple des entrées  à « La nuit fauve du Cinéma suisse ». C’est Byzance.

    Reste à savoir si les festivaliers seront saisis par le démon du jeu. En tout cas, il y en a un qui a catégoriquement refusé de figurer dans la plaquette. C’est le cinéaste vaudois Lionel Baier. Non qu’il rechigne à se voir assimilé au Ronaldo de l’histoire « si seulement j’avais son physique», mais parce qu’il déteste la colle!

    Au fait, vous vous demandez peut-être combien a coûté cette affaire. 45.000 francs, dont la moitié payée par La Poste, m’assure son initiateur. Une paille. Quoique. J’ai en effet appris incidemment par la suite que c’était notamment sans les frais d’impression Ce qui mettrait la facture à quelque 300.000 francs…  

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  • La grosse colère du président Solari

    Locarno ne s’arrêtera jamais. Quoi que vous disiez et quoi que vous écriviez, rien n’empêchera la marche en avant de ce trésor du patrimoine tessinois…, martèle en substance et très fâché du haut de la tribune,  le président du festival lors du traditionnel cocktail d’ouverture. De quoi freiner la progression vers le buffet de la foule dense et impatiente, pressée comme d’habitude d’enfourner champagne et petits fours, mais un instant décontenancée par la brutalité du discours. Un instant seulement. Le directeur Frédéric Maire avait à peine énoncé sa dernière phrase que tout était englouti par les pique-assiettes avides d’économiser sur le repas du soir….

     

    ll n’empêche. Remonté comme une pendule, l’élégant Marco Solari, plus habitué aux ronds de jambes qu’aux règlements de comptes en public et qui nous faisait penser aux diatribes de l’ex-président Marco Muller à l’égard des «ayatollah » zurichois.

     

    Eh bien on  n’en était pas loin, dans la mesure où il s’agissait de répondre aux perfidies de la presse alémanique, se gaussant du programme de cette 61e édition. A l’image de la Neue Zürcher Zeitung, évoquant le plus petit des grands festivals qui se targue surtout de découvertes dans ses différentes sections. La pire chose qu’on puisse dire d’une telle manifestation, ajoute la célèbre gazette, qui la compare méchamment à une dégustation de vins. Pour résumer, pas assez de bon cinéma,  pas assez de stars. Profitant de l’occasion pour remuer le couteau dans la plaie en rappelant  le forfait de dernière minute d’Angelica Huston.

     

    Mais pourquoi tant de haine? Une jalousie mal placée, semblerait-il. Car pour nos amis d’outre-Sarine, il n’est de bon film que de chez eux ! Or ils se plaignent que cette année, il n’y en a que pour les Romands. Une manière comme une autre de se persuader qu’il faut absolument transférer Locarno à Zurich. Histoire de combler enfin les vrais cinéphiles, ainsi que le prétendent certains.

     

    Cette cérémonie un rien orageuse, prélude aux menaces d’une météo capricieuse n’a pas empêché le festival de s’ouvrir avec une belle saga du Britannique Julian Jarrold, auteur du biopic Becoming Jane. Commençant en 1925 et s’étendant sur dux décennies, Brideshead Revisited, adapté du roman d’Evelyn Waugh et dont la télévision s‘était emparée pour une série mythique il y a vingt ans, est une violente  critique de l’aristocratie catholique anglaise. Avec tous les ingrédients pour plaire, amour interdit, passion, religion, trahison. Sans oublier le craquant Matthew Goode et Emma Thompson, jamais vue en mère abusive, dotée d’une vision très arrêtée de la foi. L’œuvre, qui connaît un joli début de succès aux Etats-Unis, devrait bientôt conquérir l’Europe.    

     

     

      

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