Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Cannes dans Chassé-Croisette - Page 10

  • Festival de Cannes: en panne de Palme d'or, Almodovar vaincra-t-il la malédiction avec "Douleur et gloire"?

    2266158_douleur-et-gloire-almodovar-et-son-double-web-0601226291664_1000x300.jpgTrois ans après Julieta, racontant la perte, l’abandon, la culpabilité, Pedro Almodovar revient avec Douleur et gloire, son 21e long métrage envoûtant au titre évocateur, réunissant deux de ses acteurs fétiches, Antonio Banderas et Penelope Cruz. Sélectionné pour la sixième fois en compétition à Cannes, le réalisateur oscarisé et césarisé, récompensé sur la Croisette par un prix de la mise en scène, un prix du scénario, par le biais aussi d’un prix d’interprétation à Penelope Cruz pour Volver, mais en mal de Palme d’or en dépit de pronostics souvent unanimes de la critique. Le fougueux Espagnol qui se révèle à nouveau un très sérieux prétendant à la récompense suprême, vaincra-t-il la malédiction dans cette 72e édition? Réponse le 25 mai.

    Evitant à son habitude les excès du mélodrame en évoquant avec sobriété, retenue et pudeur l’amour, le deuil, la réconciliation, Almodovar suit Salvador Mallo, un réalisateur en crise autrefois adulé, formidablement incarné par Antonio Banderas, candidat plus que crédible au prix d’interprétation. Il se met émotionnellement et intensément à nu, mêlant «son côté le plus sombre aux moments les plus lumineux de son enfance», dans ce film mélancolique baigné de tristesse.

    Il s’agit là de la plus intime et de la plus introspective de ses œuvres, tournant autour de ses premières passions, celles qui sont suivi, la mère, la mort, les acteurs avec qui il y travaillé, les ruptures. Et les retrouvailles, dont l’une bouleverse avec le long baiser que son personnage mature échangé avec un ancien amant, avant que ce dernier parte retrouver sa femme et ses enfants.

    Déclaration d’amour au cinéma

    Entre émois, regrets, impossibilité de séparer l’art de la vie privée, ce cinéaste si doué qui se demande avec autodérision comment il peut avoir du succès dans un pays aussi différent de l’Espagne que l’Islande, déclare son amour au cinéma. La pellicule libératrice de cet enfant intelligent, sensible et malheureux, élevé au sein d’un milieu paysan et catholique, dans une caverne repeinte par un maçon. Et qui découvre soudain, avec sidération, son homosexualité. Même si l’auteur, mêlant réalité, fiction et fantasmes avoue, fait en soi insignifiant, ne pas être absolument fidèle à sa biographie.

    Le film est ainsi rythmé par des allers et retours entre les années 60, 80 et aujourd’hui. Pedro Almodovar brosse le portrait captivant d’un cinéaste se disant incompris, en panne d’inspiration, plongeant dans ses souvenirs. Un hypocondriaque tourmenté physiquement et psychiquement.

    En proie à toutes sortes de douleurs musculaires, des migraines, des acouphènes, un lancinant mal de dos, il souffre également de troubles de l’âme, de dépression. Un homme se shootant à l’héroïne, pour qui «la vie tourne autour de sa colonne vertébrale et  dégoûte comme un remède inutile». Mais il va finir par se remettre à écrire.

    shutterstock_7049585a.jpgDes comédiens au sommet

    Si Almodovar ne cesse de nous fasciner, ses comédiens évoluent comme des poissons dans l’eau dans un univers qu’ils connaissent sur le bout des doigts. A commencer par Antonio Banderas, qui a collaboré huit fois avec lui. Séduisant, attachant avec des fêlures et une vulnérabilité non feintes, il représente, sans pourtant l’imiter en dépit de sa coiffure ananas et de ses vêtements colorés, le double magistral du cinéaste torturé par les affres de la création. Et se terrant de préférence dans son appartement madrilène, où il nous invite à entrer.  

    De son côté la solaire Penelope Cruz, qui a travaillé à six reprises avec l’auteur, est parfaite dans le rôle de la mère jeune d’Almodovar, peu épargnée par les soucis et les difficultés, mais au sourire toujours au bord des lèvres. Dans celui de la mère âgée et adorée, on retrouve Julieta Serrano, apparue dans le tout premier métrage du maestro ibère, Pepi Luci Bom et autres filles du quartier en 1980.

    Cela nous vaut une séquence où elle lui parle de son enterrement, manifestant notamment la volonté d’être pieds nus dans son cercueil… Une respiration comique dans ce magnifique opus où la douleur l’emporte sur la gloire. On espère que l’inverse se produira pour le cinéaste plus inventif et créatif que jamais.

    A l’affiche dans les salles romandes depuis vendredi 17 mai

    Lien permanent Catégories : Cannes dans Chassé-Croisette
  • Festival de Cannes: des valeurs sûres, huit nouveaux et quatre femmes en compétition

    4615055-l-affiche-officielle-de-la-72e-edition-d-article_media_image-2.pngC’est parti pour la 72e édition de la grand-messe cannoise de la pellicule, sous l'oeil d'Agnès Varda (affiche). Entre romantisme et politique, privilégiant la diversité de styles et de genres, ce cru 2019 s’annonce particulièrement prometteur. Et tout d’abord en compétition, où on persiste évidemment à miser sur les valeurs sûres, mais où le vent du renouvellement continue à souffler pour le plus grand plaisir des cinéphiles avides de découvertes.

    Le jury présidé par le Mexicain Alejandro González Iñárritu  verra 21 concurrents de 11 pays s’aligner dans la course. L’Europe domine largement avec dix représentants dont quatre Français, un Espagnol, un Italien, un Anglais, un duo belge, un Roumain et une Autrichienne. Elle est suivie de cinq Américains, trois Asiatiques, un Latino-Américain et un Africain. Quatre femmes figurent dans le concours, qui met par ailleurs en valeur des thématiques LGBT dans sept films.

    Chez les habitués, on trouve cinq lauréats de la Palme d’or, dont deux l’ont déjà décrochée à deux reprises, le Britannique Ken Loach (2006 et 2016), qui revient pour sa quatorzième participation avec Sorry We Missed You, ainsi que les Belges Jean-Pierre et Luc Dardenne (1999 et 2005), présents pour leur huitième fois avec Le jeune Ahmed.

    Le Français Abdellatif Kechiche, dont La vie d’Adèle avait raflé en 2013, fait historique, trois Palmes d’or (le film et les deux actrices), propose Mektoub My Love : Intermezzo, la suite d’Uno Canto. De son côté Quentin Tarantino, palmé en 1994, fait déjà saliver la Croisette avec Once Upon A Time… in Hollywood, réunissant notamment Brad Pitt et Leonardo DiCaprio. Terrence Malick, décoré lui en 2011, débarque avec Une vie cachée.

    Face à ces monstres sacrés, huit petit nouveaux entrent dans la bataille : les Françaises Céline Sciamma (Portrait de la jeune fille en feu) et Justine Triet (Sibyl ), le Franco-Malien Ladj Ly (Les Misérables), la Franco-Sénégalaise Mati Diop (Atlantique), l’Autrichienne Jessica Hausner (Little Joe), le Roumain Corneliu Porumboiu (La Gomera), l’Américain Ira Sachs (Frankie), et le Chinois Diao Yinan (Le lac aux oies sauvages). Ce dernier fera-t-il aussi bien qu’à Berlin où il avait remporté l’Ours d’or en 2014 ?

    5063055.jpg-c_120_120_x-f_jpg-q_x-xxyxx.jpgEn mal de trophée suprême

    Déjà récompensés directement ou par le biais de leurs interprètes mais en mal de trophée suprême, on trouve cinq fidèles parmi les fidèles qui piaffent d’impatience: l’Américain Jim Jarmush, huitième participation, qui fait l’ouverture avec The Dead Don’t Die, l’Espagnol Pedro Almodovar (Douleur et gloire,  photo), également là pour la huitième fois, le Français Arnaud Depleschin (Roubaix, une lumière) ,le Québécois Xavier Dolan (Matthias et Maxime), le Palestinien Elia Suleiman (It Must Be Heaven).

    Sont également de retour l’Italien Marco Bellochio (Le traître), le Sud-Coréen Bong Joon-Ho (Parasite) et le Brésilien Kleber Mendonça Filho (Bacurau), qui a coréalisé le film avec Juliano Dornelles, un débutant dans la chasse à la Palme.

    Hors-compétition Rocketman de Dexter Fletcher promet une ambiance rock'n'roll sur la Croisette avec la présentation, en première mondiale, du biopic consacré au chanteur Elton John. Le légendaire interprète sera présent sur les marches en compagnie du jeune comédien Taron Egerton, qui l'incarne à l’écran.

    A découvrir également Les plus belles années d’une vie du Français Claude Lelouch, La belle époque de son compatriote Nicolas Bedos, Diego Maradona du Britannique Asif Kapadia, Too Old To Die Young, la série télé du Danois Nicolas Winding Refn. Sans oublier Alain Cavalier, Abel Ferrara, Werner Herzog ou Pippa Bianco en séances spéciales et Gaspar Noé en séance de minuit avec Lux Aeterna.

    Un Certain Regard

    Volet parallèle, Un Certain Regard propose, sous la houlette de la Libanaise Nadine Labaki, quinze longs métrages, dont La femme de mon frère de la Québécoise Monia Chokri, qui fait l’ouverture. Les Français Bruno Dumont (Jeanne) Christophe Honorél (Chambre 212) et Zabou Breitman (Les hirondelles de Kaboul) s’alignent aux côtés notamment d’Olivier Laxe (Viendra le feu), représentant de la jeune génération espagnole et son compatriote, l'expérimenté Albert Serra (Liberté)

    La Semaine de la critique

    Consacrée à la découverte de nouveaux talents, cette autre section présidée par le Colombien Ciro Guerrane présente des premiers (huit cette année) et deuxièmes films. Sur les onze sélectionnés, sept sont en compétition et quatre en séance spéciale comme Les héros ne meurent jamais d’Aude Léa Rapin avec Adèle Haenel qui évoque la guerre en Bosnie par des voies détournées. .

    A retenir Tu mérites un amour, le premier long-métrage de l’actrice Hafsia Herzi qui explore des relations amoureuses de jeunes En clôture, on retrouvera le premier film du Chinois Gu Xiaogang (Dwelling in the Fuchun Mountains), début d’une trilogie qui évoque une saga familiale.

    Le jury remettra trois prix dont le Grand Prix Nespresso et un prix pour un acteur considéré comme une révélation.

    vf_alice_et_le_maire_4838.jpeg_north_1323x718_transparent.jpgLa Quinzaine des réalisateurs

    Petit festival dans le grand, la Quinzaine comme on l’appelle, c’est une des sections mythiques du Festival, née il y a cinquante ans et cultivant une tradition cinématographique visant à l’audace et à l’ouverture.

    Le nouveau délégué général Paolo Moretti a mis cette année au programme comprenant 24 longs métrages et dix courts métrages de cinéastes comme les Français Nicolas Pariser (Alice et le maire, photo), Bertrand Bonello et Quentin Dupieux, le Philippin Lav Diaz ou le Tunisien Ala Eddine Slim. Mais il a aussi privilégié la nouveauté avec la venue sur la Croisette de seize cinéastes qui font leurs premiers pas sur la Croisette.

    On aura l’occasion d’en reparler, comme de l’exposition-installation en réalité virtuelle conçue par la chanteuse et performeuse multimédia américaine Laurie Anderson.

    Cannes, du mardi 14 mai au samedi 25 mai.

    Lien permanent Catégories : Cannes dans Chassé-Croisette
  • Festival de Cannes: Palme d'or au Japonais Kore-eda. Une autre, spéciale, a été créée pour Godard

    Festival-de-Cannes-2018-la-Palme-d-Or-remise-a-Hirokazu-Kore-eda-pour-Une-affaire-de-famille.jpgAu terme d'une cérémonie de clôture emmenée par Edouard Baer, le jury présidé par Cate Blanchett a rendu un verdict mêlant le banal au curieux. La Palme d’or de cette 71e édition féministo-politico-sociale a ainsi été remise à Une affaire de famille de Hirokazu Kore-Eda, qui n'atteint franchement pas des sommets dans l'oeuvre du Japonais. Le film raconte l’histoire d’une famille vivotant en volant dans les magasins et recueillant une fillette maltraitée. 

    Saluant "un artiste qui fait avancer le cinéma, qui a repoussé les limites, qui cherche sans arrêt à définir et redéfinir le cinéma", Cate Blanchett vêtue d’une spectaculaire robe noire avec un grand nœud rouge dans le dos, a par ailleurs décerné une Palme d’or aussi spéciale que surprenante à Jean-Luc Godard pour Le livre d’image, un montage fascinant d’archives, d’extraits de films, de photos, de reportages télévisés, de fragments textuels ou musicaux.

    Le Grand prix du jury est allé, un vrai plaisir, à Spike Lee, auteur du décoiffant BlaKkKlansman, charge cinglante d’un humour férocement militant contre le racisme, l'extrême droite et le président Donald Trump. Le film est basé sur l’histoire véridique d’un policier afro-américain de Colorado Springs qui avait infiltré le Ku Klux Klan avec un collègue juif au début des années 70. John David Washington et Adam Driver se révèlent irrésistibles. 

    Contrairement à ce qui se profilait comme une Palme annoncée, la Libanaise Nadine Labaki a dû se contenter, tant mieux, du prix du jury pour Capharnaüm, mélo tire-larmes brassant toutes les thématiques du moment, enfance maltraitée, sans-papiers, migrants en suivant un gamin des faubourgs de Beyrouth, génialement interprété au demeurant.

    Le choc Asia Argento et le show Benigni 

    Avant de donner le prix d’interprétation féminine, l’actrice italienne s'est lancée dans une déclaration véhémente. «En 1997, j’ai été violée par Harvey Weinstein Ce festival était sa chasse gardée. (...) Il ne sera plus le bienvenu  à Cannes ». La suite est inexplicable. C’est en effet la gémissante et fade Kazakhe Samal Yeslyamova qui a été sacrée meilleure actrice dans Ayka du Russe Sergey Dvortsevoy, le film le plus assommant de la compétition.

    Quant à Roberto Benigni, il a refait le show d’il y a 20 ans, où il avait serré dans ses bras Martin Scorsese après avoir remporté le Grand Prix pour La vie est belle. Il a ensuite remis celui d’interprétation masculine à Marcello Fonte, très convaincant lui en revanche, pour son rôle de toiletteur pour chiens concoctant une vengeance féroce dans Dogman, de l'Italien Matteo Garrone.

    Le Polonais Pawel Pawlikowski a décroché le prix de la mise en scène pour Cold War tandis que celui du scénario récompensait ex-aequo à Alice Rohrwacher pour l'attachant Heureux comme Lazzare et à Jafar Panahi pour le fastidieux 3 visages. Cate Blanchett a rendu hommage à l’Iranien interdit de Croisette, ainsi qu'au Russe Kirill Serebrennikov, dont le film Leto, plébiscité par la critique, n’a toutefois pas plu au jury. 

    C’est l’occasion de regretter l’absence au palmarès de notre préféré, Burning, du Sud -Coréen Lee Chang-dong. Ce superbe thriller lent et contemplatif explore des sentiments passionnels et pervers sur fond de jalousie, de rivalité et de différences de classe. Quant aux Français, ils ont tous été ignorés. Logique pour le calamiteux métrage d’Eva Husson Les filles du soleil. Mais dommage, en ce qui concerne Stéphane Brizé évoquant dans En guerre le combat des ouvriers pour sauver leur usine et pour Christophe Honoré qui nous a bouleversé avec Plaire, aimer et courir vite, poignante romance gay.

    000_14v2v7.jpgLa caméra d’or à Girl

    Girl de Lukas Dhont, déjà lauréat de la Queer Palm, a raflé la Caméra d'or distinguant le meilleur premier long-métrage. Un excellent choix du jury présidé par la Suissesse Ursula Meir pour cette œuvre sensible, subtile, pleine de grâce et d’émotion sur un garçon transgenre qui veut devenir ballerine. Et qui se lance à la fois dans l’apprentissage de la danse, art d’une rare exigence et le parcours hors norme du changement de sexe. Formidable, son acteur Victor Polster (photo), est de son côté reparti avec le prix d’interprétation dans Un Certain Regard.

    Lien permanent Catégories : Cannes dans Chassé-Croisette