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le blog d'Edmée - Page 228

  • Grand écran: "The Death And Live Of Otto Bloom", une étonnante réflexion sur le temps

    otto-review-shot.jpgSurgi de nulle part, Otto Bloom est un drôle de phénomène, né le jour de sa mort et décédé le jour de sa naissance! Du coup, il ne se souvient que du futur et n’a aucune mémoire du passé. Mais qui est donc cet homme extraordinaire, forcé de vivre à l’envers? Un visionnaire ou un imposteur? Un fou ou un génie  Un charlatan ou un messie?

    Toujours est-il que ce personnage d’exception dont les travaux artistiques révolutionnaires sont exposés au Musée d’art moderne de New York devient une star planétaire, la coqueluche du monde scientifique, une icône de la culture pop.

    A partir de cette trame fantastique, le jeune réalisateur australien Cris Jones propose, dans son premier et malheureusement dernier long-métrage (il est subitement décédé le 12 septembre 2017 alors qu’il travaillait sur le deuxième ), une singulière réflexion sur la relativité du temps qui ne serait qu’une illusion, en confrontant son héros vivant à rebours aux pékins en principe normaux. Ce qui ne simplifie pas les relations…

    Pour cerner Otto Bloom, raconter son histoire, expliquer son parcours, ce jeu compliqué sur le temps prend la forme d’un faux documentaire biographique. Il est structuré autour d’interviews et de témoignages de cinq intervenants qui le connaissaient le mieux et l’ont fréquenté à différentes étapes de son existence. Dont celui, central, de la neurologiste Ada Fitzgerald, qui a examiné en premier Otto Bloom et qui est devenue son grand amour

    Ces différentes séquences sont illustrées par une série d’images d’archives, de gros titres et d’articles tirés de quotidiens du monde entier, se posant tous la question (mais tentant vainement d’y répondre) de la vraie personnalité de ce fascinant individu qui se rappelle demain et attend de découvrir hier.

    Du faux plus vrai que nature

    Témoignages, archives et coupures de presse sont évidemment aussi faux les uns que les autres, mais tout est tellement bien fait qu’ils paraissent plus vrais que nature pour le spectateur, à la fois complètement bluffé et désorienté par l’étonnante maîtrise du réalisateur, la minutie de sa mise en scène et la qualité de sa documentation bidon.

    Les comédiens sont aussi convaincants, à commencer par Xavier Samuel dans la peau d’Otto Bloom. Ada, quinquagénaire, nous émeut avec les souvenirs des moments heureux en compagnie de celui qui les oubliait à peine les avait-il vécus. C'et Rachel Ward qui interprète le personnage, tandis que sa propre fille Mathilda Brown l'incarne dans les images d'archives.

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 10 janvier.

     

     

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  • Grand écran: "Molly's Game", thriller psychologique d'après une histoire vraie. Avec Jessica Chastain

    maxresdefault.jpgC’est une incroyable histoire vraie. Celle de Molly Bloom, entrepreneuse dans l’âme, une surdouée qui aime gagner. Comme au ski où elle intègre l’équipe américaine, avant de faire Sciences politiques à l’Université du Colorado. Puis elle débarque à Los Angeles en 2004, trouve de petits boulots et devient l’assistante d’un organisateur de parties clandestines hebdomadaires de poker.

    Elle se fait remarquer par son intelligence, son atout majeur mis en avant tout au long de l’intrigue. Raison pour laquelle, virée sans ménagement par son patron, elle décide de monter son propre cercle avec une mise d’entrée de 250 000 dollars, très vite fréquenté par des stars, des millionnaires et de grands sportifs. Le succès est immédiat et la jeune femme règne bientôt sur l'empire du jeu clandestin à Hollywood. 

    Elle organise des parties où certains peuvent perdre jusqu'à un million en une seule nuit. Pourtant, assez rapidement brouillée avec ses amis acteurs inquiets qu’elle ne les trahisse, elle recrée à New York ses parties de poker auxquelles se greffent certaines personnes liées au crime organisé. Elle est alors prise dans un engrenage infernal. Le FBI qui la surveille de près procède à une rafle et tout ce monde tombe dans ses filets. 

    Le film, adapté du best seller de Molly Boom  Le grand jeu: Les mémoires d'une reine du poker déchue est signé Aaron Sorkin. Scénariste de Des hommes d’honneur, Steve Jobs ou The Social Network, il réalise ici son premier long-métrage. Il y raconte les choses du point de vue de Molly, battante dominatrice, revancharde et sexy brillamment incarnée par Jessica Chastain, dont il brosse un portrait plutôt flatteur.

    Aaron Sorkin n’a pas dû trop  se forcer pour booster son scénario, l’histoire de sa protagoniste contenant tous les ingrédients qui font mouche, ascension, chute et rédemption sur fond de pouvoir, de sexe, d’argent, de mafia, de services secrets. On reprochera toutefois à ce thriller psychologique qui se déroule sur un rythme effréné, un côté extrêmement bavard qui nuit un peu à la fluidité du récit, tendant du coup à larguer les béotiens du poker.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 3 janvier.

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  • Grand écran: mes films préférés de 2017

    maxresdefault.jpgLes chefs d’œuvre n’ont pas couru les écrans cette année, contrairement aux navets qui ont parfois atteint des sommets, à l’image de trop nombreuses comédies françaises et américaines. En d’autres termes, 2017 ne fut pas le cru du siècle même s’il n’en est qu’à son début. Reste qu’on a heureusement vu quelques très bons films, voire excellents. Plus ou moins dans le désordre, voici mes préférés.

    120 battements par minute, de Robin Campillo. Début des années 90. Alors que
    le sida tue depuis une dizaine d’années, les activistes d’Act Up multiplient les méthodes coups de poing et les mises en scènes chocs pour lutter contre l’indifférence générale à la maladie. Au cœur de l’action, deux amants vont mener leur propre combat. Une oeuvre rare, captivante, sur la nécessité d’alerter, de bousculer, où alternent les scènes d’amour, d’action, de débats. A la fois pudique et triviale, elle mêle l’intime et le politique. Insistant sur la libération de la parole, Campillo réussit par ailleurs à éviter tout pathos en évoquant la mort qui ne cesse de rôder autour de ces jeunes gens animés d’une soif de vivre, mais sacrifiés pour avoir trop aimé.

    Detroit, de Kathryn Bigelow. La réalisatrice confronte à nouveau l’Amérique à ses démons avec une redoutable immersion au cœur des émeutes raciales qui ont secoué Detroit au cours de l’été 1967, causant la mort de 43 personnes et en blessant 467 autres. Avec un remarquable souci d’authenticité, Bigelow s‘attarde longuement sur la nuit d’horreur du 25 juillet, pour en montrer dans les moindres détails jusqu’à l’insoutenable, la folie, les pulsions criminelles incontrôlées, les dérapages meurtriers de flics blancs avides de violenter et torturer des «suspects» à majorité noirs. Un thriller coup de poing, sous haute tension, et un portrait implacable d’une société alors minée par un racisme institutionnel, faisant écho à l’actualité 50 ans plus tard.

    aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaastacy.jpgLe Redoutable, de Michel Hazanavicius. Les esprits chagrins s’offusquent de cette «impudence» à s‘attaquer à la légende vivante de la Nouvelle vague, en crise existentialiste et cinématographique pendant et après Mai 68. On adore au contraire cette démystification fantaisiste de Godard où, sous l’ironie apparemment féroce, perce l’admiration envers l’homme et le cinéaste. Il est interprété par un formidable Louis Garrel, irrésistiblement drôle dans la peau du mythe, dont il emprunte à la perfection le look, la démarche, l’accent traînant, la cruauté, le discours outrancier, l’autodérision.

    The Battle Of Sexes, de Jonathan Dayton et Valerie Faris. Emmené par les excellents Emma Stone et Steve Carrell, les auteurs reviennent avec talent, maîtrise et humour sur le combat de la joueuse de tennis américaine Billie Jean King, icône alors âgée de 29 ans, qui se démène pour que les femmes touchent des primes équivalentes à celle des hommes. En s’appuyant sur son incroyable duel avec Bobby Riggs, 55 ans, ancien numéro un mondial, persuadé de la battre en trois coups de raquette! Mais le macho en fut pour ses frais lors du match suivi en 1973 par 30.000 spectateurs et 50 millions de téléspectateurs à travers la planète. 

    aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaamalric.jpgBarbara, de Mathieu Amalric. Mise en abîme aux frontières de la réalité et de la fiction, l’opus propose entre poème et rêverie musicale un portrait complexe, émouvant, de la mythique, insolente, capricieuse, autoritaire, fantasque, mélancolique Barbara. L’excellente Jeanne Balibar se révèle impressionnante. Habitée, naturelle, elle travaille son personnage, les chansons, composant au piano, s’entraînant à imiter la voix, s’appropriant les gestes, les accessoires, les attitudes de son modèle. Mais sans chercher le mimétisme. La ressemblance n’en est pas moins troublante.

    Faute d’amour, d’Andrey Zvyaguintsev. Surfant sur internet, le réalisateur russe trouve une info sur Liza Alert, une organisation de bénévoles vouée à la recherche de disparus. Voilà qui lui permet de disséquer une crise familiale. En instance de divorce, des parents se déchirent sous les yeux de leur fis de 12 ans, sans se préoccuper des dégâts qu’ils peuvent provoquer chez l’enfant en dramatique manque d’amour. Jusqu’au jour où il disparaît. La police ayant déclaré forfait, les investigations  sont confiées à une association spécialisée, Suit une deuxième partie en forme d’enquête où Zvyaguintsev se livre à une charge implacable contre une société impitoyable, égoïste, glaciale, entre désespoir et frustration.

    aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaamoon.jpgMoonlight, de Barry Jenkis. Enfant noir de Liberty City, quartier défavorisé de Miami, orphelin de père, vivant avec sa mère toxico, harcelé par ses camarades, Chiron n’a pas d’ami à part Juan, un caïd de la drogue qui le protège et devient un père de substitution. De surcroît, il doit assumer son homosexualité dans un environnement hostile. Avec ce scénario, on pouvait craindre le pire. C’est l’inverse. On découvre un film à contre-courant, privilégiant une approche poétique, empathique, sensuelle. Explorant avec finesse les rapports humains et les préférences sexuelles, le metteur en scène raconte, en trois périodes-clés, une quête d’identité faite de rejets, brimades et insultes, qui finiront par mener Chiron à s’accepter.

    Au revoir là-haut, d’Albert Dupontel. Deux rescapés des tranchées sortent traumatisès de la boucherie de la Première Guerre mondiale. L’un a perdu sa femme et son métier, l’autre y a laissé le bas de son visage. Pour se venger de l’Etat qui les ignore en dépit de leur sacrifice, ils montent une juteuse arnaque en vendant de faux monuments aux morts sur catalogue. Tout en recherchant l’immonde crapule qui les avait envoyés à l’abattoir après l’armistice. Un film brillamment adapté du roman éponyme de Pierre Lemaître, Goncourt 2013, où se mêlent humour trash, tragédie filiale, poésie, drame intime, cynisme, lutte des classes, lyrisme.

    aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaflorida.jpgThe Florida Project, de Sean Baker. Ce film à l’esthétique pop évoque dans des tons roses, verts, violets et jaunes l’envers du rêve américain, dénonçant la condition des laissés pour compte qui vivent dans des motels miteux à l’ombre de la férie Disney. Comme la turbulente, charismatique Moonee, six ans, sa très jeune mère et ses potes. Une chronique sociale émotionnellement forte, mais évitant tout pathos, complaisance ou jugement. Parfaits, les protagonistes sont des nom-professionnels, à l’exception de Willem Dafoe, particulièrement convaincant en paternel, attendrissant et bienveillant gérant de motel.

    Les gardiennes, de Xavier Beauvois. L’auteur rend hommage aux femmes qui, restées à l’arrière pendant la Première Guerre mondiale, ont continué à faire tourner l’économie française, alors que les hommes étaient partis au front, en assurant notamment le fonctionnement des exploitations agricoles. Mise en scène et photographie soignées pour le portrait de ces vaillantes résistantes trimant dur aux champs et à la ferme. Avec Nathalie Baye, sa fille Laura Smet et une révélation, la lumineuse Iris Bry.

    aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaabelle.jpgLa belle et la meute, de Kaouther Ben Hania. Luttant contre un système perverti dont elle démonte les rouages, l’auteure signe un singulier thriller politique féministe, en adaptant une histoire vraie qui s’était déroulée post Printemps arabe, en 2012. Celle de la jolie Mariam, violée par des policiers. Elle veut porter plainte mais, se heurtant aux dénégations, intimidations et menaces au sein du commissariat de ses agresseurs, elle va vivre une longue nuit cauchemardesque pour tenter de le prouver.

    Get Out de Jordan Peele. Chris, jeune photographe noir et sa petite amie blanche Rose, très amoureux l’un de l’autre décident de rencontrer les parents de Rose. Bien accueilli, Chris est troublé par le comportement étrange du jardinier et de la gouvernante, tous les deux black. Originale, inventive et angoissante, cette farce grinçante, anxiogène, à la frontière de l’horreur et du fantastique, aborde le racisme ordinaire avec un humour très…noir. Et laisse monter la pression au fur et à mesure que le héros bascule dans le cauchemar.

    aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaapaysan.jpgPetit paysan, d’Hubert Charuel. Alors qu’une épidémie de fièvre aphteuse se déclare en France, un éleveur de vaches laitières découvre avec horreur qu’une de ses bêtes est contaminée. Face à la menace de perdre son troupeau, il tue lui-même l’animal en cachette. Tombant dans l’illégalité, passible de prison, il est pris dans un engrenage infernal. Un premier long-métrage bien écrit, parfaitement documenté, mêlant thriller psychologique et réflexion sur les difficultés économiques et les tâches épuisantes des paysans.

    Borg-McEnroe, de Janutz Metz Pedersen. Retour sur la rivalité exacerbée de deux géants de la petite balle jaune, qui en ont changé la face. Nous sommes à Wimbledon en 1980 et les hommes vont s’affronter dans une finale qui deviendra l’un des plus grands duels de l’histoire du sport. Une confrontation aux allures de thriller entre Borg, beau gosse suédois faussement insensible encensé par le public (Sverrir Gudnason bluffant de ressemblance) et McEnroe, le bad boy américain, rebelle, impulsif et colérique (Shia Labeouf). On s’y croirait…

    Téhéran Tabou, d’Ali Soozandeh. Le réalisateur iranien réfugié en Allemagne, ouvertement militant, nous immerge au sein d’une société schizophrène et hypocrite, dans laquelle le sexe, la drogue et la corruption coexistent avec les interdits religieux, juridiques, traditionnels. A la fois poétique, politique et intime, cet audacieux métrage tourné en rotoscopie a valeur de témoignage avec sa peinture sociale dénonciatrice, dérangeante, provocante, sinon choquante.

     

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