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  • Festival de Cannes: la compétition, avec François Ozon, Catherine Corsini et les autres

    Retour sur une semaine de compétition où se dégagent plus particulièrement Benedetta de Paul Verhoeven, dont on a déjà parlé et Tout s’est bien passé de François Ozon, qui aborde de front le sujet polémique et puni en France du suicide médicalement assisté. Son film est adapté du roman autobiographique éponyme d’Emmanuèle Bernheim, qui a aidé son propre père à mourir.

    A 85 ans, celui-ci (André Dussollier) est hospitalisé à la suite d’un AVC. Il se réveille très diminué, totalement dépendant. Décidé à en finir rapidement face à une insupportable déchéance, cet homme qui a follement aimé la vie, demande l’assistance de sa fille. Déchirée, elle va finalement accepter . 

    Emmanuèle est incarnée par Sophie Marceau, qui marque ainsi son retour très convaincant dans un grand rôle. Mais ce qui domine dans le combat de cet homme pour partir dans la dignité, c’est la formidable prestation d’André Dussollier. Il peut prétendre à un prix d’interprétation. 

    Redoutablement transformé physiquement à l’aide de prothèse, s’exprimant très difficilement, il se révèle absolument bouleversant. Ce qui ne l’empêche pas de faire preuve d’humour et de causticité. Par exemple quand il se demande comment font les pauvres, en découvrant le prix d’un suicide assisté en Suisse… Un cynisme et un second degré à l’image du film de François Ozon et de son plaidoyer pour une liberté de choix, où il sait émouvoir sans pathos ni complaisance. 

    La fracture de Catherine Corsini

    Immersion dans les urgences d’un hôpital parisien, transformées en théâtre façon cour des miracles le temps d’une nuit explosive. Avec ce film, Catherine Corsini aborde de façon métaphorique les fractures d’une société française meurtrie et divisée.

    Elles sont symbolisées par le couple au bord de la rupture que forment  Marina Foïs et Valeria Bruni-Tedeschi. Le tout sur fond de révolte des Gilets jaunes, de violences policières, d’abandon de l’hôpital public et d’une grève des soignants qui continuent néanmoins à porter secours aux blessés.

    Une oeuvre sous haute tension entre scènes dramatiques et drôles auquel on reprochera une hystérie accentuée par la performance délirante de Valeria Bruni Tedesch. Survoltée et shootée aux médicaments, elle en fait vraiment des tonnes. 

    Julie (en 12 chapitres) du Norvégien Joachim Trier

    Pour la troisième fois à Cannes, le Norvégien Joachim Trier brosse le portrait audacieux et original d‘une jeune femme indépendante, à la recherche du bonheur, de sa voie professionnelle, de l’homme de sa vie, de sa place dans le monde. Mais à bientôt 30 ans, tour à tour chirurgienne, psychologue et photographe, elle ne parvient pas à se fixer. Alors qu’elle pense avoir trouvé une certaine stabilité auprès d’Aksel, 45 ans, auteur de BD à succès avec qui elle emménage, elle rencontre Elvind, un garçon de son âge. 

    Dans ce film qui traite de la maternité, du genre, du sexe, de la liberté des femmes ou des pratiques sociales, il y a des péripéties, de l’humour, du rythme, de l’invention, des trouvailles de mise en scène, Comme cette parenthèse onirique où le temps s’est arrêté. Et on découvre surtout une excellente actrice, Renate Reinsve, qui assure dans le rôle complexe de Julie. 

    Lingui du Tchadien Mahamat-Saleh Haroun

    Mère courage, Amina vit chichement dans les faubourgs de N’djaména, au Tchad, en vendant des paniers de fer. Alors qu’elle élève seule Maria, quinze ans, son monde déjà fragile achève de s’effondrer, quand sa fille unique lui annonce qu’elle est enceinte et qu’elle refuse de le garder. 

    Amina qui a vécu la même situation quinze ans plus tôt avant d’être bannie par sa famille, veut absolument aider Maria. Mais comment faire dans un pays où l’avortement est condamné par la religion et la loi ? Le combat semble perdu d’avance. C’est toutefois sans compter sur les liens sacrés, la solidarité et l’entraide qui unissent les femmes.  

    Politiquement et socialement fort, le métrage souffre d’un scénario trop basique aux rebondissements téléphonés. 

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  • Festival de Cannes: "Benedetta", sulfureux thriller érotico-clérical du provocateur Verhoeven. Virginie Efira sublime

    Il était attendu sur la Croisette comme le messie! Cinq ans après « Elle », Paul Verhoeven, revient avec « Benedetta », une adaptation de Sœur Benedetta entre sainte et lesbienne de Judith C.Brown, spécialiste de la Renaissance italienne et de l’histoire de la sexualité. Tout en faisant la distinction entre le sacré et le profane, il suit le vrai parcours d’une nonne lesbienne, autoproclamée « fiancée du Christ », mais condamnée à 35 ans de réclusion pour fraude et immoralité.  

    Ayant reçu les stigmates, Benedetta Carlini (Virginie Efira divine) a rejoint très jeune le couvent de Pescia en Toscane, alors que la peste ravage l’Italie au 17e siècle. Hantée, tourmentée par des visions religieuses et érotiques, elle sème le trouble dans la communauté, déchirée entre sa foi et son aventure avec l’effrontée Bartolomea, une jeune novice pauvre et maltraitée depuis son enfance, dont elle tombe amoureuse.  

    Le réalisateur adore bousculer son monde 

    Nul doute que cette sulfureuse comédie en soutane à la fois féministe, politique et ludique, en salle dès aujourd’hui dans les salles, va diviser les festivaliers. Comme chaque film de Paul Verhoeven, qui adore bousculer et interpeller les spectateurs pour les faire réfléchir et se remettre en question. 

    Toujours aussi iconoclaste et inspiré, le Néerlandais de 82
    ans propose un thriller audacieux, provocateur, subversif, mêlant sexualité, religion, violence et ambition humaine. S’attaquant aux tabous, l’auteur dénonce l’hypocrisie et la corruption de l’Eglise sur fond de mysticisme, de désir, d’interdit sexuel, de sacrifice, ne craignant pas l’humour, l’excès sinon le grotesque, dans des scènes oniriques outrancières.

    Virginie Efira se livre corps et âme

    Complexe, ambiguë, exaltée, prophétesse, mythomane ou manipulatrice sur laquelle plane le mystère, Virginie Efira pleine de grâce est sublime dans ce rôle charnel casse-gueule. Elle donne tout à Benedetta, qui imagine coucher avec des clones du Christ, livrant son âme et son corps qui va jusqu’à se transformer en arme de destruction pour mieux choquer les tartufes. A ses côtés on retrouve Charlotte Rampling, excellente en mère supérieure sévère, coincée, l’air détaché mais méfiante face à cette Benedetta capable de miracles. Ainsi que Lambert Wilson, tout aussi parfait en prévost véreux.

    A l’affiche dans les salles de Suisse dès le 9 juillet.

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  • Festival de Cannes: traqués et emprisonnés dans "Grosse Freiheit", des gays en quête d'une incertaine liberté

    Longue ovation pour Grosse Freiheit,, présenté dans la section Un certain regard. Le film raconte l’histoire de Hans Hoffman. Il est gay et l’homosexualité, illégale dans l’Allemagne jusqu’en 1969, est condamnée selon l’article 175 du code pénal.
    Certains homosexuels sont même passés directement des camps de concentration à la prison. Comme Hans, personnage sacrificiel et tragique. Constamment entre deux condamnations, il s’obstine à y rechercher la liberté et l’amour. 

    Le second long métrage du réalisateur autrichien commence par des films d’archives où des hommes se rencontrent dans des pissotières. Ce sont en réalité des pièces à conviction, permettant la persécution autorisée et abjecte de ces hommes traqués, qui se retrouvent derrière les barreaux. 

    Trois dates, 1968, 1945 et 1957, ponctuent ce film physique, austère, radical, mais non dénué de romanesque. Evoquant l’ignominie de vies volées, il se passe pratiquement entièrement entre les murs gris du pénitencier.  On y retrouve les mêmes individus à différents âges, passant leur temps dans l’atelier de couture pour confectionner, selon les époques, des bleus de travail ou des draps roses.

    Inlassable rebelle sans cesse puni, Hans poursuit une histoire amicale, parfois intime et parfois violente avec Viktor, meurtrier endurci mais capable de compassion. De talentueux comédiens portent cette quête intense et incertaine de liberté, à commencer par le remarquable Franz Rogowski dans le rôle du naïf et romantique Hans. 

     

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