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  • Grand écran: dans "Effacer l'historique", trois voisins azimutés partent en guerre contre les géants d'internet. Irrésistible

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    Toujours aussi déjantés dans leur manière de dénoncer les travers de la société, Benoît Delépine et Gustave Kervern, notamment réalisateurs de Louise Michel, Mammuth, Saint-Amour ou I Feel Good, évoquent cette fois, dans Effacer l'historique, les malheurs d’énergumènes en lutte contre la bêtise humaine à l’ère du numérique.

    Dans un lotissement en province, on découvre ainsi trois voisins genre gilets jaunes azimutés, piègés par les réseaux sociaux. Il y a Marie, victime de chantage à la sextape, Bertrand, dont la fille est harcelée au lycée, et Christine, chauffeur VTC dégoûtée par les mauvaises notes de ses clients, qui l’empêchent de progresser dans la branche.

    Ensemble, ils décident donc de partir en guerre, jusqu’à l’île Maurice et la Californie, contre les géants d’internet. Entre eux et les fameux GAFA, la bataille s’annonce plutôt inégale. Sinon carrément foutue d’avance. Encore que....

    Avec Effacer l’historique, le singulier, redoutable et attachant duo, justement récompensé par un Ours d’argent à la dernière Berlinale, met en scène une fable intelligente et subtile, très bien écrite, où il multiplie les situations et les gags saugrenus. Cette comédie grinçante en forme de farce anar se révèle à la fois réaliste et fantasque, hilarante et déprimante, absurde et loufoque, farfelue et mélancolique, drôle et triste, cynique et potache.

    Décryptage socio-politique unique

    Entre surconsommation, endettement, ubérisation, combat de pauvres toujours plus nombreux contre riches toujours plus riches, les deux auteurs proposent un décryptage socio-politique unique de notre monde connecté. Peuplé de dingues addicts, livrés avec leur plein consentement à la réalité virtuelle.

    Excellent, l’opus doit évidemment aussi sa réussite à ses acteurs, tous plus irrésistibles les uns que les autres. A commencer par les trois principaux anti-héros, Blanche Gardin, Denis Podalydès et Corinne Masiero. Mais on n’oubliera pas Benoît Poelvoorde, Bouli Lanners, Philippe Rebbot, Michel Houellebecq, ou encore Vincent Lacoste. A voir absolument.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 2 septembre.

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  • Grand écran: Dans "Police", Anne Fontaine met trois flics face à un terrible cas de conscience. Une réussite

    534426-police-de-anne-fontaine-avec-omar-sy-decouvrez-l-affiche-2.jpgTrois flics parisiens, Virginie (Virginie Efira) Aristide (Omar Sy) et Erik (Grégory Gadebois), se portent volontaires pour une mission inhabituelle. Il s’agit de reconduire un sans-papier à la frontière  Sur la route de l’aéroport, Virginie comprend qu’il risque la mort s’il retourne dans son pays. Face à cet insoutenable cas de conscience, elle tente de convaincre ses partenaires de le laisser s’échapper. 
     
    Police, excellent nouvel opus d’Anne Fontaine, l’un de ses meilleurs, n’est pas un ixième film sur l’institution. Tout en regroupant plusieurs problématiques, la réalisatrice se concentre sur son trio principal, confronté au quotidien sombre et sordide d’un métier usant moralement et physiquement. Qu’il s’agisse de récupérer les affaires d’une femme battue par son mari ou recueillir le cadavre d’un bébé dans un garage. 
     
    D’emblée, elle présente ses protagonistes principaux à travers la même journée montrée de trois points de vue différents. On découvre Virginie pleine de doutes, préoccupée par ses problèmes existentiels et domestiques, Aristide, fanfaron un peu lourdaud et macho, blagueur, aimant écouter Balavoine, ainsi qu’Erik, flic alcoolique, aigri, usé, qui n’en a plus grand-chose à foutre. Mais peut-être pas....    
     
    Après cette première partie, on passe à la reconduite sous grande tension du migrant à l’aéroport, où se situe le véritable enjeu de l’histoire. Dans le trajet en voiture propice au débordement d’émotions des policiers et de leur prisonnier,  Anne Fontaine évoque le redoutable dilemme entre l’obéissance aveugle à la hiérarchie et la transgression de l’ordre donné. C’est alors que Virginie tente de convaincre ses deux collègues de changer d’avis. 
     
    Servi par un scénario intelligent, une mise en scène habile et efficace, une belle photographie d’Yves Angelo, Police, un thriller qui touche, est en plus porté par trois comédiens formidables, très justes dans leur rôle respectif de héros du quotidien face aux misères du monde. 
     
    Anne Fontaine s’est plongée dans la vie d’un commissariat

    1583182442444_0620x0435_0x0x0x0_1583182464170.jpgRécemment de passage à Genève, Anne Fontaine nous en dit plus sur Police librement adapté (elle a notamment changé le dénouement) du roman éponyme d’Hugo Boris. L’élément déclencheur a été le fait qu’on lui désigne ce livre.

    "Cela m’a intriguée. J’ai imaginé que c’était du genre policier, ce qui n’est pas ma nature. Mais j’ai rapidement senti une proximité avec l’héroïne qui va faire une sorte de voyage intérieur. J’ai apprécié ce mélange chez elle entre l’intime et la fonction, ce que cache l’uniforme, sa fragilité qui l’amène à réfléchir sur l’inhumanité de leur mission".

    L’enjeu du film, c’est la question du libre arbitre

    Les règles sont strictes dans cette profession On ne donne pas la liberté de penser par soi-même. Cette rigidité est incarnée par Grégory Gadebois. Mais la désobéissance est vitale.

    Vos descriptions de la routine policière sont très réalistes. Avez-vous eu des contacts dans le milieu?

    Je me suis effectivement plongée dans la vie d’un commissariat. J’ai vu beaucoup de caractères différents. J’ai pu tous les observer grâce à un formateur de recrues qui a été mon guide. Le Roland Barthes de la police! J’ai retrouvé, comme dans Les Innocentes, un groupe socio-culturel enfermé dans la hiérarchie, des thèmes qui m’intéressent.

    Vous prenez votre temps pour installer vos personnages avec ces trois points de vue sur une même journée.

    J’avais le sentiment que cela créait une intimité. L’expérience les transforme. C’est le premier acte. On ne sait pas ce qui va se produire. Du coup, ils ne partent pas de la même façon vers Roissy.

    En chemin, Virginie doit persuader ses deux collègues de laisser leur prisonnier s’enfuir. 

    Aristide pense qu’elle débloque Mais on voit la faille chez lui. De son côté Erik se fait violence. J’ai beaucoup aimé traiter ce personnage opaque.

    Comment s’est opéré le choix des comédiens?

    J’ai tout de suite pensé à Virginie Efira et à Grégory Gadebois. Virginie a quelque chose de familier, tout en étant lumineuse, sensuelle, avec une vie derrière son masque. Quant à Gadebois, il est incroyable. Il a cette fibre populaire. Je l’adore.

    Et Omar Sy?

    Ce fut une rencontre un peu inhabituelle dans un hôtel. Nous sommes restés une heure ensemble. On a parlé de notre enfance. Aucun de nous deux ne se sent légitime à Paris. Nous partageons des sentiments identitaires complexes. Il a ce côté sexy, doux, vulnérable. Il m’a dit oui après avoir lu le scénario. Je lui ai demandé de se libérer de ses expressions trop appuyées. La direction d’acteurs, qui me passionne, joue sur des détails.

    Présidents, sa prochaine comédie politique

    Après Police, la cinéaste commence en octobre le tournage d’une comédie politique fantaisiste, Présidents. Sans le dire mais tout le monde le comprendra ils représentent Sarkozy et Hollande, se retrouvant tous les deux en Corrèze. Avec Jean Dujardin et Grégory Gadebois. Chanteuse lyrique, Dora Tiller sera la femme de Dujardin, tandis que Pascale Arbillot, une vétérinaire, jouera la compagne de Gadebois.

    Anne Fontaine envisage ensuite de s’attaquer à Ravel. Un gros défi. "J’ai toujours eu envie  d’écrire sur un grand compositeur. Mais Boléro sera financièrement un film dur à monter". On devrait y retrouver le charismatique et talentueux Swann Arlaud.

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 2 septembre.

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