Le film ouvre sur la vie quotidienne dans un village africain à l’heure du repas. Evoluent dans ce cadre la petite Dilili et ses parents que les promeneurs viennent voir, comme s’ils visitaient un zoo humain. En réalité, cette scène caricaturale se déroule dans un parc parisien lors de l'Exposition universelle de 1900. Dilili, princesse kanake née d’un père français et d’une reine néo-calédonienne fait partie d’un spectacle reconstituant les choses telles qu’on les imaginait à l’époque coloniale.
Parlant un français digne d’une académicienne, la fillette est l’héroïne du nouveau film d’animation façon manifeste féministe de Michel Ocelot, le fameux père de Kirikou, qui raconte ses aventures dans le Paris de la Belle Epoque. Protégée d’une grande bourgeoise parisienne, la jeune métisse, trop blanche pour la Calédonie, trop noire pour Paris…, rencontre un livreur en triporteur qui lui offre de découvrir la prestigieuse capitale.
Celle-ci est le terrain de chasse privilégié de la redoutable et mystérieuse société souterraine des Mâles-Maîtres qui enlève les fillettes dans le but de juguler une menaçante émancipation féministe naissante…Tous deux vont mener l’enquête tambour battant pour retrouver les victimes, aidés par les célébrités d’alors, à commencer par les pionnières dans la société patriarcale.
D’où un défilé à l’effet catalogue un rien fastidieux de personnages (surtout pour les enfants à qui est en partie destiné le film) : Marie Curie, Louise Michel, Sarah Bernhardt, Pasteur, Monet, Renoir, Toulouse-Lautrec, Proust, Jules Verne, Santos Dumont, la cantatrice Emma Calvé.
C’est elle qui aide plus particulièrement Dilili et le livreur dans leurs recherches effrénées qui finissent par les conduire dans les égouts. On y découvre les gamines kidnappées traitées comme des esclaves, vêtues d’une burka, forcées de se déplacer à quatre pattes quand elles ne servent pas de sièges à leurs terrifiants geôliers.
Dilili à Paris nous laisse retrouver avec plaisir le graphisme singulier du réalisateur. Entre conte poético-lyrique et pamphlet politique, Michel Ocelot propose un décor urbain théâtral aux couleurs vives, constitué de photographies retravaillées de Paris dans lesquelles il a intégré les dessins. Par ailleurs, cette fable au but éducatif et pédagogique qui met les femmes au centre, est une ode à la culture, la liberté, l’égalité, la lumière, face à l’oppression, l’obscurantisme, l’intolérance, le sectarisme, le racisme, l’ignorance, la peur de l’autre.
Pourtant ce plaidoyer qui résonne certes avec une actualité brûlante, manque de subtilité et reste trop premier degré pour entraîner une adhésion totale. Dommage.
A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 10 octobre.