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  • Grand écran: "Dogman", conte urbain très noir avec Marcello Fonte, prix d'interprétation à Cannes

    MARCELLO-FONTE-DOGMAN-MATTEO-GARRONE-2018-600x338.jpgToiletteur pour chiens dans une sinistre station balnéaire italienne qui semble coupée du monde, Marcello est un petit bonhomme simple, frêle et discret, apprécié de ses voisins Un jour, il voit revenir de prison son "ami" Simoncino, ancien boxeur accro à la coke qui se met à racketter, terroriser et brutaliser les habitants du quartier.

    Attiré par cette brute épaisse, insensible, Marcello incapable de lui résister en devient le martyr et se laisse entraîner malgré lui dans une redoutable spirale criminelle. Suite à l’apprentissage douloureux d’une trahison du monstre qui le mènera pour un an derrière les barreaux, tout en lui valant la colère et le rejet de la population, il va concocter une vengeance féroce.

    Dogman, conte urbain mettant en scène l’image implacable de loi du plus fort et d'une violence que l'auteur  dénonce, peut être vu comme le symbole d’une Italie minée par la violence et en proie à une dérive extrémiste. Matteo Garrone, l’auteur de Gomorra, signe là un film puissant, âpre, sous tension extrême. Drame humain d’une terrible noirceur, inspiré d’un fait divers sordide, il est porté de bout en bout par le remarquable Marcello Fonte (photo), sacré meilleur acteur au dernier Festival de Cannes.

    Une reconnaissance méritée pour ce tragique antihéros largué, quadragénaire chétif et timide au visage antique, limité physiquement et intellectuellement, pétri d'humanité. Atout majeur de l'oeuvre, il est de tous les plans, avare de mots pour exprimer son impuissance, mais émouvant de fragilité avec son regard de chien battu qui nous transmet sa peur. Et plus bouleversant encore lorsque blessé, à terre, il essaye de retrouver un semblant de dignité

    Insupportables humiliations

    Le réalisateur le suit dans son quotidien solitaire et infernal constitué d’une suite d’insupportables humiliations destructrices. Une existence cafardeuse, lugubre, sombre, brièvement traversée de quelques lueurs dans le rapport d’une douceur à fendre le cœur qu’il entretient avec sa fille de dix ans, ou avec ses molosses qu’il toilette avec une sorte de tendresse.

    Malgré leurs aboiements effrayants et leur gueule terrifiante remplie de crocs acérés qui font froid dans le dos, ils valent mieux que les personnages auxquels le malheureux Marcello est confronté. A commencer par le sadique Simoncino, abominable bête humaine.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 26 septembre.

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  • Grand écran: "I Feel Good", pamphlet comique anti-Macron avec Jean Dujardin et Yolande Moreau

    180921_IFeelGoodAdVitam.jpgVêtu d’un peignoir blanc et chaussé de claquettes en éponge, Jacques marche à contresens sur une autoroute en gesticulant et en marmonnant, avant de débarquer chez sa sœur Monique. Modèle de dévouement et de bienveillance, elle dirige un village d’Emmaüs dans le Sud-Ouest, consacrant sa vie aux plus démunis. Ils ne se sont pas vus depuis des années. Elle lui offre un toit et un emploi.

    Mais Jacques s’en balance de la générosité de Monique. Alors qu'elle a gardé la foi communiste de leurs parents et milite pour la décroissance au milieu d’un collectif de rescapés marginaux, Jacques, reconverti au capitalisme échevelé, a une vision du monde diamétralement opposée.

    Quadra raté condescendant et goguenard, il méprise les petites gens. « Si t’as pas un peignoir et des mules à 50 ans, t’as pas réussi ta vie » , explique-t-il à l’un d’eux. Fasciné par Bill Gates, il veut sa loge à Roland Garros, sa Trump Towers et être dans le Who’s Who. Pour y parvenir, ce bon à rien pathétique imbu de sa petite personne a une obsession: trouver l’idée du siècle, genre Rubik’s Cube, qui fera de lui un homme richissime. Et décide de monter une start up de chirurgie esthétique low cost

    Pamphlet comique engagé, absurde, en forme de manifeste anti-Macron, I Feel Good, est signé des incontournables Benoît Delépine et Gustave Kervern. Porté par leur impayable muse Yolande Moreau et du nouveau venu dans leur univers  Jean Dujardin qui fait son show jusqu'à l'ennui, il pointe les dysfonctionnements d’une société au matérialisme forcené, basée sur l’apparence, qui a égaré ses valeurs  dans sa propension toujours plus grande à ne prôner le succès que par l’argent.

    Pourtant, alors qu’il se veut déjanté et foutraque, le film déçoit en s’égarant dans le gentillet, les bons sentiments, le politiquement correct, l’humour convenu, à l’exception, la moindre des choses pour notre duo de contestataires, de quelques saillies désopilantes. Bref, avec cette critique sociale scénaristiquement pauvre et manquant de rythme, on est loin du road movie pataphysique de Mammuth, de l’humour noir de Louise Michel ou des désaxés de la norme du Grand Soir.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 26 septembre.

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  • Grand écran: "Un peuple et son roi", quête bancale de la liberté par une France insoumise

    2987281.jpg-r_1280_720-f_jpg-q_x-xxyxx.jpgAprès L’exercice de l’Etat, Pierre Schoeller poursuit son exploration des hautes sphères du pouvoir. Cette fois, il retourne dans le passé avec Un peuple et son roi, dans les trois premières années de la Révolution française. Une ambitieuse fresque politique où se croisent les destins de gens du peuple et des figures historiques dans la toute jeune Assemblée nationale.

    Reconstruisant la révolution, sa naissance, son développement avec ses grandeurs et ses bassesses infâmes, l’œuvre commence le Jeudi saint 1789 avec la cérémonie, à Versailles, du lavement des pieds des enfants pauvres par le roi, et se termine par sa décapitation le 21 janvier 1793.

    Entre ces deux scènes se succèdent la prise de la Bastille, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la marche des femmes sur Versailles, la signature par le roi des décrets d’abolition des privilèges après avoir quitté le célèbre château pour Paris, la fuite manquée à Varennes, le discours de Saint Just sur le procès du monarque, celui de Robespierre, respectivement en novembre et décembre 1792.

    Frénésie bouillonnante d’une nation qui bâtit une nouvelle société. Le sujet est aussi passionnant, ample, dense, retentissant, que difficile à traiter. D’autant que Pierre Schoeller veut lui ajouter un côté épique et romanesque. Malheureusement le réalisateur, courant trop de lièvres à la fois, n’est pas à la hauteur de ses aspirations.

    XVMcb842f44-874d-11e8-b8b4-8c07df39ac28.jpgEn dépit d’un immense travail de recherche, d'interventions des députés et de débats à l’Assemblée parfaitement documentés, de beaux éclairages, du rôle décisif donné aux femmes, omniprésentes et faisant pour la première fois entendre leur voix, le film est une quête bancale et souvent confuse de la liberté par une France insoumise. En cause notamment un montage chaotique de trente-six tableaux trop courts, une reconstitution et une figuration revues à la baisse faute d’un budget suffisant.

    Une autre limite se situe dans la représentation d’un peuple idéal, fier, aseptisé, faisant bloc, d’une unité sans faille, d’une droiture et d’une solidarité à toute épreuve. On regrette également le manque d’incarnation des personnages. En cause un casting cinq étoiles qui se révèle être davantage un handicap qu’un atout.

    Autour d’Olivier Gourmet, verrier de son état (prétexte à une métaphore entre fusion, flammes et explosion), et de Noémie Lvosky sa compagne dans le film, Pierre Schoeller a en effet réuni Adèle Haenel, lavandière se rêvant citoyenne, Céline Sallette, vendeuse de harengs, Izia Higelin, victime expiatoire, Gaspard Ulliel, voleur de poules gracié, Laurent Laifitte, Louis XVI grognon Louis Garrel, Robespierre impitoyable, Nils Schneider, Saint-Just réclamant la mort du roi, Denis Lavant, scandaleux Marat déchaîné.

    Propres sur eux, les manants exhibent de surcroît d'improbables dents blanches, une belle peau et des ongles soignés. Et comme il faut que chacun ait une partition plus ou moins égale dans cet opus choral, l’ensemble a un côté théâtral qui sonne souvent faux. Peut-être en sera-t-il autrement dans une éventuelle deuxième partie intitulée Un monde nouveau.

    A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 26 septembre.

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