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Grand écran: "Joyland", un appel à vivre librement sa sexualité au Pakistan. Coloré et audacieux

Dans ce premier long métrage, qui s’est vu décerner en mai dernier à Cannes le prix du jury de la section Un certain regard ainsi que la Queer Palm, le Pakistanais Saim Sadiq nous emmène à Lahore, dans une famille conservatrice, stricte et respectueuse des traditions. Plusieurs générations cohabitent sous le même toit, dont le cadet Haider et sa femme. 

Sans boulot, fauché, frustré, ne jouissant d’aucune intimité, le jeune homme se sent coincé au milieu de cette smala sous emprise patriarcale toxique, où il se cherche désespérément. Il a constamment son père sur le dos, qui lui reproche de ne pas s’acquitter des tâches masculines, qu’il s’agisse de tuer une chèvre, d’empêcher sa femme de travailler, ou de lui donner un petit-fils. Et le somme de trouver un travail pour contribuer à subvenir aux besoins des siens.

Mais Haider aimerait tant mener son existence comme il l’entend. Un jour, il déniche un job dans un cabaret érotique et tombe fou amoureux de Biba, une flamboyante performeuse trans aux dents longues et au caractère de cochon qui décide de l’engager dans sa troupe. Voilà qui ne simplifie pas franchement son quotidien sous le joug paternel...

Bien que les transgenres restent au ban de la société, la mise en vedette de Biba n’est pas seulement une occasion, pour Saim Sadiq, de défendre leurs droits en nous embarquant dans une romance interdite, mais aussi un moyen de discuter de thématiques qui le passionnent.

Nombreux sujets abordés

Avec Joyland, qui est aussi le nom d’un parc d’attractions à Lahore, le cinéaste évoque la façon de s’épanouir et appelle à vivre librement sa sexualité dans un milieu fermé à des orientations différentes. Issu de la classe moyenne, Saim Sadiq s’est inspiré de sa propre famille et d’un théâtre près de chez lui, où il a découvert un monde moins tabou qu’il l’imaginait. C’est ce qui l’a poussé à interroger le concept de désir «qu’on passe notre vie à essayer de cacher, dit-il», de masculinité, de féminité, à questionner sa place au sein d'une société à laquelle il appartient, qui l’a en même temps façonné et lésé. 

Surfant sur une histoire d’amour impossible, le réalisateur aborde ainsi courageusement de nombreux sujets, de la famille à la politique,  en passant par le sexe, le patriarcat, la religion Il propose ainsi une chronique en forme de radioscopie critique d’un paya à la fois ultra conformiste et en voie de mutation.  

Première pakistanaise en sélection officielle sur la Croisette, Joyland avait alors  fait sensation et emporté l’adhésion d’une majorité de la critique, qualifiant l’opus d’extrêmement fort et bouleversant. Bien qu’on l’estime tenir davantage de l’audace, de la curiosité et de la découverte que de l’incontestable réussite cinématographique, on n’en retiendra pas moins aussi son côté attachant, coloré, joyeux, chorégraphique. Et la qualité de l’interprétation.

A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 5 mars. 

Lien permanent Catégories : Sorties de la Semaine 0 commentaire 0 commentaire

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