Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Sorties de la Semaine - Page 294

  • Cinéma: "Pelo Malo" dénonce l'homophobie et l'intolérance

    1378830015badhair_011-resize-375x210[1].jpgRéalisatrice peu prolifique, Mariana Rondon n’en connaît pas moins un joli succès en Amérique latine. Cinq ans après la sortie de Cartes postales de Leningrad où des enfants s’inventent un monde pour se protéger des horreurs de la guerre, la cinéaste revient avec  Pelo Malo, (Chevelure rebelle) où elle raconte l’histoire d’un garçon de neuf ans. 
     
    Il s’appelle Junior, vit à Caracas avec sa mère et son petit frère de deux ans. Mignon, de constitution délicate, il est obnubilé par ses cheveux qu’il a frisés comme son père (par ailleurs absent), alors qu’il les aimerait tellement lisses comme ceux de Marta, sa jeune maman. Dans l’espoir de dompter cette toison haïe qui lui pourrit l’existence, il s’enferme dans la salle de bains, passant des heures devant la glace à se coiffer et se recoiffer, allant jusqu’à enduire ses boucles épaisses  de mayonnaise ou d’huile pour mieux les aplatir. 
     
    Ce comportement coquet déplaît fortement à Marta, qui y voit le signe d’une potentielle homosexualité. D’autant que Junior n’aime pas le sport, veut être chanteur, danse avec sa grand-mère qui lui apprend des chansons kitsch et joue à la poupée avec  une copine acariâtre et peu gâtée par la nature, rejetée par les autres enfants. Il adore aussi regarder le concours de Miss Vénézuela à la télévision et s’intéresse de trop près à un voisin plus âgé qui se balade en débardeur sous sa fenêtre.
     
    Relations conflicttuelles

    Autant dire que le gamin, ne correspondant pas à la norme, a du mal à se couler dans le moule ardemment souhaité par sa mère. Ce qui provoque entre ses deux êtres des relations particulièrement conflictuelles. Certaine qu’il va souffrir dans un monde dominé par la religion et la masculinité, Marta s’ouvre de ses angoisses à un médecin, usant en outre de divers moyens pour essayer de viriliser son rejeton. Tandis que ce dernier, aspirant à un amour maternel qui lui est refusé, lutte pour assumer une différence qu’il ne fait que pressentir. 
     
    Les obsessions capillaires de Junior et ses petits travers servent naturellement de prétexte à la réalisatrice pour stigmatiser l’homophobie et l’intolérance.au sein de la société vénézuélienne Mais elle s’y prend avec finesse, évoquant  l'orientation sexuelle de son pré-ado par petites touches, sans rien dramatiser, ni vouloir absolument illustrer son propos par l’image. 
     
    Pas question non plus pour Mariana Rondon  de tomber dans les bons sentiments ou la compassion. Certes bienveillante, elle peut aussi manifester une certaine dureté, sinon se montrer cruelle dans le dénouement d’un récit singulier aux personnages attachants et parfaitement interprétés. A commencer par Samuel Lange Zambrano (Junior) et Samantha Castillo (Marta). Ils contribuent largement à la réussite de ce film bien écrit, bien mis en scène, qui a reçu le Coquillage d’Or au dernier Festival de San Sebastian.

    Film à l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 2 avril.

    Lien permanent Catégories : Sorties de la Semaine
  • Cinéma: "Her", passion insolite entre un homme et une machine

    k-bigpic-e1376010501535[1].jpgNous sommes à Los Angeles, dans un futur proche. Theodore Twombly est un homme secret, tourmenté, au caractère complexe. Anéanti par une douloureuse rupture, il reste hanté par les images de son bonheur perdu. Noyant son chagrin dans l’informatique de pointe, il décide d’acheter un programme ultramoderne s’adaptant à la personnalité de chaque utilisateur. 
     
    Il fait ainsi la connaissance de Samantha, une voix ensorcelante, sexy et sensuelle de machine, qui réveille ses sentiments par son humour, sa compréhension, sa tolérance et son intelligence. Petit à petit leur désir commun croît, ils tombent amoureux et vivent une passion pour le moins insolite.
     
    Cette love story inédite entre un humain et un système d’exploitation n’est pas loin d’être déjà labellisée culte par de nombreux critiques sous le charme. Elle est en gros décrite comme un  chef d’œuvre exaltant, bouleversant, fascinant de beauté, d’intelligence, de sensibilité, de grâce d’humour et de poésie.
     
    Ce fol enthousiasme est exagéré. Mais il est certain que le réalisateur Spike Jonze, notamment auteur de Dans la peau de John Malkovich, livre dans cette fable mélancolique entre fantastique et romantisme, une analyse plutôt fine des rapports amoureux dans un univers de science-fiction pas si éloigné du nôtre. 

    Solitude et absence de communication

    Le plus intéressant et pertinent est toutefois ce qu’il dit de l'extrême solitude, d’une absence de communication entre les êtres, culminant dans des scènes visuellement révélatrices de gens se croisant sans se voir, également épris de leur smartphone ou autre appareil plus sophistiqué, ce qu’il laisse entrevoir de la peur du futur, voire du fantasme masculin de la femme idéale. Le tout induit par l’avancée de nouvelles technologies. 
     
    Pourtant, passé le début intrigant et très prometteur d’une option amoureuse virtuelle, la romance originale dont le réalisateur prétend revisiter les vieux codes, se traduit finalement par une bluette banale, conventionnelle et longuette.
     
    Elle déçoit par son contenu fade et superficiel, où le seul élément un rien extravagant consiste dans la découverte de Théodore effondré, apprenant que sa chère Samantha parle simultanément avec des milliers de gens et entretient les mêmes relations "charnelles" avec des centaines d’autres. Il en ressort que le partage est insupportable et qu’il est aussi tragique d’être plaqué par un système d’exploitation que par une vraie personne. De quoi retomber sur terre. 
     
     
    On salue en revanche l’interprétation décoiffante de Joaquin Phoenix envoûté par une simple oreillette (photo). Il joue remarquablement sa partition sans partenaire, la voix de Scarlett Johansson ayant été  rajoutée en post-production. La comédienne se montrant largement à la hauteur, tous deux finissent par emporter le morceau.

     
    Film à l’affiche dans les salles romandes dès mercredi 26 mars.

    Lien permanent Catégories : Sorties de la Semaine
  • Cinéma: "Aimer, boire et chanter", ultime fantaisie de l'artisan Alain Resnais

    Cinema_pics_809[1].jpgPour la troisième fois après Smoking/no Smoking et Cœurs, Alain Renais adapte une pièce du dramaturge Alan Ayckbourn,  Aimer, boire et chanter. Un film au parfum délicieusement british. En principe cela n’a rien d’étonnant vu qu’il se déroule de surcroît dans la campagne du Yorkshire, mais encore fallait-il en imprégner la pellicule.  

    Cette comédie s’articule autour d’un homme, l’énigmatique George Riley, n’ayant plus que quelques mois à vivre. Ce qui bouscule le quotidien de trois couples amis. Bien qu’absent de l’image, il monopolise les conversations entre les six personnages dans cette nouvelle réflexion sur la mort que propose le cinéaste, faisant étrangement écho à son propre décès survenu récemment, à l’âge de 91 ans. 

    Titre épicurien, Aimer, boire et chanter sonne en outre comme un leurre, plus particulièrement  dans sa première proposition, étant donné que les hypocrites protagonistes ne cessent de se trahir. Plus particulièrement les trois femmes, Tamara, Monica et Kathryn (Caroline Silhol, Sandrine Kiberlain, Sabine Azéma, photo) sur qui le mystérieux George exerce une redoutable séduction, promettant à chacune de l’emmener en vacances à Tenerife. Une invitation provocante, source de situations jubilatoires.  

    Dans des décors extérieurs tape-à-l'oeil et kitsch, formés de panneaux verticaux de couleurs différentes combinés avec des dessins de Blutch, Alain Resnais installe un de ces dispositifs scéniques qu'il affectionne, détournant une dernière fois sans complexe les codes pour abolir, beaucoup plus joyeusement que dans Vous n’avez encore rien vu, la frontière entre cinéma et théâtre.

    L’artisan du septième art livre ainsi un opus inventif, bizarroïde, audacieux, qui lui a valu, lors de la Berlinale en février, le Prix Alfred Bauer récompensant l’ouverture vers de nouvelles perspectives dans l’art cinématographique. Il assume pleinement une distance ludique jusque dans la tombe alors qu’on lui reproche étonnamment le contraire.

    A l’évidence Alain Resnais s’amuse dans ce vaudeville plein d’humour et d’autodérision, d’émotion aussi, aux dialogues drôles, révélateurs, incisifs, caustiques, sinon parfois cruels. De quoi se délecter pour ses acteurs fétiches ou fidèles, de sa compagne Sabine Azéma évidemment à André Dussolier, en passant par Sandrine Kiberlain ou Hippolyte Girardot.


    Film à l’affiche en Suisse romande dès mercredi 26 mars.


     

    Lien permanent Catégories : Sorties de la Semaine