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Grand écran: "Rouge", un thriller politico-socio-familial engagé à portée écologique. Captivant

Il nous avait séduit avec  Good Luck Algeria (2016) où, pour sauver leur fabrique de skis, deux amis d’enfance tentent l’improbable: qualifier l’un d’eux, Sam, aux Jeux Olympiques pour l’Algérie, le pays de son père. Après le récit de ce pari fou, une manière aussi pour le héros, de renouer avec ses racines. Farid Bentoumi propose Rouge, un  thriller politico social engagé à portée écologique, sur fond de relation père-fille virant au conflit générationnel.

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les deux films ne sont pas si éloignés l’un de l’autre. Si le ton est différent, on reste dans une histoire de famille chère à l’auteur, dans la  transmission d’un engagement, dans la volonté de se battre. A l’image de Nour (Zita Hanrot), une jeune infirmière qui vient d’être embauchée dans l’usine chimique où travaille Slimane (Sami Bouajila), son père, délégué syndical et cheville ouvrière de l’entreprise depuis des années. 

Alors que celle-ci est en plein contrôle sanitaire destiné à prouver qu’elle respecte ses engagements environnementaux,  Nour commence sérieusement à se poser des questions en découvrant des dossiers médicaux trafiqués, des accidents non déclarés, tandis qu’une journaliste (Céline Sallette) enquête sur l’épineuse et dangereuse question de la gestion des déchets. Devenant la cible d’attaques violentes émanant de toutes parts.    

Et pour cause. Les deux femmes ne tardent pas à découvrir que cette usine cache des pratiques plus que douteuses avec la complicité des élus locaux. La santé publique et la préservation de la nature ne pèsent pas lourd face aux enjeux économiques. Nour va devoir choisir entre se taire ou faire éclater la vérité et trahir ainsi son père, qui a couvert le mensonge de ses supérieurs pour sauvegarder les emplois.  

Rouge est principalement porté par deux très bons comédiens (photo). D’un côté Sami Bouajila excellent dans ce quinquagénaire complexe, sympathique, instinctif, généreux, un peu lâche. De l’autre  Zita Hanrot, magnifique lanceuse d'alerte, fragile mais déterminée. Habités, ils donnent vraiment l’impression d’être père et fille. Ils ne jouent pas leur rôle, par ailleurs écrit spécialement pour eux, ils le vivent. 

Dans ce film particulièrement emblématique de notre époque, traitant de sujets essentiels, comme la pollution, le chantage à l’emploi chez les politiques (vous nous dénoncez, on ferme la boîte), la difficulté d’être un délégué syndical, un lanceur d’alerte, Farid Bentoumi s’appuie sur son expérience personnelle et ses nombreuses recherches sur la gestion des déchets. Notamment par l’usine de Gardanne près de Marseille qui rejette des boues rouges toxiques dans la mer, au mépris des mises en garde des autorités sanitaires. 

«Rouge est très documenté  mais n’est pas un documentaire. Il s'agit d'une fiction librement adaptée de faits réels avec une dimension autobiographique. Je suis issu d’un milieu populaire, fils de militants syndicalistes communistes et je m’en sers. Il y a du vécu là-dedans. Quand j’ai une base solide, cela me permet d’aller plus loin dans ce que j’ai envie de raconter», nous explique-t-il  lors d’une rencontre à Genève.

Un mot sur vos personnages? « Ils sont représentatifs de leur génération. Slimane est un homme qui pense se battre pour ses collègues alors qu’il ne fait que ce qu’on lui dicte, comme toujours et depuis longtemps. Au contraire, Nour n’hésite pas à  chambouler. Elle ne veut pas qu’on lui mente. Surtout pas son père. Souvent il lui dit qu’elle ne comprend pas. Mais elle comprend très bien. Elle pense, avec raison qu’elle a son mot à dire dans cette affaire. D'ailleurs Slimane finira par basculer de son côté et agir.»

En parlant, elle sait pourtant qu'elle va le trahir et en souffre. « Plus il y a d’amour, plus c’est difficile. C’est le principe de la tragédie. Nour fait exploser sa famille pour une cause juste. J'en fais une véritable héroïne, une Antigone moderne dont on a besoin aujourd’hui. Je pars du noyau familial pour évoquer quelque chose de plus grand».

On évoque un Dark Waters  à la française pour Rouge. Qu’en pensez-vous ? « C’est un honneur. Dark Waters, mais aussi  Erin Brockovich et Promised Land m’ont en effet inspiré. Les trois partent d’un individu très humain qui écoute son instinct, ses doutes. Cela dit, la société américaine est très manichéenne. Chez moi, il n’y a pas de méchants et de gentils. Je ne donne pas tort ou raison. J’essaye de ne pas juger». 

A l'affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 18 août.

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