L’an dernier c’était Welcome To New York qui devait bousculer la Croisette, cette année ce fut Love, annoncé comme l’événement sulfureux de ce cru 2015. Affiche libertine voire plus, pour ce film labellisé hot signé Gapar Noé, cinéaste dérangeant, déterminé à choquer. Il n’en fallait pas davantage pour créer l’excitation. Et rameuter le client en masse.
Résultat attendu avec cohue, longue file d’attente, spectateurs furieux refoulés lors de la projection de minuit à Lumière. Et resucée le lendemain à Bazin, petite salle de quelque 400 places. Sauf que cela n’a rien de très extraordinaire, la même chose se reproduisant inexorablement tous les jours pour les malheureux aux badges de la mauvaise couleur.
Pour résumer l’affaire, le pauvre Murphy au trente-sixième dessous se retrouve seul dans son appartement et se souvient douloureusement de la folle passion réciproque vécue avec Electra. Qui a mystérieusement disparu. Et nous voici partis pour une love story en 3D dégoulinante avec sperme et larmes, destinée donc à faire bander les mecs et pleurer les filles. Le moins qu’on puisse dire c’est que Gaspar Noé a raté son coup, vu les sifflets, sinon l’indifférence totale que la chose a suscités jeudi matin.
Et pour cause. Car ce qui dérange, ce n’est pas la profusion ennuyeuse de scènes de cul non simulées, mais esthétisantes façon porno de luxe. Au-delà de la forme, il y a hélas le fond, navrant. Par exemple le discours d'une rare banalité de Gaspar Noé et sa manière d’aligner sans complexes des platitudes comme " la vie c’est ce que tu en fais, elle n’est pas facile. en naissant on sait qu’on va mourir, je n’ai pas peur de mourir je ne veux pas souffrir…et autres lieux communs du genre.
Sans oublier surtout Murrphy, alias Karl Glusman, le héros de l’histoire. Un Américain plutôt belle gueule mais fruste et bas de plafond, dont le vocabulaire se résume à "fucking" et "you are a piece of shit". Ce qui serait un moindre mal s’il n’était pas par ailleurs beaufissime, macho et homophobe…