Quentin Dupieux, par ailleurs DJ connu sous le nom de Mr Oizo dans le monde de la musique, est aussi une sorte de gourou de celui de la pellicule. Ses fans forment pour ainsi dire une secte, encensant frénétiquement ses œuvres complètement barrées. A ce jour il en a commis sept du genre, dont quatre longs-métrages. On citera «Steak» où Georges, souffre-douleur de ses camarades de classe, craque et les mitraille et «Rubber», l’histoire démente d’un pneu psychopathe.
Là, il propose une comédie encore plus déjantée que d’ordinaire intitulée «Wrong Cops» et se déroulant dans une petite ville de Californie. Un film à sketches parti d’un court, qui laisse découvrir des flics dérangés, obscènes, corrompus jusqu’à la moelle et au comportement malsain qui patrouillent dans les rues.
Le plus dingue (l’Américain Mark Burnham) deale de l’herbe cachée dans des rats et des poissons morts. Se piquant d’être mélomane, il terrorise ceux qu’il croise et notamment un ado attardé et introverti (Marilyn Manson) sous prétexte de lui apprendre ce qu’est la bonne musique (photo).
Ses collègues, caricatures de crapules, sont à la hauteur. Il y a un obsédé sexuel qui harcèle les filles pour qu’elles lui montrent leurs seins, un loser borgne et frustré (Eric Judor, le pote de Ramzy) se rêvant future star de l’électro, un lâche particulièrement débile cherchant à se débarrasser d’un vieux quasiment réduit à l’état de cadavre. Sans oublier une fliquette blondasse du genre pétasse, adepte du chantage.
Du néant sanpoudré de réalisme
En résumé des keufs peu portés sur la défense de la loi, mais dictant la leur. Ce petit monde fortement alcoolisé se retrouve finalement au cimetière et fait la fête en dansant sur les tombes pour rendre hommage à un pote décédé. «Putain, quelle bombe !» Peut-on notamment lire sous la plume d’un internaute, résumant le plaisir fou pris par d’autres inconditionnels.
N’en déplaise aux passionnés, Quentin Dupieux qui se veut délirant en imaginant un univers glauque et décalé dans une ambiance rétro, déçoit. On relèvera surtout un grand néant artistique que l’auteur, envoyant valser tous les tabous, n’épargnant rien ni personne, des gays aux handicapés en passant par la morale et l’autorité, saupoudre étonnamment d’une pointe de réalisme. «C’est un regard léger sur les misères de nos sociétés, un regard attendri et méprisant sur l’être humain», remarque- t-il.
Côté musique, élément essentiel dans ses films et ici omniprésente, on n’atteint pas non plus des sommets. Explication de l’intéressé: "Le film est délibérément bête, donc je pouvais utiliser ma musique de dégénéré sans que ça l’abîme..." On salue bien bas une telle lucidité.
Film à l'affiche dans les salles romandes dès mercredi 19 mars.