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  • Grand écran: "O Fim do Mundo", film de résistance sur une jeunesse lisboète meurtrie

    O-Fim-do-Mundo-11.jpgDans ce long métrage qui commence par un baptème et se termine par un enterrement, symbole de la fin d’un cycle et du début d’un autre, Basil Da Cunha suit les déambulations du jeune Spira (le beau Michael Spencer). Après avoir passé huit ans dans un centre pour mineurs, il retrouve sa famille et ses potes en revenant à Reboleiria un bidonville de la banlieue de Lisbonne voué à la démolition, où le réalisateur vaudois d'origine portugaise vit depuis dix ans.   

    Le retour de Spira, à la recherche d’un travail, rêvant d’un futur qui n’a pas grand-chose à lui offrir, n’est pourtant pas du goût de Kikas, un vieux trafiquant. Il lui fait comprendre qu’il n’est pas le bienvenu dans ce quartier à deux pas du centre de la capitale envahie par les touristes, où les habitants désoeuvrés, rejetés par le capitalisme, se débrouillent comme ils peuvent pour survivre. Ce sont les voisins et amis du cinéaste, qui en montre à la fois les côtés humains et brutaux.

    S’inspirant de leurs histoires, mêlant la réalité et la fiction en créant un univers parallèle, le cinéaste dresse dans O Fim do Mundo le portrait d’une jeunesse meurtrie, à travers des personnages dont on a volé l’enfance. Ils ont perdu leur innocence et prônent les vertus du crime à l’ancienne.

    Humaniste, l’auteur aime valoriser, mettre en lumière des gens qui ne le sont pas, leur donner de la visibilité à travers le cinéma, leur rendre une dignité et une parole qu’on leur refuse. Dans cette favela il magnifie les habitants, à l'image de Spira qui, tel un ange noir, la traverse en essayant de voir plus loin en dépit d'un avenir bouché. «J’ai voulu faire un film de résistance, sur la fin d’un monde, d’un quartier, d’une génération, représenté par cet endroit, un des derniers maquis où on peut vivre autrement.»

    Pour lui, c’est une résistance à la normalisation qui lui fait peur, à la modernité. «Même si elle s’immisce à travers quelques téléphones portables, il y a une volonté de ne pas rester rivé à son ordinateur.»  Comme dit l’un de ses personnages, ce n’est pas de cette manière qu’on va conquérir le monde ou se faire de l’argent.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 11 mars. 

     

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  • Grand écran: dans "Sous la peau", Robin Harsch suit trois ados sur le douloureux chemin de la transition. Interview

    Sous-la-peau-8.jpgEffie Alexandra, Söan et Logan sont nés dans le mauvais corps. Avec des attributs qui ne correspondent pas à ce qu’ils sont. Obsédés par ce qui leur manque ou ce qu’ils ont en trop, par le regard de l’autre, par le dire ou le cacher. Pendant plus de deux ans, le Genevois Robin Harsh, se mettant à la place du spectateur, du parent ou du jeune qui se pose une foule de questions, a suivi ces trois adolescents sur le long et douloureux chemin de la transition, le grand bouleversement  qu’elle provoque chez eux, leurs parents, les difficultés qu’elle entraîne à l’école et dans la société.

    Mais il est surtout question d’une quête de leur véritable identité. De cette identité enfouie au plus profond de chacun d’eux. «Aujourd’hui on parle de LGBTI, mais il  n’y a pas, dans l’alphabet, suffisamment de lettres pour décrire toutes les différences de l’humanité», explique Effie, qui ne s’est jamais senti un garçon. «J’étais une fille avec des organes génitaux différents. Je dirais même que j’avais un pénis de fille et que peut-être il allait tomber un jour. Je suis libre depuis que j’ai des seins. Mon corps m’appartient.»

    «Dès que j’arrivais, ils me disaient “T’es un garçon ou t’es une fille ?” remarque Söan. « Que ça, tout le temps… Du coup, il y a un moment où j’ai basculé à l’opposé. Je me maquillais, j’avais un sac à main… Ce que je ne ferais plus jamais de ma vie aujourd’hui… » Pour Logan, c’est juste le haut qui le dérange beaucoup. «Comme une prison que t’as envie d’arracher.».

    IMG_8506-rotated.jpegRobin Harsch, 42 ans, auteur de plusieurs courts métrages et de documentaires pour la télévision, s’est lancé dans l’aventure par hasard. « En 2015,  une amie me parle de la création du Refuge à Genève, un centre qui  permettra à des adolescents LGBTIQ+ de venir parler de leurs problèmes en lien avec leur préférences sexuelles ou leur identité de genre. Je me suis dit que cela ferait un bon thème de documentaire.»

    Il a vu plusieurs gays, mais aucun ne voulait être filmé à visage découvert. «J’ai donc laissé tomber le projet et décidé, deux ans plus tard, de me concentrer sur les trans, grâce à Effie Alexandra qui avait envie de parler. J’ai ensuite rencontré Söan et Logan.»

    Au début, Robin pensait les accompagner pendant six mois.  « Mais c’était trop peu, chacun d’eux étant dans une étape différente sa transition et l’expérience a duré beaucoup plus longtemps. Tous les trois se sont livrés facilement. Le courant a passé très vite. Peut-être parce que je leur ai beaucoup parlé de moi, de de ma vie, de mes histoires d’amour.»

    Un soutien parental primordial

    Robin Harsch s’intéresse aussi évidemment aux parents, qui ont été plus difficiles à convaincre de s’exprimer. Il a fallu établir la confiance. La mère de Logan évoque alors sa souffrance. « C’est comme un deuil. Comme si ce garçon allait tuer ma fille que j’ai connue pendant dix-huit ans. Puis avec le temps, on récupère un jeune homme épanoui, bon à l’école, qui va mieux... » Pour la mère de Söan, il n’y a pas de genre. « Il n’y a pas de il ou elle. Ce qui reste c’est l’enfant. Fille, garçon, l’enfant. Il n’y a que lui. » 

    Le soutien parental se révèle  primordial dans la mesure où plus de 70% des jeunes candidats à la transition ont eu des idées suicidaires. Un sur trois passe à l’acte ou fait une tentative selon des études internationales. Il n’y en a pas en Suisse, mais d’après une éducatrice du Refuge, le risque chute de 93% quand le trans est soutenu par son entourage. Reste que certains jeunes rejetés, voire menacés  par leur famille sont en danger. D’où un hébergement proposé au centre pour préserver leur sécurité physique ou psychique.

    Avec ce documentaire, Robin Harsch espère apporter sa petite pierre. «J’ai surtout pensé à ceux qui ignorent tout de la transidentité et ont des a priori.  On voit heureusement de plus en plus de films sur le sujet et c’est tant mieux. Je pense que les mentalités changent, principalement chez les jeunes qui se montrent de moins en moins jugeants. Par exemple mon fils de neuf ans trouve que c’est bien».  

    A l’affiche le 11 mars à Genève et Lausanne, le 18 à Neuchâtel et ensuite dans le reste de la Suisse.

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  • Grand écran: "De Gaulle": dans l'intimité du héros, avec Lambert Wilson et Isabelle Carré

    image-nicxxq900_dr_cinexx-040320203.jpgMai 1940. La guerre s’intensifie, l’armée française s’effondre, les Allemands sont aux portes de Paris. La panique gagne le gouvernement qui envisage d’accepter la défaite. Un homme, Charles de Gaulle (Lambert Wilson, photo) qui vient d’être promu général, est convaincu que tout espoir n’est pas perdu, qu’il faut s’opposer au maréchal Pétain et continuer le combat. Sa femme Yvonne (Isabelle Carré) est son premier soutien, mais très vite les événements les séparent. Charles rejoint Londres où il prononcera son fameux appel du 18 juin sur les ondes de la BBC.

    Contrainte de fuir la maison familiale de Colombey-les-deux-Eglises tandis que le pays sombre dans le chaos, Yvonne se lance sur les routes de l’exode avec la gouvernante Mlle Potel (Catherine Mouchet), ses enfants dont Anne, la petite dernière, trisomique, qu’elle tient principalement à protéger. Ils finissent par trouver un bateau en partance pour la Grande-Bretagne où ils arrivent le lendemain du jour où le grand Charles entrait dans l’Histoire. .

    Aussi curieux que cela paraisse, alors que Churchill a par exemple inspiré plusieurs biopics, c’est le premier qui s’attache à de Gaulle. Dès lors on imaginait le film événement. Mais l’idée de son auteur Gabriel le Bomin n’est pas, à l'évidence, de proposer une grandiose fresque historique ou un portrait fouillé du mythique général. Il se concentre sur un moment crucial de sa vie où son destin et celui de la France basculent, sur ces quatre semaines qui ont précédé son initiative capitale de rallier l’Angleterre pour aller faire entendre une autre voix, celle de la Résistance.

    Un surprenant couple fusionnel

    Le film ménage une tension dramatique même si on connaît l’enjeu. Construit autour de la décision politique de ce rebelle au regard décalé face à la situation, il en évoque plus particulièrement les implications personnelles. On peut regretter l’hagiographie classique, un côté parfois artificiel de certaines séquences. Mais au-delà de l'exaltation sans nuances de la volonté et de l'inflexibilité de son héros, Gabriel le Bomin révèle sa fragilité en nous plongeant dans son intimité. Dévoilant l'homme derrière le général. Le montrant en privé avec sa femme Yvonne, ou manifestant sa tendresse envers sa fille handicapée.

    Une touche de romanesque nous laissant découvrir un couple fusionnel surprenant, émouvant, qu’un amour inconditionnel mais pudique aide à supporter les épreuves. Il est bien interprété. A commencer par Lambert Wilson. Enfilant le plus lourd des costumes, dont cette curieuse veste d'uniforme trop longue, il a l‘intelligence de ne pas tomber dans l'imitation. A ses côtés Isabelle Carré incarne une Yvonne de Gaulle comme on ne l’a en fait jamais vue. Loin de la traditionnelle image de Tante Yvonne, on découvre une charmante femme de 40 ans, touchante, amoureuse. Certes timide et humble, elle n’en est pas moins elle aussi, à sa manière, une combattante.

    A l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 4 mars.

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