Ecrivain à succès, Victor Adelman vient de mourir. Lors de l’enterrement, sa veuve Sarah raconte à un journaliste 45 ans d’une vie commune, remplie d’amour, de passion, de trahisons, d’ambition, de chagrins et de secrets, depuis leur rencontre à l’occasion d’une soirée alcoolisée.
Devenue sa muse, elle se plonge dans le travail de son homme et l’épouse. Mais comment ont-il fait pour se supporter aussi longtemps? Qui était vraiment Sarah, vivant dans l’ombre de Victor? Pour son premier film, coécrit avec sa compagne Doria Tillier, ex-sulfureuse Miss Météo sur Canal, Nicolas Bedos nous entraîne dans une folle épopée conjugale. Démarrant dans les années 70, elle est aussi prétexte à une chronique socio-historique de la France de la deuxième moitié du siècle dernier.
"Le fils de..." est doué
Vu la personnalité du chroniqueur télé people, narcissique et tête à claques, c’est un peu à reculons qu’on allait découvrir Monsieur et Madame Adelman. Mais force est de constater qu’en dépit de quelques réserves, c’est la bonne surprise. Le film démontre un indéniable talent chez "le fils de…", qui livre une comédie à tiroirs ambitieuse mais bien maîtrisée, à la fois romantique, humoristique, acide, vacharde, cynique.
On aime le ton léger, désinvolte, les dialogues ciselés, les vannes, le jeu avec les codes des différentes époques les règlements de compte avec la famille, que servent par ailleurs d’excellents interprètes. Aussi bon comédien que réalisateur, Nicolas Bedos incarne parfaitement l’auteur en crise, égocentrique et à fleur de peau, aux côtés de personnages secondaires comme Denis Podalydès en psy désabusé ou de Pierre Arditi en vieux bourgeois réac odieux.
Irrésistible Doria Tillier
Sans oublier l’irrésistible Doria Tillier, rencontrée à Genève. Formidable, c’est une vraie révélation dans son premier rôle au cinéma. Elle nous confie que Nicolas s’est montré très exigeant.
"C’est fatigant, parfois déstabilisant. Quand on connaît bien quelqu’un, on décrypte tout de suite ses moindres déceptions. Il y a eu des tensions sur le plateau, mais on avait la même vision du film. C’était l’essentiel. Il ne m’a jamais demandé de faire quelque chose d’incohérent".
Vous dites être plus à l’aise en Sarah âgée qu’en Sarah jeune.
Agée, elle est plus loin de moi. Je préfère les rôles de composition. Ils m’amusent davantage. La notion de plaisir est importante. Quand j’étais Miss Météo sur Canal, j’adorais me déguiser, me travestir. Me cacher dans le fond.
Il s’agit d’une fiction, mais en même temps le film parle aussi un peu de vous.
Oui, il y a quelque chose de nous qui nous échappe. Nos proches pourraient remarquer que cela nous ressemble. Sans qu’on le cherche. Il y a juste des points communs avec nos personnages respectifs. A commencer par le physique évidemment...
Vous surfez sur l’imposture tout au long de l'intrigue
Aujourd’hui les gens s’attachent à l’image qu’ils renvoient. Sarah se moque de la gloire. L’important c’est ce qu’elle fait, ce qu’elle vit et, j'y reviens, le plaisir qu’elle prend. Lui est pétri d’angoisse à l’idée d’être mal aimé. Il a besoin de reconnaissance. C’est l’imposture au détriment de la posture.
Parmi tous les thèmes que vous traitez, il y a celui, rare et très osé, de l’enfant qu’on n’aime pas.
J’adore être sur un fil et ça me plaisait d’en rire. Mais si le sujet est difficile, la chose existe. On l’avait observé chez des gens. Beaucoup nous disent aussi que ça fait du bien de reconnaître qu’un môme parfois ça vous saoûle. Et puis il y avait l’envie de se moquer de ce couple qui a tout et projette un gamin prix Nobel Eh bien non, on ne peut pas toujours avoir de la chance jusqu’au bout!
Nicolas Bedos avouait que pour lui, ce film était la fin de l’ego trip. Qu’en pensez-vous ?
C’est une façon de se défendre après avoir beaucoup joué à la télévision avec un personnage narcissique, égoïste et mégalo.
A l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 15 mars.