Présenté en séance spéciale à Cannes en mai dernier, Amnesia a eu tout récemment les honneurs de la Piazza Grande au Festival de Locarno. C'est sans doute le film le plus personnel du Suisse Barbet Schroeder qui le voit revenir à Ibiza. Non seulement le lieu où sa mère, dont il s'inspire, a vécu, mais qui est aussi celui de ses débuts cinématographiques en 1969 avec More, son long-métrage sur la drogue.
En bouclant ainsi la boucle, Barbet Schroeder, tout en évoquant la naissance de la techno à Ibiza futur temple de la chose, se livre à une réflexion sur la barbarie nazie. Il agite de vieux démons en racontant l'histoire de Martha. Cette mystérieuse et intrigante Allemande s'est installée seule sur l'ïle en 1990, dans une belle maison blanche avec vue imprenable sur la mer. Symbole d'une génération qui a connu la guerre, elle a renié sa patrie depuis 1945, ne lui pardonnant pas son crime contre l'humanité.
Elle s’interdit ainsi de parler dans sa langue maternelle, d'utiliser un quelconque objet fabriqué en Allemagne. Ou de jouer du violoncelle qui lui rappelle de trop douloureux souvenirs. Jusqu'au jour où débarque son voisin Jo, un Berlinois exubérant d'une vingtaine d'années (Max Riemelt), dingue de techno et rêvant d’être engagé comme DJ à l’Amnesia, le fameux club électro (véritablement existant) de l’île. Une amitié ambiguë naît alors entre le jeune homme et sa compatriote Martha, son aînée de 40 ans (photo), qu’il finit par entraîner dans son monde. Avec le violoncelle…
Relation complexe sinon transgressive, dénonciation de l’amnésie allemande face à l’impossible oubli, refus d’assumer les atrocités commises forment la trame d’un film qui promettait beaucoup. Pourtant, à l‘exception de paysages sublimes inratables, rien ne va vraiment, du scénario bancal à la mise en scène maladroite.
Sans oublier l’interprétation. Car si l’irrésistible Marthe Keller assure comme toujours, on n’en dira pas autant de ses partenaires qui se contentent d’un jeu approximatif. Il vire même carrément au gênant lors de l’apparition de Bruno Ganz dans le rôle du grand-père de Jo, se lançant dans un long monologue de repenti en pleurant sur son passé criminel.
Film à l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 19 août.