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Grand écran: "Les graines du figuier sauvage", charge haletante contre le régime de l'Iranien Mohammad Rasoulof

Condamné à huit ans de prison début mai dernier, le réalisateur Mohammad Rasoulof avait fui son pays quelque temps auparavant de manière à pouvoir présenter en personne son film à Cannes. Vu l’accueil délirant reçu, la voie semblait toute tracée vers une Palme d’or. Mais l’Iranien a dû se contenter d’un Prix Spécial du jury. Projeté sur la Piazza Grande en août dernier, The Seeds Of The Sacred Fig, (Les graines du figuier sauvage) a sans surprise fait l’événement.

Tourné clandestinement, entrecoupé d’images réelles de manifestation et de violences policières prises au portable, le film renvoie à "Femme, Vie, Liberté", large mouvement de protestation qui a culminé à la fin 2022, suite à la mort de la jeune Mahsa Amini. Avec un art consommé du récit, l’auteur propose un thriller politique et familial captivant, , où il se livre à une charge contre le régime. 

Une inquiétante promotion

L’histoire est simple, Marié ä Najmeh et père de deux filles étudiantes, Rezvan et Sana, Iman est nommé juge d’instruction au tribunal révolutionnaire de Téhéran, alors que le pays est secoué par une vaste contestation populaire. La promotion inquiète sa famille, qui se sent en danger. Vite désabusé, complètement dépassé par les événements, Iman décide de se conformer à l’absurdité, aux injustices et à la cruauté du système. Il approuve des condamnations à mort à la chaîne, sans se préoccuper de preuves.  

L’Etat lui remet un pistolet qu’il range chez lui et qui, un jour, disparaît mystérieusement. Envahi par la méfiance et la paranoïa avec la vie qu’il est obligé de mener, Iman soupçonne de l’avoir subtilisé sa femme, ainsi que ses filles qui, contrairement à leur mère refusant de prendre position pour les protéger,, n’hésitent pas à soutenir le mouvement. 

On arrive ainsi dans une dernière partie construite à la fois comme un film de genre et une métaphore d’un régime au bord de la chute. Imaginant que des opposants le traquent, Iman décide d’emmener Najmeh, Rezvan et Sana à la campagne dans une maison isolée, pour leur faire avouer le vol de son arme, en usant de brutalité. Il n’y parviendra pas, ce qui provoque un final à la fois symbolique et  extravagant…. 

Un idée née en prison

Lors de sa conférence de presse, à Locarno, le réalisateur, longuement applaudi, a raconté que son film a commencé quand il était en prison avec Jafar Panahi, autre cinéaste. « On essayait de voir ce qui se passait dans la rue. A ma sortie, j’ai fait beaucoup de recherches, pour en savoir le plus possible ». 

Par la suite Rasoulof précise que l’idée lui est venue lors d’une rencontre alors qu’il aidait  un co-détenu en grève de la faim. "Un gardien est venu vérifier sa santé. Puis il s’est approché de moi et m’a donné un stylo. Au début je n’avais pas confiance. On a parlé quelques minutes et il m’a dit qu’il regardait toutes les portes de la prison pour savoir où il allait se pendre. Toute sa famille lui demandait pourquoi il faisait un travail aussi horrible".

Il ajoute: "Il  s’est passé beaucoup de choses depuis ma sortie de prison, Je devais absolument commencer mon film  car je savais que je devrai retourner bientôt. Donc j’avais très peu de temps et le tournage a été extrêmement compliqué. J’ai réuni des personnes qui pensent comme moi, sans se soucier de la censure". 

Mohammad Rasoulof ne cache toutefois pas que demeuraient la peur, la tension, les incertitudes,,  qui se retrouvent toutes dans l‘œuvre.. "En même temps, il n’était pas question que je la raccourcisse, que je la change à cause de la pression. Je devais montrer toute cette réalité. Avec tout ce que je voulais, toutes les émotions. J’ignore encore comment j’y suis arrivé face à tant de difficultés, pas assez de lumière, d’acteurs, de matériel... En plus j’ai eu le covid. je n’osais pas aller à l’hôpital de peur d’être reconnu… Mais finalement, j’ai réussi. Nous avons réussi, car  j’ai la chance d’avoir des collaborateurs extrêmement courageux, une équipe absolument fantastique à qui j’ai demandé de terminer le film."

En effet, la postproduction avait à peine débuté que l'auteur apprend qu'il était condamné à huit ans. "Je n’avais plus le choix. Je suis parti car je voulais continuer à faire du cinéma".

Les graines du figuier sauvage , à l’affiche dans les salles de Suisse romande dès mercredi 18 septembre  

 

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