Mercredi s’ouvre la 69e édition du Festival de Locarno, dédiée à l’Américain Michael Cimino et à l’Iranien Abbas Kiarostami, deux grands du septième art récemment décédés. Une édition riche que le président Carlo Chatrian, dont le poste a été maintenu jusqu’en 2020, a qualifiée de «la plus variée, la plus libre et la plus surprenante, dans le choix des invités films comme dans celui des films».
Un credo à vérifier sur pièces, comme ce parti-pris de retour aux sources d’un festival à contre-courant, qui a donné de la place à l’émergence de réalisateurs et de cinématographies. Ce qui n’empêchera pas la présence de nombreuses stars devant , derrière la caméra, ou distinguées par un prix.
Ce cru 2016 met les femmes à l’honneur. Particulièrement au sein de la compétition internationale, section où elles sont généralement sous-représentées. On en découvre huit, dont la Suissesse Milagros Mummenthaler avec La idea de un lago, sur les 17 prétendants au Léopard d’or. Tous auteurs de premières mondiales, ils ou elles viennent d’Egypte, de Thaïlande, d’Allemagne, des Etats-Unis, du Japon, de Bulgarie, du Portugal, de France, de Roumanie, d’Autriche, de Pologne, de Bulgarie.
Ces films racontent le monde et questionnent l’actualité, comme dans la demi-douzaine de volets du festival. A commencer par la Piazza Grande, proposant 16 longs-métrages entre blockbusters et films auteurs, aux 8000 spectateurs qui envahissent chaque soir la mythique place locarnaise. Avec en ouverture The Girl With All The Gifts du Britannique Colm McCarthy, évoquant, dans le futur, une partie de l’humanité détruite par un virus mortel. Autre représentant de Sa Majesté, Ken Loach, lauréat de la Palme d’or à Cannes en mai dernier, propose Moi, Daniel Blake, parcours kafkaïen d’un chômeur en recherche d’emploi.
Des femmes encore sous les étoiles. Avec Le ciel attendra, la Française Marie-Castille Mention Schaar se penche sur le sujet ô combien brûlant de la radicalisation islamique, tandis que Maria Schrader retrace, dans Stefan Zweig, adieu l’Europe, les dernières années de la vie de l’écrivain juif autrichien à New York et en Amérique du Sud.
Belle présence des Suisses
Outre le retour en concours de Milagros Mummenthaler (Léopard d’or en 2011 avec Abrir puertas y ventanas), à signaler celui de Frédéric Mermoud sur la Piazza. Son film Moka, mettant face à face Emmanuelle Devos et Nathalie Baye, montre une mère qui veut absolument retrouver le conducteur d’une voiture qui a renversé son fils et se confronte à une autre femme, très mystérieuse.
Hors concours, Nicolas Wadimoff présente L’optimisme de la volonté, un documentaire sur Jean Ziegler et Jacob Berger une adaptation du roman de Jacques Chessex, Un juif pour l’exemple, avec Bruo Ganz en vedette. On trouve encore La femme et le TGV de Timo Von Gunten, court métrage en compétition dans le concours national des Léopards de demain et Calabria de Pierre-François Sauter dans Panorama suisse.
Rétrospective, hommages et récompenses
La volonté de sortir des sentiers battus se manifeste par la grande rétrospective consacrée aux productions de la jeune République fédérale d’Allemagne de 1949 à 1963. Partie peu connue de l’histoire du cinéma et forte de quelque 75 films, elle a été conçue par le tandem Olaf Möller-Roberto Turigliatto, et notamment réalisée en collaboration avec la Cinémathèque suisse.
On reste dans le même état d’esprit avec le Léopard d’honneur attribué à Alejandro Jodorowsky, un artiste qui donne un ton particulier à cette édition. L’excellence Award récompense de son côté Bill Pullman, un comédien éclectique naviguant entre grosses machines, opus auteuristes, comédies et séries télé.
Harvey Keitel recevra un Léopard d’or pour l’ensemble de sa carrière et l’actrice Stefania Sandrelli le Leopard Club Award. Profitant de sa présence dans La femme et le TGV de Timo Von Gunten, le festival rendra aussi hommage à Jane Birkin. Il sera complété par la projection de son film Boxes (2006) et de La fille prodigue de Jacques Doillon, sorti en 1981.
Locarno, du 3 au 13 août.