L’Asie triomphe en cette 68e édition locarnaise. Alors que Tikkun faisait figure de favori, du moins à mon avis et celui d’une grande partie de la critique, c’est Right Now, Wrong Then de Hong Sangsoo, le seul que je n’aie pas mentionné dans mes pronostics, qui repart évidemment avec le Léopard d’or!
Une petite déception, mais un choix qui certes se justifie, voire bien davantage pour les fans du cinéaste sud-coréen, estimant qu’il est le seul à avoir produit un enchantement total.
Toutefois, en dépit d’une forme originale, le film étant dédoublé pour raconter deux versions de la même histoire à quelques détails près, le fond, se limitant peu ou prou aux galipettes amoureuses d’un réalisateur et d’une jeune peintre, ne contribue pas véritablement à mon éblouissement personnel.
Les meilleurs interprètes
Reste que le vainqueur Sangsoo déjà récompensé d’un léopard d’argent en 2013, fait même coup double, puisque son principal protagoniste Jung Jae-You (photo) est sacré meilleur acteur. Du coup question comédiens, je peux aussi remballer mes prévisions, aucun de mes préférés des deux sexes n’ayant réussi à séduire le jury.
Le Prix d’interprétation féminine est allé aux quatre filles de Happy Hour, Tanaka Sachie, Kikuchi Hazuki, Mihara Maiko, Kawamura Rira, pour leur prestation dans le conte fleuve (5h17) du Japonais Ryusuke Hamaguchi.
Suffisant pour donner une allure très asiatique à ce palmarès, le Nippon, l’un de mes papables, obtenant par ailleurs une mention spéciale pour son scénario.
TIkkun doit se contenter du Prix du jury
Pas de précieux métal donc pour Tikkun, dont j’ai déjà eu l’occasion de vous parler dans mes deux notes précédentes. L’Israélien Avishai Sivan se console avec le Prix du jury, deuxième récompense la plus importante, ainsi qu’une mention spéciale pour la photographie de Shai Goldman.
Enfin Cosmos d’Andrzej Zulawski, autre habitué des lieux, décroche le Prix de la réalisation. Assez logique, même si certains s'en étonnent, jugeant injustement à mon sens sa mise en scène à la limite du clownesque.
Quelques bons films sur la Piazza grande
Si la compétition de ce cru 2015 s’est révélée plus convaincante que par le passé, il en allait de même pour les films proposés sur la Piazza Grande. Outre des classiques, E la nave va de Federico Fellini, Pat Garrett & Billy The Kid de Sam Peckinpah (présentés en préfestival) et The Deer Hunter de Michael Cimino, on retiendra quelques nouveautés, dont en tête l’excellent La belle saison de la Française Catherine Corsini.
Mais on s’est aussi diverti avec Ricki And the Flash de Jonathan Demme, Southpaw d’Anton Fukua, Guibord s’en va-t-en guerre du Québécois Philippe Faladeau, Der Staat gegen Fritz Bauer (photo) de l’Allemand Lars Kraume, qui a obtenu le Prix du public. Sans oublier La vanité du Vaudois Lionel Baier où un vieil architecte las de la vie s’adresse à une association d’aide au suicide. Avec Patrick et Carmen Maura.En revanche on a touché le fond avec deux comédies américaines Trainwreck de Judd Apatow sur un scénario d’Amy Schumer, l’étoile montante du rire outre-Atlantique et surtout en compagnie de Me And Earl And The Dying Girl d’Alfonso Gomez-Rejon, une calamité tire-larmes où rien ne nous a été épargné.
Reprise de la rétrospective Peckinpah
Et bien sûr les amoureux du cinéma de Peckinpah, rebelle et hors-la-loi hollywoodien, représentant phare d’un Far-West en train de disparaître, se sont régalés de l’intégrale du réalisateur présentée en collaboration avec la Cinémathèque suisse.
On aura l’occasion d’en reparler, ainsi que de l’ouvrage qui lui a été consacré, sobrement intitulé Sam Peckinpah. De nombreuses institutions suisses, européennes, ou américaines reprendront en effet tout ou partie de cette rétrospective dont Les Cinémas du Grutli à Genève, du 19 août au 1er septembre.
En ce qui concerne la fréquentation, elle semble relativement constante. En l’absence de chiffres précis pour l’instant, les organisateurs notent une légère hausse du public le soir sous les étoiles et une petite baisse dans les salles durant la journée principalement due au beau temps. Trop beau pour aller s’enfermer dans l’obscurité….