Une chose est claire, la Piazza Grande est l’âme du festival et Locarno n’existerait pas sans elle. D’accord, elle n’est pas aussi menacée que le gorille des montagnes ou le requin pèlerin. Mais tout de même, elle se dépeuple drôlement cette année. Une moyenne pitoyable de 5000 spectateurs par soir depuis le début, alors qu’il y a parfois deux séances. Avec un pic à 7200 samedi dernier, une banalité dans la mesure où elle en absorbe plus de 8000, et un creux catastrophique à 2500, lundi soir. Sans compter que la météo n’est pas en cause.
Si les choses continuent de cette façon, les chiffres ne risquent pas d’exploser lors du bilan final ! Question de programmation peu alléchante évidemment. La faute en revient à Frédéric Maire. Il n’exige, paraît-il, que des premières mondiales. La belle affaire. Qu’importe un inédit planétaire s’il est mauvais ? Bien sûr, on n’a pas toujours vu des merveilles en plein air par le passé, bien au contraire. Sauf que pour booster l’endroit, Marco Muller et Irene Bignardi, les directeurs précédents, n’hésitaient pas à programmer quelques perles cannoises en guise d’avant-premières suisses.
Il est vrai que certains critiques le leur reprochaient, mais les fans n’en avaient cure. Mieux, le déjà vu mille fois ne les avait pas empêchés de se ruer à 10.000, quitte à s’asseoir par terre, pour ne pas manquer « Les oiseaux » du grand Hitchcock. Surtout en présence de Tippi Hedren…Bref, pour ne rien vous cacher, je m’étonne que Frédéric Maire fasse aussi peu de cas de ce lieu magique.
Enfin, heureusement qu’il nous a déniché quelques films convenables en compétition, dont une pépite. Je crois vous avoir raconté que je ne raffole pas des mangas. Mais s’ils étaient tous comme « Summer Wars », j’en redemanderais. Parce qu’il a de quoi faire sacrément de l’ombre, un euphémisme, à la désormais traditionnelle journée du Cinéma suisse, pour laquelle on a même peint le léopard en rouge et blanc.
Le virtuel et le réel se mêlent et se confrontent génialement dans ce long métrage d’animation de Mamoru Hosada, qu’on verrait bien quitter le Tessin cousu d’or. Un film extraordinairement foisonnant et incroyablement inventif, où les membres d’une famille nippone ordinaire s’unissent autour d’un petit génie en mathématiques pour sauver le monde. Faisant ainsi échec à la guerre totale qui se prépare dans la cité d’Oz, créée sur internet pour le fun, le business et la vie en général. Un chef d’œuvre du genre que nous offre le réalisateur japonais, avec cette captivante aventure en forme de victoire de la tradition et des liens familiaux sur la technologie la plus pointue.