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Grand écran: "Red Army", l'extraordinaire aventure de "l'invincible armada" du patin soviétique

images[4].jpgCCCP, le sigle gagnant sur des maillots rouges. Avec ses huit médailles d’or olympiques et ses dix-neuf couronnes mondiales, la Red Army qui a transformé le hockey en redoutable arme de propagande, était le symbole du socialisme triomphant, la preuve vivante que le système fonctionnait…

Dans un documentaire passionnant, l’Américain Gabe Polsky, lui-même fervent adepte du palet, nous replonge au temps de la Guerre froide, sur glace et en-dehors, en racontant l’extraordinaire aventure de la célèbre dominatrice des compétitions internationales entre 1976 et 1991.

Le destin de cette dynastie unique dans l’histoire du sport est intimement lié à celui de l’URSS d’alors, mue par une volonté obsessionnelle de puissance et dont l’auteur brosse un portrait très critique, sinon accablant. Comme son pays, la Red Army connaît la grandeur et la décadence, avant d’être secouée par l’éclatement du bloc soviétique.

Dépendante de l’armée, cette véritable machine à gagner sélectionnait les meilleurs au berceau ou presque. Formés à l’esprit d’équipe, ils étaient aussi biberonnés au sacrifice patriotique face au capitalisme. 

RedArmy[1].jpgParlant non sans arrogance face caméra, l’atout maître de Red Army, mettant constamment en parallèle la crosse et le pays, tout en insistant sur les antagonismes Est-Ouest, c’est  l’ancien capitaine légendaire Slava Fetisov (photo). 

Avec ses quatre coéquipiers Alexei Kasatonov, Vladimir Krutov, Sergei Makarov et Igor Larionov, il formait le quintet mythique d’un team adulé à domicile, craint, admiré et respecté par les grands clubs étrangers, à commencer par les Etats-Unis et dont le parcours hors du commun lui a valu sa quasi invincibilité pendant des années. 

A la base du succès, une cohésion sans faille, la primauté de l’intérêt commun sur les exploits individuels, et un jeu particulièrement créatif, tout en vitesse, finesse, légèreté et contrôle, prôné par un entraîneur s'inspirant du Bolchoï et les échecs. Résultat, une suprématie tactique et sportive totale, peaufinée dès 1977 à coups de serrages drastiques de boulons par l’homme du KGB, le terrible coach Viktor Tikhonov.

Ces forçats du patin broyés par l’autorité politique étaient entraînés à la dure dans un camp spécial dédié à une épuisante préparation physique. Ils vivaient en autarcie loin de leurs proches onze mois sur douze, constamment sous surveillance et sous pression psychologique. Un régime draconien qui ne les a pourtant pas empêchés d’aligner les victoires jusqu’à l’effondrement de l’URSS.

RedArmy1[1].jpgVers la fin des années 80, perestroïka oblige, Fetisov manifeste, à l’instar de ses camarades, l’envie d’aller jouer dans les grands clubs américains. Auréolé du statut de héros national il est bientôt condamné comme ennemi politique.

Moscou lui met des bâtons dans les roues mais il tient tête au Kremlin et, malgré les intimidations, les menaces et les violences, finira par jouer aux Etats-Unis. Un exil allant d’abord de pair avec des performances moyennes pour lui et lees autres  génies russes, avant la formation d'un fameux  "Russian Five" au sein du club de Detroit. 

Rentré au pays, Fetisov a pris sa revanche. Ministre des Sports de Poutine entre 2002 et 2008, il est aujourd’hui sénateur et continue à évoluer dans les cercles du pouvoir. Il fut aussi l’un des principaux  artisans des jeux de Sotchi en 2014. 

Allant au-delà du sport, la force du film de Gabe Polsky réside dans des images d’archives saisissantes, des entretiens parfois sidérants de joueurs et autres protagonistes de l’époque, des témoignages émouvants et de brillantes séquences de jeu .Du coup il parle à tout le monde.

Si les mordus de la rondelle prendront leur pied en retrouvant leurs idoles, nul besoin pourtant de connaître le hockey, ses règles et son histoire pour s’intéresser à ce documentaire aussi fascinant qu’instructif. Divertisant de surcroît, il ne manque pas d’ironie.  

Film à l’affiche dans les salles de Suisse romande depuis mercredi 4 mars.  

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